Devenir un employeur de choix, un défi à relever pour le système de santé
Selon les plus récentes données démographique, le nombre de personnes en âge de travailler commencera à décroitre à partir de 2013. C’est donc dire qu’il deviendra de plus en plus difficile de combler les départs à la retraite, laissant des emplois disponibles. Ce débalancement engendrera des répercussions importantes sur le système de santé. En effet, la demande de service dans le secteur des services augmentera considérablement. La santé et les services sociaux font partie des quatre domaines de compétences qui connaitront, d’ici 2018, un rythme de croissance de leur effectif plus élevé que celui de l’emploi total, en particulier pour les emplois de niveaux technique et de soutien (source : Emploi Québec).
Le calcul est relativement simple : départ à la retraite = embauche et recrutement. Pour garder l’équilibre dans cette opération, le système doit procéder à de profonds changements et réussir un véritable tour de force : attirer les jeunes dans les emplois du secteur de la santé et surtout, retenir la main d’œuvre en place.
Nouvelle génération, autres valeurs…
Nous le vivons déjà, l’arrivée de la nouvelle génération de travailleur (les « Y ») engendre des frictions avec les travailleurs plus âgées, notamment ceux de la génération « X ». En effet, le concept de permanence, le travail acharné, la définition de son identité personnelle par le travail… Ces valeurs ne collent plus à celles de la nouvelle génération, qui recherche bien sûr un emploi stimulant et des possibilités d’avancement, mais jamais au détriment de leur vie personnelle, sociale et familiale. L’organisation du travail devra être repensée en conséquence, en s’appuyant sur les besoins des travailleurs. S’il est vrai qu’il est plus facile de gérer des employés qui ont des horaires fixes, cela ne convient pas nécessairement aux travailleurs. Des horaires plus flexibles et la possibilité de travailler à partir du domicile devront inévitablement faire partie des solutions à envisager, sans quoi l’attraction et la rétention de personnel en souffrira. La gestion du personnel comporte inévitablement des difficultés et selon moi de deux maux il faut choisir le moindre. Je considère donc qu’il est préférable de devoir jongler avec des horaires variés et ainsi maintenir au travail des employés heureux que d’être au prises avec un problème de roulement de personnel trop élevé.
L’attraction…
La situation actuelle est difficile, la pression est grande et le personnel est épuisé. De toute évidence, cela n’a rien d’attrayant pour un jeune. Et les médias en rajoutent en faisant constamment ressortir les failles du système public et dressant jour après jour le sombre portrait des travailleurs et de leurs conditions. Qu’à cela ne tienne! Le système est tout à fait capable de répliquer et il est plus que temps qu’il ne le fasse, en projetant une image positive et attrayante du secteur. Une campagne de charme doit selon moi être amorcée, en visant particulièrement les domaines techniques. À cet effet, la publicité pour la campagne de recrutement des forces armées canadiennes est particulièrement inspirante, avec un message fort : « combattez la peur, la détresse et le chaos ». Voilà une image forte, qui arrive à faire ressortir les pires difficultés en véritables défis. Si l’armée arrive à attirer ainsi de nouvelles recrues, je ne vois pas pourquoi le secteur de la santé ne pourrait pas réussir. Alors pourquoi ne pas s’inspirer de ce type de campagne pour attirer les jeunes vers les emplois du secteur de la santé, en leur proposant un travail stimulant dans des milieux offrant des possibilités et des opportunités aussi nombreuses que variées? Travailler dans un milieu en constant changement et avoir la possibilité d’innover: voilà le genre défis que recherche la nouvelle génération.
La rétention…
Non seulement faut-il attirer la nouvelle main-d’œuvre, il faut la garder. La rétention du personnel s’avère donc un aspect incontournable. Il faut axer la gestion sur le développement de carrière, identifier rapidement les employés qui présentent un potentiel prometteur et miser sur eux, en leur proposant un plan de formation et des responsabilités adaptées à leurs compétences. Ce n’est pas parce que les échelles salariales sont fixées à l’avance que de la reconnaissance ne peut pas être faite. Le système public ayant ses limites financières, il faudra faire preuve de créativité et trouver des moyens de faire de la reconnaissance non pécuniaire afin de consolider le sentiment d’appartenance des employés. La rétention doit également concerner le personnel plus âgé. Les programmes de retraite progressive et les congés de rétention doivent être maintenus, on doit trouver des solutions afin de maintenir à l’emploi les employés le plus longtemps possible. Leur expertise est précieuse et on doit leur faire valoir ce point.
Le transfert des compétences…
S’il y a une chose que la main-d’œuvre plus âgée possède et sur laquelle les plus jeunes ne peuvent rivaliser, c’est l’expérience. Les gestionnaires doivent tout faire pour maximiser le transfert des connaissances et des compétences. Cela doit être planifié le plus tôt possible puisqu’il est évident qu’après les départs à la retraite, il sera trop tard. Il existe actuellement des programmes de relève des cadres qui sont assez efficaces pour préparer les futurs gestionnaires du réseau. Cependant, ce type de programme n’existe pas pour les autres employés et le transfert de la compétence se fait souvent « sur le tas ». Pourtant, leur savoir-faire est précieux. Alors pourquoi ne pas instaurer un programme reconnaissance pour la transmission des compétences? Pour les plus jeunes, le bénéfice est évident. Pour ceux qui transmettent leurs connaissances, ce type de programme permettrait de leur donner un deuxième souffle, de les valoriser et renforcer le sentiment qu’ils sont essentiels pour assurer la continuité des soins.
Lorsqu’on y pense, le système public de santé dispose d’une solide base pour attirer la nouvelle main-d’œuvre : un environnement dynamique, des défis stimulants, des emplois valorisant à plusieurs niveaux et dans des milieux variés. Ce ne sera certainement pas chose facile, mais je suis convaincue qu’une profonde réorganisation du travail, doublée de mesures efficaces d’attraction et de rétention du personnel engendreront des améliorations notables. Le système public nous appartient, que nous soyons gestionnaires, travailleurs ou bénéficiaires. À nous d’en faire un employeur qui nous ressemble, un employeur de choix.