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Élo lévesque

  • Le canada et la protection de ses citoyens... une utopie??

    Alors que je m'apprête à faire mes valises pour un voyage ludique en Jamaïque, je me surprends moi-même à ressentir une vague inquiétude en regard de ma sécurité.  Moi qui a déjà visité l'Italie, la Grèce, la République Dominicaine, la Turquie et une quinzaine des plus grandes villes américaines, voilà que pour la première fois, je suis inquiète... 

    Les positions et les actions (ou plutôt non-action) du gouvernement du Canada dans plusieurs dossiers au cours des dernières années ont finies par m'amener à un constat: si je sors du pays, je ne peux être certaine que mon gouvernement me protègera en cas de problème.

    J'ai été sidéré par ce citoyen canadien actuellement détenu aux États-Unis et condamné à la peinde de mort pour qui le gouvernement Harper a choisi de ne pas demander son rapatriement alors que c'est ce que la canada a toujours fait jusqu'ici dans de pareils cas.  J'ai été sidéré aussi par le drame de cette canadienne d'origine somalienne, Souaad Hagi Mohamud, qui a été emprisonnée au Kenya pendant plus de trois mois parce que les autorités kenyennes pensaient qu'elle n'était pas la même femme que sur le passeport qu'elle présentait.  Le gouvernement canadien aurait été en mesure de règler cette situation promptement, et pourtant...  À mon avis,  l’image de la diplomatie canadienne sur plan international a été remise en question alors que le Canada, de tout temps, s’était démarqué par sa promptitude à assister ses citoyens une fois en difficulté administrative dans un pays étranger.   Il semble que les choses soient en train de changer...

    Et que dire de l'affaire Omar Kadhr? Un autre citoyen canadien abandonné à son sort dans un pays étranger et dans une prison à la réputation douteuse de surcroît...  Alors que la Cours Suprême du Canada intime le gouvernement Harper de demander la rapatriement de son citoyen, le gouvernement affirme haut et fort ne pas avoir l'intention de le faire et invite même, ni plus ni moins, la Cours Suprême à se mêler de ses affaires rétorquant qu'il s'agit là d'une décision diplomatique point final! Comment le gouvernement peut-il ne pas répondre aux exigences du plus haut tribunal du pays?  En terme de transparence et de reddition de comptes... on repassera!

    Et maintenant, comme si les exemples n'étaient pas assez nombreux, nous voilà en pleine tourmente politique avec l'affaire des prisonniers remis aux autorités afghanes et qui auraient été victimes de torture.  Nous savons que la Croix-Rouge a informé le gouvernement canadien dès le printemps 2006 des risques de tortures qu'encouraient les prisonniers.  Pourtant, les soldats canadiens ont continué de remettre des prisonniers aux autorités afghanes.  Cette situation m'apparait des plus préoccupante, sachant que le gouvernement Harper a tenté de nier et de camoufler les faits.  Alors que les partis de l'opposition à Ottawa réclament que le gouvernement fournisse aux parlementaires les documents de ces transferts de prisonniers, le gouvernement s'y refuse... pour des questions de sécurité!  Le témoignage du diplomate Richard Colvin ne fait pas de doute quant à la responsabilité d'Ottawa sur cette question.  Après s'être soustrait de l'entente sur le protocole de Kyoto, le gouvernement Harper me semble être en bonne voie de bafouer ses responsabilités en regard de la Convention de Genève.

    Télé-Québec a diffusé un documentaire percutant le 12 décembre dernier concernant des innocents qui ont été victimes de torture dans des pays où ils étaient de simples visiteurs.  Des cas ont été retracés au Guatemala, au Honduras, en Argentine et en Irak pour ne citer que ceux-là.  Et, à mon grand désarroi, le gouvernement américain a une grande responsabilité dans bon nombre de ces cas: soit par  son inaction, soit par sa participation directe aux politiques et aux actes de torture.  Je ne peux pas affirmer être surprise par cela, ce qui me surprend cependant, c'est que je me retrouve aujourd'hui à penser que le Canada pourrait aussi être responsable de telles pratiques et à penser également que le Canada n'est peut-être plus le grand défenseur des droits humains que j'ai toujours pensé qu'il était.

    Pour la première fois de ma vie je quitterai le Canada avec une vague inquiétude au ventre puisque je réalise maintenant que mon pays ne me viendra peut-être pas en aide si je me retrouve dans une situation précaire à l'étranger et ce, même si je ne suis coupable d'aucun méfait.  En ces temps où le gouvernement canadien me semble se positionner au-dessus des lois, au-dessus de la reddition de comptes et au-dessus de toute forme de transparence.. plus que jamais j'aurais envie de voyager avec un passeport québécois!

  • Un système d'éducation à deux vitesses.

    ÉCOLES PUBLIQUES VERSUS ÉCOLES PRIVÉES, EST-CE LE BON DÉBAT?

    Au cours des dernières semaines, l'éternel débat de notre système d'éducation en ce qui concerne les établissements d'enseignement publics et privés a continué d'être omniprésent sur la place publique.  Que l'on parle de la qualité de l'enseignement, du taux de réussite ou de décrochage, de la qualité de l'encadrement ou des services offerts, la plupart des gens semblent avoir une opinion plus ou moins définie sur le sujet et pour plusieurs, l'école privée semble être la grande gagnante!

    Cependant, il me semble évident que la véritable question n'est pas de savoir quel réseau est le meilleur mais plutôt: est-ce que le système d'éducation québécois, dans son ensemble, est performant?  Est-il  à la hauteur de nos ambitions, de nos aspirations en tant que société? Ayant fréquenté l'école publique tout au long de mes études, ayant enseigné dans le privé pendant 12 ans et travaillant maintenant comme gestionnaire dans le public, je serais à même de faire une longue liste des avantages et des inconvénients de chacun des réseaux, mais je ne le ferai pas!  Je ne le ferai pas parce que, selon moi, il est temps de déplacer le débat.  Il est temps de se questionner sur la pertinence de l'existence d'un double système, sur les impacts sociaux d'un tel choix.

     

    LE COÛT SOCIAL

    Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre, il y a quelques semaines, le directeur du Collège Régina-Assumpta annoncer en grandes pompes la fin des séances d'examens d'admission dans son établissement.  La raison?  Trop de pression sur les jeunes.  Une bonne nouvelle... en apparence!  On compare le stress ressenti par les jeunes lors de la période d'admission dans les écoles privées secondaires à celui qu'ils vivent lors de leur entrée au Cégep, à une différence près: dans le premier cas ils ont 11 ou 12 ans et dans le deuxième, 16 ou 17 ans.  Cependant, en abolissant les examens d'admission, la direction du Collège n'enlève pas la pression sur ces jeunes puisque la sélection, quant à elle, demeure.  En effet, les élèves seront admis ou non en fonction de leur bulletins de 5e et 6e année, exactement la même procédure que pour l'entrée au Cégep!

    La réalisatrice Marie-Josée Cardinal a réalisé un documentaire criant de vérité sur les effets du passage primaire-secondaire chez beaucoup de jeunes.  "LES ENFANTS DU PALMARÈS", diffusé à Canal D se veut un documentaire touchant et alarmant parce qu'il met en lumière la réalité vécue par de nombreux jeunes québécois.

    • Pression des parents: on constate que de nombreux parents font savoir à leurs enfants qu'ils doivent à tout prix êtres admis dans une école privée, que l'échec n'est pas envisageable.
    • Pression des pairs: plusieurs élèves qui ne choisissent pas le privé ou qui n'y sont pas admis se font dire par leurs amis qu'ils ne réussiront pas dans la vie ou encore qu'ils se feront frapper régulièrement par les autres dans leur école publique.

    Il ne s'agit là que de quelques exemples, mais il est sidérant de voir à quel point le réseau public est victime de préjugés et ce, autant de la part des parents que des jeunes eux-mêmes.  Plus stupéfiant encore: constater à quel point le fait de ne pas être accepté dans un établissement privé prend des allures de drame pour de nombreux parents et enfants.

    Et c'est ce qui m'amène à parler de coût social.  Rares sont les études sur les effets d'un tel refus sur ces familles et plus particulièrement sur les jeunes mais le documentaire est éloquent. Le drame ce n'est pas d'être refusé mais bien de constater que ce refus amène des jeunes à se déprécier, à perdre tout goût de l'école,  à croire qu'ils ne peuvent pas réussir, qu'ils ne sont pas à la hauteur, et même de voir des jeunes sombrer dans la dépression.  À une époque où on cherche à contrer le décrochage scolaire, voilà le portrait typique de jeunes décrocheurs en contruction.

     

    UN SYSTÈME À DEUX VITESSES

    Nous savons tous que les écoles privées sont financées par l'état à hauteur de 60% et plusieurs ont remis en question ce financement.  Pour ma part, c'est l'existence même du réseau privé que je remets en question.  Les effets négatifs, non pas de deux systèmes d'éducation mais bien d'un seul système à deux vitesses, m'apparaissent  inacceptables.  

    Losque l'on permet à certaines écoles de sélectionner leurs élèves pour ne garder que les meilleurs, la cause directe est que les autres élèves se retrouvent tous dans une même école publique située non loin de là.   "L'école privée vide l'école pulique de ses meilleurs élèves en même temps qu'elle la prive de parents intéressés à l'éducation qui pourraient autrement s'engager dans l'amélioration de l'école commune." (1) En retirant les meilleurs éléments d'une école on enlève, à cette même école, un potentiel positif énorme. Si tous les élèves d'un même secteur se retrouvent dans la même école, le leadership positif, le goût de l'implication, le désir de réussir des éléments les plus performants de cette école ne peuvent qu'avoir un effet d'entraînement positif sur tous les autres élèves. La sélection effectuée par le réseau privée prive donc le système public d'éléments-clés mais surtout, elle prive les élèves du public d'un potentiel de développement énorme en les privant du contact de certains des meilleurs élèves, ce sont donc les jeunes qui sont les plus grands perdants!

    La sélection effectuée par les écoles privées avec la bénédiction de l'état a un effet pervers sur le système public qui se retrouve avec un plus grand ratio d'élèves en difficulté pour lesquels il doit mettre en place une multitude de services qui, bien souvent, ne suffisent plus à la tâche. Dans une école secondaire publique de 1000 élèves par exemple, il y a certains services mis en place: psychologues, éducateurs spécialisées, psycho-éducateurs, orthopédagogues, etc.  Le fait que les meilleurs élèves soient souvent admis dans une école privée fait en sorte que l'école publique se retrouve avec un plus grand nombre d'élèves ayant besoin de ces services ce qui, par le fait même, rend la tâche beaucoup plus difficile.  La mission d'intégration des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage revient donc exclusivement à l'école publique.

    Saviez-vous que tous ces services que je viens d'énumérer ne se retrouvent pas dans les écoles privées?  Lorsqu'un élève du privé a besoin de ces services on demande aux parents de le retirer de l'école à la fin de l'année scolaire et parfois même, on leur indique la sortie en pleine année scolaire.  J'en ai vu des jeunes arriver dans mon école publique à la suite d'un renvoi, je ne sais pas si, comme société,  nous mesurons l'impact que cela peut avoir chez un jeune qui éprouve déjà des difficultés?  Je ne sais pas non plus si on imagine l'effet perturbateur que cela peut avoir sur les autres élèves, ceux qui accueillent ces jeunes en cours d'année?  Et sur les enseignants qui doivent éviter la désorganisation de tout un groupe tout en favorisant l'intégration de ce nouvel élève qui arrive, bien souvent, très démotivé? J'imagine que non, puisque cela va totalement à l'encontre du principe d'égalité des chances en éducation.

    LE RÔLE DE L'ÉTAT

    Nous sommes en droit de nous demander pourquoi le gouvernement maintien le financement des écoles privées.  J'imagine que le fait que l'éducation soit la deuxième dépense publique après la santé est en partie  réponse à cettte question.  Bien entendu, on peut douter de la capacité de l'état à absorber, à court terme, les coûts que représenteraient un seul réseau d'éducation.  Verser 100% plutôt que le 60% de la subvention accordée pour chacun des 125 128 élèves (2) qui fréquentent l'école privée représente une augmentation des coûts considérable. Cependant, les coûts d'un système à deux vitesse ne sont-ils pas, à long terme, beaucoup plus importants?

    Alors qu'en Administration Publique les gens sont imputables de toutes leurs décisions, comment la plus haute marche de cette Administration Publique peut-elle, consciemment, prendre le risque de ne pas développer pleinement  le talent et le potentiel de nombreux jeunes?  Nombreux jeunes que nous perdons par une pression inutile et excessive en jeune âge, par un manque de stimulation positive par leurs pairs, par un renvoi inutile d'une école secondaire...  De nombreux jeunes que nous perdons en cours de route et qui ne seront pas les acteurs sociaux que nous avions le devoir d'en faire!

    À quand donc la reddition de compte pour le gouvernement? Pourquoi ce dernier ne serait-il pas soumis à ce pricipe de base de l'Administration Publique lorsqu'il s'agit de coûts sociaux?   

     

    (1): Ministère de l'éducation, des loisirs et des sports.  Rapport des états généraux sur l'éducation. 1995-1996.

    (2): Élèves inscrits dans une école privée primaire ou secondaire pour l'année scolaire 2008-2009.