Mon travail sur le bilan de la formation acquise et ses impacts dans mon milieu professionnel consiste à expliquer ma contribution ainsi que les principes et enjeux de la participation en situation de perturbation qui ont été mis en cause dans mon organisation.
Dans le cadre de son plan de travail 2015-2016, la Direction des ressources humaines (DRH) s’est donné comme mandat d’offrir aux gestionnaires de mon organisation quelques ateliers portant sur différents thèmes. À la lumière de l’avancement des négociations tant à la table centrale que sectorielle, les gestionnaires de la DRH ont convenu d’inviter obligatoirement pour leur premier atelier tous les gestionnaires afin de leur exposer l’état des négociations et la gestion des moyens de pression pour les différentes catégories de personnel. Dès lors, la direction générale (DG) a décidé de me nommer avec mon confrère de travail représentante officielle pour tout le dossier de la gestion des moyens de pression. Nous savions que les votes de grève débutaient dans le réseau et pour mon employeur, les assemblées générales pour obtenir le droit de grève étaient planifiées du mercredi 23 au vendredi 25 septembre. L’invitation faite, nous nous sommes mis en mode de préparation à la mi-septembre pour organiser cette journée du lundi 21 septembre. Nous avons décidé de faire trois groupes de gestionnaires afin de permettre à tous d’échanger sur les préoccupations de la situation, d’évaluer les possibles perturbations, d’en dégager certains constats et de discuter du rôle que chacun aurait pour la gestion de la grève soit avant, pendant et après.
J’ai collaboré avec mes collègues à la DRH pour préparer la présentation, et diviser les tâches pour l’exposé. Cette démarche apprenante fut un moyen d’intégrer trois champs d’intervention de la gestion participative dans mon travail au quotidien à titre de gestionnaire. En effet le volet stratégique a été le premier élément ou nous devions avoir la même vision du dossier notamment sur les plans d’action, le contrôle et l’évaluation. Le deuxième élément du champ d’intervention a été le volet organisationnel. Nous retrouvions les aspects des structures et des processus par exemple le partage des responsabilités, des tâches, des méthodes et techniques de travail. Le dernier champ d’intervention a été le volet opérationnel pour la gestion des ressources et les tâches du personnel. Par conséquent, en procédant de cette façon, nous renforcerions le mode de gestion participatif avec l’ensemble des gestionnaires, car nous allions partager une vision commune et des valeurs semblables, un engagement de tous, une gestion axée sur les résultats, de l’information partagée, une communication améliorée et une plus grande transparence du comité de direction.
Plusieurs des gestionnaires n’ayant jamais vécu une grève étaient enchantés de cette invitation. Le succès fut immédiat, car les participants ont souligné qu’ils avaient un besoin de bien comprendre ce qui se pointait à l’horizon et de connaître leur rôle et responsabilité face aux enjeux des négociations.
Voici le plan d’action des présentations :
• Négociations – état de la situation (table sectorielle, centrale, vote de grève);
• Gestion des moyens de pression : Objectifs; Grève; Piquetage; Mesures à prendre avant la grève;
Mesures à prendre pendant la grève;Mesures à prendre après la grève;
• Autres moyens de pression;
• Messages clés.
Parallèlement, nous avions le mandat de nous entendre avec nos représentants syndicaux du déroulement de la journée de grève. Une première invitation a été faite pour débuter nos discussions et s’entendre sur certains points techniques notamment qui allait être nos porte-paroles lors des discussions tant avant, pendant et après la grève et d’échanger nos numéros de cellulaire. Plusieurs rencontres et appels téléphoniques furent nécessaires pour arriver à la rédaction de deux versions de l’entente relative à l’arrêt de travail du 28 octobre 2015 que j’ai rédigées et présentées.
Dès le début de nos échanges avec nos partenaires syndicaux, nous avons convenu que nous allions fonctionner en mode de gestion participative. Nous voulions maintenir dans les circonstances un bon climat de travail, une confiance entre gestionnaires et employés, une continuité dans les communications, une diminution des risques de perturbations, et un prolongement de la synergie existante au sein de la communauté. Cette démarche participative a été l’assise de nos entretiens et délibérations avec tous nos partenaires tant syndicaux que gestionnaires ou locataires. Nous nous sommes entendus que les interventions devaient se faire dans le respect mutuel c’est-à-dire chacun aurait un droit de parole, son opinion et surtout d’avoir le droit d’être écouté activement. De plus, nous avons incorporé la transparence, la confiance mutuelle et l’ouverture d’esprit. En un très court laps de temps, j’ai organisé de nombreuses réunions et je suis arrivée à faire signée toutes les parties la version finale la veille de la grève.
Tout au cours du processus de négociation, nous avons consulté de part et d’autre nos différentes instances. De notre côté, le comité de direction, tous les gestionnaires et les locataires ont été sollicités et informés de l’avancement des négociations et des conclusions des pourparlers de cette entente. Évidemment, il a fallu que j’utilise mes habiletés de persuasion pour arriver à convaincre certains gestionnaires et locataires d’accepter les modalités de l’entente, car la ligne de piquetage se voulait ferme. Les enjeux étaient grands, car pour certains gestionnaires et locataires les pertes de revenu allaitent être considérables. Tandis que les syndicats ont obtenu les mandats de grève de façon démocratique et que les journées de grève doivent perturber et même déranger la communauté et à la population tant au niveau économique que social pour faire bouger le gouvernement.
Nous avons réalisé que cette forme de participation est plus facile à l’échelle locale et s’exerce même dans le domaine de l'enseignement. Malgré toute attente, j’ai réussi à faire signer nos partenaires syndicaux l’entente de l’arrêt de grève du 28 octobre 2015. Le mot d’ordre qu’ils avaient reçu de leurs centrales syndicales était de refuser toute entente signée et de convenir verbalement au fonctionnement de la journée de grève. La résistance d’élaborer une démarche participative provenait des syndicats nationaux et non locaux. Après vérifications auprès de d'autres DRH, il semble que nous sommes le seul à avoir obtenu cet exploit.
Toutefois, je me questionne pour les prochaines discussions sur les journées de grève si nous arriverons à une entente signée.Une dernière réunion avec nos gestionnaires quelques jours avant la première date fatidique a été organisée pour leur expliquer les délibérations (le climat de travail) et surtout les consignes par exemple les messages clés sur les négociations, la notion «no work no pay», qu’aucun employé ne peut faire une demande de modification à son calendrier de vacances pour éviter d’être coupé, ou un employé devra fournir un certificat médical avec diagnostic la journée même s’il est malade. Il y avait beaucoup de fébrilité par les gestionnaires, car nous devions discuter avec eux la pertinence d’être au travail avant la ligne de piquetage et de rester cloîtrer toute la journée dans les édifices. Chacun a pu exprimer son opinion et participer au processus décisionnel. Après plusieurs échanges, il a été convenu que chacun resterait chez lui pour faire du télétravail.
La journée de grève s’est déroulée de façon pacifique et sans embûches majeures. À la blague avec tous nos partenaires, je leur ai dit que c’était une générale! Très tôt le matin, j’étais présente sur place pour m’assurer de la bonne marche à suivre que nous avions établie avec les syndicats. Je suis revenue au cours de l’après-midi pour discuter avec mes représentants syndicaux de la progression de la journée et du retrait de la ligne de piquetage. Force est de constater que les conditions de réussite au mode de gestion participative a été un franc succès. En effet, l’ouverture personnelle des décideurs, l’adhésion de nos partenaires, l’investissement en temps que j’ai consacré et surtout la cohérence entre le discours que je véhiculer et nos actions ont été des conditions gagnantes pour traverser cette journée de perturbation annoncée en Montérégie.
J’ai organisé deux jours après la grève une rencontre avec nos porte-paroles syndicaux pour faire un bilan de cet évènement. Chaque partie a procédé à un bilan très positif et souhaite continuer de poursuivre le mode de gestion participatif adopté pour faire face aux turbulences mises en cause dans notre milieu. En effet, cette gestion participative a été un mode de gestion authentique permettant d’utiliser le potentiel créatif des différents acteurs, aux différentes étapes du processus décisionnel, en vue d’atteindre les résultats attendus. Également, j’avais la responsabilité de réaliser avec mon équipe la coupure de salaire pour cette journée de grève qui devait être effectuée dès la prochaine paie.
Cet exercice a été pour moi une activité à valeur formatrice. Elle a requis de ma part une implication intense engendrant la manifestation d’un esprit d’initiative, la poursuite du développement de mes capacités d’analyse et de synthèse ainsi que de mon esprit critique. Également, cela m’a permis d’accroître mes compétences personnelles, telles mes habiletés de gestion, en coordination et en planification, ma capacité de travailler en équipe, de faire preuve d’autonomie et de rigueur, de bien communiquer, d’exercer ma créativité et de manifester de l’ouverture face au changement et à l’innovation. L’investissement de mon temps dans ce projet est considérable et important. J’évalue depuis la mi-septembre les heures consacrées à la réalisation de cet évènement perturbateur dans mon milieu de travail de l’ordre de plus de 250 heures.
Nous nous préparons pour la suite des journées de grève annoncées du 12 et 13 novembre prochain. À moins qu’une entente négociée entre le gouvernement et le front commun survient entre temps.
Marie-Renée Foisy