Les commissions parlementaires: Une meilleure vitrine sur la démocratie
Jeudi dernier, je participais, dans le cadre de mon séminaire d'intégration à la maîtrise en administration publique de l'ENAP, à une visite de l'Assemblée Nationale organisée par notre professeur, M. Rémy Trudel. Ce fût un privilège d'être accompagnée par cet ancien député du Parti Québécois qui au-delà de l'institution, nous a parlé des jeux politiques habiles auxquels sont confrontés nos élus dans l'exercice de leurs fonctions. Nous avons donc assisté à la période des questions où l'objectif ne semble pas de répondre à son adversaire, mais bien de faire mousser la ligne du parti afin d'alimenter les médias. Ainsi, lorsque le citoyen regarde la période de questions, il assiste à une mauvaise pièce de théâtre où la réplique ne vise qu'à ébranler la crédibilité des idées défendues par ses adversaires et non pas à faire progresser le débat. Ces déclarations sont alors reprises en boucle sur nos réseaux d'information afin de renseigner la population. Il n'est donc pas étonnant que les citoyen soient de plus en plus cyniques face à nos élus et de moins en moins engagés envers les enjeux de notre société.
Par contre, lors de cette même visite, j'ai pu constater une franche camaraderie entre les élus des différents partis et un réel désir de représenter les citoyens de l'ensemble de notre province. L'Assemblée Nationale s'est dotée de commissions parlementaires qui sont des: « groupe(s) composé(s) d'un nombre restreint de députés chargés de l'examen de toute question relevant de sa compétence. » (1) Ainsi, c'est en commission parlementaire que les projets de loi sont étudiés en profondeur, que les activités des ministères et des organismes publics sont étudiées et que les prévisions budgétaires sont examinées. Incidemment, les commissions parlementaires permettent aux députés d'exercer pleinement leur rôle de législateur et de contrôleur de l'État.(2) J'ai donc eu la chance d'assister à la commission parlementaire sur le projet de loi 62 - Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l’État et visant notamment à encadrer les demandes d’accommodements religieux dans certains organismes où Mme Fatima Houda-Pépin est venue exposer son point de vue sur la question. S'en sont suivis des échanges avec la ministre de la justice, Mme Vallée, avec Mme Maltais, vice présidente de la commission des institutions et porte parole de l'opposition officielle en matière de laïcité et enfin avec Mme Roy, porte parole en matière de laïcité du deuxième groupe d'opposition. Dans ces échanges, j'ai constaté un véritable désir de comprendre le point de vue de Mme Houda-Pépin en l'amenant à spécifier sa pensée. Par ailleurs, la ministre Vallée a clairement démontré son ouverture à bonifier le projet de loi à l'étude en fonction des diverses visions qui ont émanées des consultations publiques tenues. En ce sens, elle a demandé l'avis de Mme Houda-Pépin sur la nécessité d'inclure un préambule au projet de loi pour définir et préciser les concepts afin d'amenuiser leur interprétation en fonction de l'angle du lecteur. Ces échanges riches sont à mon avis l'expression réelle de la démocratie. C'est avec un engouement certain pour le sujet à l'étude que je suis retournée à la maison et que j'ai écouté sur le site internet de l'Assemblée Nationale d'autres intervenants venus présenter un mémoire à la commission parlementaire.(3) Ces présentations riches ont mis en évidence des points de vue de tout acabit qui peuvent guider nos élus.
M. Hassan Jamali, immigrant syrien, est venu partager son expérience comme professeur et citoyen du Québec depuis 39 ans. Sa position sur le sujet n'est non pas revendicatrice de droits en matière de religion, mais interpelle davantage nos élus sur leur obligation de protéger les citoyens de l'intégrisme. En ce sens, Mme Maltais rappelle que bien que son partie et celui de Mme Roy ont une vision beaucoup plus restrictive que le projet de loi à l'étude, l'objectif de la commission est de travailler ensemble pour le parfaire et le faire évoluer et non pas de le réécrire. (4) Incidemment, je vois dans ces propos un réel désir de tous les partis de travailler ensemble pour que le projet de loi présenté à l'Assemblée Nationale lors du vote, soit le meilleur possible pour les citoyens compte tenu de la vision du parti au pouvoir.
Conséquemment, j'estime que les commissions parlementaires sont une bien meilleure vitrine de la démocratie que la période des questions. Le travail qui y est fait est malheureusement gardé sous silence par les médias. Comme citoyenne politisée, je vous propose de regarder périodiquement les travaux de ces commissions qui sont disponibles en vidéo sur le site internet de l'Assemblée Nationale, et ce, pour les sujets qui vous interpellent comme acteurs importants de l'administration publique et comme citoyen appelé à se prononcer sur nos élus lors des élections. La démocratie est un grand privilège et de voir à l'œuvre certains nos élus en commission parlementaire m'a réconciliée avec leur véritable désir de servir et de représenter les citoyens.
Nathalie Boudart
Références
(1). http://www.thesaurus.gouv.qc.ca/tag/terme.do?id=2876
(2). http://www.assnat.qc.ca/fr/abc-assemblee/travail-commission.html
(3). http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/archives-parlementaires/travaux-commissions/index.html
(4). http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/archives-parlementaires/travaux-commissions/AudioVideo-69693.html