Blog INTRA 2 Problématique de l'exploitation minière au Burkina
ENP7505 : Principes et enjeux de l’administration publique
OUEDRAOGO Ragomézingueba Charles
Blogue: Problématique de l’exploitation minière au Burkina Faso
Le quotidien burkinabè d’information générale « l’express du Faso » dans sa parution du mercredi 6 novembre 2013 publiait dans ses colonnes, « la gouvernance de l’or au Burkina ?» un article de monsieur Firmin OUATTARA, journaliste.
L’auteur à travers son analyse nous fait prendre conscience de la problématique de la gouvernance dans le secteur des mines au Burkina avec toile de fond la transparence dans la gestion et l’équitable répartition du denier public.
Le Burkina est riche en or !
En à peine un quart de siècle, le Burkina Faso, un des pays les plus pauvres du monde, s’est transformé en sixième plus grand producteur d’or en Afrique. Selon l’institut Fraser environ, un cinquième de la surface du Burkina Faso repose sur des ceintures de roches vertes, un environnement géologique similaire à celui des pays voisins du Ghana et du Mali. Au cours des cinq dernières années, sept nouvelles mines d’or ont été mises en production au Burkina Faso. Aujourd’hui, avec ce boom minier le Burkina rivaliserait avec ses voisins notamment le Ghana et le Mali. Depuis 2009, le produit d’exportation dominant est l’or détrônant ainsi le coton qui était resté pendant longtemps le principal produit exporté. Selon les chiffres publiés par les sociétés minières la production d’or qui atteignait 5,5 tonnes en 2008, s’est élevée à 11,7 tonnes en 2009, générant des recettes d’exportation de 177 milliards de francs CFA et une contribution au PIB de l’ordre de 4 % ; contre 121 milliards de francs CFA pour le coton.
Est-ce pour autant que les Burkinabés doivent s’en réjouir ?
Le boom minier ne parvient pas à profiter au pays encore moins aux populations locales. Malgré ce potentiel, le Burkinabé lambda tire toujours le diable par la queue et le panier de la ménagère reste désespérément si léger. En quoi les populations des localités où l’or est exploité sont-elles bénéficiaires de cette manne aurifère ?
L’exemple parfait de ce que l’on appelle « la malédiction des matières premières ». .Des pays aux sous-sols riches en matières premières, ont cependant une grande partie de leur population qui vit dans l’extrême pauvreté, avec moins d’un dollar par jour. Une situation complètement paradoxale. Pour maximiser les profits, des familles entières travaillent. Les enfants abandonnent les écoles et deviennent ainsi une réserve de main d’œuvre. La fièvre de l’or ne montre pour le moment sans aucun signe de ralentissement. Mais entre richesse et espoirs, l’exploitation minière engendre des drames sociaux à risques, des conséquences écologiques désastreuses (pollution des eaux souterraines et de surface, cyanure et mercure, déforestation), des déviances graves (dépravation, travail des enfants, etc.) et ne débouchera pas sur cet essor économique tant espéré.
Du pillage des ressources minières par les compagnies étrangères.
Le gouvernement Burkinabé misant sur le secteur minier a délivré des permis d’exploration et d’exploitation ces dernières années à des compagnies australiennes, sud africaines, nord américaines… L’exploitation de l’or, jadis laissées aux orpailleurs qui se limitaient à une exploitation artisanale, est l’un des piliers de cette nouvelle politique minière. Ceci ne pas sans conséquences. L'exploitation minière à grande échelle, appelée aussi « exploitation minière industrielle exige des gros investissements, des installations fixes de grande taille et l'utilisation des procédés industriels. Toute déduction faite, à peine 13% des recettes de la production minière reviennent au Burkina. Le Burkina ne bénéficie pas suffisamment des retombées sur ses importantes ressources d’or malgré la spirale ascendante des prix de l’or ces dernières années. Une raison essentielle est à chercher dans les accords déloyaux de concession, limitant sérieusement les gains provenant de mines d'or qui restent dans les compagnies étrangères. Cela vaut particulièrement pour les taux de redevance mentionnés dans les accords.
Il faut également noter que la plupart des mines au Burkina sont majoritairement détenues par des multinationales étrangères, de sorte que c’est surtout par les recettes fiscales que le pays peut bénéficier de la production d'or. Cependant, de nombreuses sociétés minières ont négocié des exemptions fiscales qui dépassent de loin les stipulations des codes miniers concernés.
De la transparence dans la gestion des ressources minières.
Dans le rapport de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) du Burkina Faso, on constate des écarts, dont les justifications restent discutables, entre les montants des revenus des industries extractives versés par les sociétés minières à l’Etat Burkinabé et les montants exacts que l’Etat aurait reçus des sociétés minières en termes d’impôt et de taxes. Cela témoigne des insuffisances dans le suivi et de la gestion rigoureuse du secteur minier et de la non implication des populations locales aux instances décisionnelles des compagnies pour les questions qui les concernent. En attendant des mécanismes plus propres, les mines diront que les règles sont toujours respectées. Et leurs affaires prospèrent selon leur transparence à elles.
Conclusion
Si les contrats avec les sociétés minières avaient été mieux négociés, l’Etats allait pouvoir disposer de ressources plus conséquentes pour faire face à la flambé actuelle du coût de la vie, et disposer de plus de marge de manœuvre pour agir sur le niveau de ces multiples taxes qui grèvent le prix de certains biens de grande consommation (hydrocarbure, ...). Les clauses de ces contrats méritent d'être reconsidérer pour éviter le pire.Les accords miniers pour la plupart sont formalisés de telle sorte que les codes miniers ne sont pas respectés. Non seulement les violations des règles minières réduisent la part des gouvernements dans les retombées, mais encore elles peuvent conduire à une culture de transgression des lois en général, en favorisant la constitution des sociétés de non droit. Les codes miniers dans de nombreux pays ont été explicitement conçus pour protéger les intérêts des investisseurs étrangers de façon qu’ils doivent y avoir peu de raisons de les ignorer.La complexité de la gestion du secteur minier engendre des difficultés dont la résolution nécessite la mise en place d’un cadre légal adéquat favorisant une juste répartition des retombées de l’exploitation des ressources du secteur. Ainsi il sera plus simple de s’assurer que ces ressources financières soient investies dans la lutte contre l’extrême pauvreté et si l’on veut aller plus loin vers la transparence et l’équité.
O R C
Gajigo, Ousman; Mutambatsere, Emelly: Ndiaye, Guirane (2012), Gold Mining in Africa: Maximizing Economic Returns for Countries,Working Paper Series N° 147,African Development Bank, Tunis, Tunisia.
Institut Fraser du Canada (2012), « Enquête annuelle sur les sociétés minières de 2011/2012 ».
Ministère de l’Economie et des Finances (2011), revue annuelle de la Stratégie de Croissance Accélérée pour le Développement Durable, Burkina Faso.
Notes de cours ENP 7505 du « Principes et Enjeux de l’Administration Publique » du Professeur Rémy TRUDEL, session d’automne 2013.