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La faible participation électorale des jeunes au Canada, un désintérêt pour la politique?

 « Les enjeux qui intéressent les jeunes figurent bel et bien dans le discours politique, et les partis prennent position à leur sujet. Le problème est que trop souvent les jeunes ne prêtent pas l’oreille au message ». C’est ainsi que s’exprima Elizabeth Gidengil (McGill University) pour expliquer l’abstention des jeunes canadiens au processus électoral, et leur vraisemblable désintérêt de la politique. Serait-ce un dialogue de sourd ou ne sont-ils pas suffisamment sensibilisés?

S’exprimer et participer au processus électoral n’est pas sans conséquence : le fait de ne pas voter revient à donner sa voix aux autres. Les citoyens semblent ne plus croire en la politique, ne plus en voir l’intérêt. Pourquoi? Les jeunes ne sont-ils pas convaincus par les différents et nombreux partis? Par leurs programmes? Le Canada subit une crise démocratique, la confiance des électeurs en leurs représentants est de plus en plus fragile. Et les grands absents sur la scène électorale restent les jeunes, soit les 18 à 30 ans.

 

Pour rappel, le Canada est un État de droit, dans lequel les individus disposent de droits et de devoirs. Les citoyens élisent leurs représentants afin de faire fonctionner la machine étatique. Le vote, droit démocratique, est proclamé à l’article 3 de la charte canadienne des droits et des libertés.

Par le processus électoral, le représentant acquiert une certaine légitimité, celle de décider et d’agir pour la population. Avec des taux supérieurs à 50% d’abstention, comment un élu peut-il être légitime? La représentation des citoyens devient alors minoritaire, la démocratie en prend un coup. Les jeunes électeurs vont cesser de jouer leur rôle tandis que les baby-boomers, fidèles à leurs postes, demeurent les plus votants. Pourquoi? Faisons tout d’abord un état des lieux.

 

Portrait de la situation

La situation n’est pas nouvelle. Il ne faut pas oublier que les plus jeunes cohortes, comprenant les personnes âgées de 18 à 29 ans ont toujours été les plus abstentionnistes. Et ce, depuis 1965. Mais c’est notamment à partir de 2004, que les chiffres vont s’avérer inquiétants. Lors de l’élection générale fédérale de cette année là, les 18 à 24 ans détenaient un record avec une participation estimée entre 35% et 39%. (Élection Canada, rapport final, décembre 2005). Arriva ensuite l’année 2008; c’est la crise électorale au Canada. Le taux de participation n’avait jamais été aussi faible: 57,43% dont 37,4% pour la partie la plus jeune.

L’année passée, les élections générales québécoises ont laissé paraître une petite lueur d’espoir : 74,6% dont 62,1% de participation chez les 18 à 24 ans. Recrudescence d’intérêt, pur hasard ou simple « retour à la normale »? Selon le Directeur général des élections du Québec (DGEQ) et la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires de l’Université de Laval, un grand nombre de la tranche précitée s’est présenté aux urnes, laissant ainsi penser que l’année 2008 n’était qu’exceptionnelle. Cependant, une telle conclusion serait prématurée. « Il faut demeurer vigilant et continuer de se préoccuper de la participation électorale chez les plus jeunes électeurs » (M. Jacques Drouin).

 

Au niveau municipal, les jeunes sont tout autant absents. Déjà en 2009, lorsque Gérard Tremblay fut élu maire de Montréal à 37,9% des voix, le taux de participation général passait sous la barre des 40%. La pente est de plus en plus rude. Et la légitimité du représentant est dès lors discutable. Suite aux récentes élections du 3 Novembre 2013, les Montréalais ont élus Denis Coderre à 32,15% des suffrages exprimés. Cela représente 149 467 voix, sur plus d’un million d’inscrits. Seulement 43,32% ont voté.

Les origines de cette considérable abstention n’ont pas été clairement identifiées. Plusieurs facteurs interviennent. Dès lors, des mécanismes ont été mis en place pour palier la carence électorale et donner une nouvelle valeur aux droits et devoirs civiques.

 

Pourquoi?

De façon générale, certains auteurs tendent à explique le phénomène par une crise de la représentativité, selon laquelle les individus ne s’identifient plus aux candidats ou ne se retrouvent pas dans les programmes.

La division des affaires juridique et législative et la division des affaires sociales du Parlement canadien (Service d’information et de recherche parlementaires) regroupent plusieurs idées susceptibles d’éclaircir la situation. Cela pourrait être du au :

<!--[if !supportLists]-->-         Manque de connaissance politique : les jeunes ne disposent pas des outils nécessaires pour pouvoir prendre une décision éclairée lorsqu’ils sont aux urnes (Henri Milner).

<!--[if !supportLists]-->-      Manque de confiance dans le système et un désintérêt à l’égard des affaires publiques : peut-on vraiment influencer  le processus décisionnel et changer les choses en votant une fois tous les quatre années?

<!--[if !supportLists]-->-          <!--[endif]-->Méfiance et au cynisme.

<!--[if !supportLists]-->-       L’influence des médias, qui sélectionnent les informations pertinentes ou non, ce qui relate principalement l’aspect conflictuel de la politique (télévision et radio).

Mais ce désintérêt peut être également causé par des ressentis, des perceptions. Certains citoyens considèrent que les résultats sont connus d’avance ou que les programmes politiques ne visent pas la nouvelle génération. N’étant pas concernés et ne pouvant rien n’y changer, il n’y a aucune intérêt à participer à la vie politique. Parfois, ce n’est que par volonté ou négligence.

 

Au Québec, et plus particulièrement Montréal, la corruption a joué un rôle crucial dans la crise de confiance en les politiques. L’intervention de la CRAD (Commission Révélation Arrestation Démission) n’a fait qu’aggraver les choses.

 

Renverser la tendance

Il faut colmater cette brèche dans le processus démocratique. On remarque quelques tentatives à tous les niveaux.  Organiser des évènements avant ou pendant les campagnes électorales favoriserait l’attention portée sur le processus électoral.

Premièrement, nous pouvons constater la mise en place de campagnes de sensibilisation au vote. Le gouvernement, le Parlement et autres organismes essayent d’instaurer des mécanismes pour inciter les jeunes électeurs. Par exemple, « les exercices de simulation parlementaire et électorale permettent d’établir un premier contact avec le fait politique et de s’initier aux rudiments des débats parlementaires » (Marion Ménard, 2010). Comme dans les écoles, doublé aux cours d’éducation civique (obligatoires au Québec contrairement à l’Ontario).

Le site « Jeunes électeurs » fut créé pour encourager les moins de 18 ans à voter ou encore « Vote it up » a été lancé le 23 août 2012, par le Quebec Community Groups Network (QCGN), avec le soutien du (DGEQ), pour encourager les jeunes. Le forum jeunesse de l’île de Montréal joue également un rôle dans la promotion de ce droit de vote et soutien notamment les évènements ci-dessous décrits.

Un « Votecamp 2013 » a été organisé le 5 octobre dernier, dans l’objectif de favoriser une mobilisation citoyenne pour les élections municipales à venir. Cela se produisit dans trois villes : Québec, Montréal et Saguenay. L’année passée, un « Votecamp 2012 » avait été organisé pour les provinciales et a été couronné de succès. Le DGEQ soutient également ce projet. L’institut du Nouveau Monde a organisé une semaine canadienne de la démocratie 2013 qui avait lieu le 16 septembre 2013.

Mais les jeunes impliqués dans ce combat se lancent également. Les Fédérations se sentent également très concernées par ce phénomène. La Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) et la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) encouragent, par voie de communiqué, les étudiants à voter. Elles soulignent qu’il ne faut pas négliger l’importance des municipales. De même, la fédération des associations étudiantes du Campus de l’université de Montréal (FAECUM) a créé un site internet dédié aux municipales visant à augmenter la participation des jeunes.

 

 

Les causes demeurent incertaines, mais les faits sont là. Le taux de participation est en chute libre, et aucun signe d’augmentation future. Il est souvent dit que « les jeunes représentent l’avenir ». Si tel est le cas, la démocratie est en danger. D’autant plus que  « les gouvernements ont besoin d’un niveau minimal de légitimité pour pouvoir prendre des décisions qui ont une incidence majeure sur la vie des Canadiens » (Marion Ménard, 2010). Certains disent qu’il s’agit d’un « suicide politique d’une génération » (Michel Venne, directeur de l’Institut du Nouveau monde, dans un article publié par radio-canada, 3 septembre 2012) qui s’exclut elle-même du choix du gouvernement.


Campagne du DGEQ, photographie du DGEQ postée sur le website de radio-canada.ca:

Campagne du directeur général des élections du Québec.jpg


Elsa Marguet


Références

BARIL, Geneviève (2012) La diminution de la participation électorale des jeunes Québécois, une recherche exploratoire de l’Institut du Nouveau Monde,  DGEC, en ligne, http://www.electionsquebec.qc.ca/documents/pdf/DGE-6438.pdf (L’INM est la référence en matière de participation citoyenne au Québec).

BARNES, Andre (2010), La participation électorale des jeunes au Canada, 1. Tendances et bilan, En bref, Publication n°2010-19-F le 7 avril 2010, Bibliothèque du Parlement, en ligne, http://www.parl.gc.ca/Content/LOP/ResearchPublications/2010-19-f.pdf

BLAIS, André et LOEWEN, Peter (2011), Participation électorale des jeunes au Canada, Documents de travail, Université de Montréal et Université de Colombie Britannique, Janvier 2011, Élections Canada, en ligne, http://www.elections.ca/res/rec/part/youeng/youth_electoral_engagement_f.pdf

HOWE, Paul (2007), La participation des jeunes Canadiens au processus électoral, Document de travail sur la participation électorale et les pratiques de rayonnement, Élection Canada, en ligne, http://www.elections.ca/res/rec/part/paper/youth/youth_f.pdf

MENARD, Marion (2010), La participation électorale des jeunes au Canada, 2. Déterminants et interventions, En bref, Publication n°2010-21-F le 20 avril 2010, Bibliothèque du Parlement, en ligne, http://www.parl.gc.ca/content/lop/researchpublications/2010-21-f.pdf

Dir. MICHAUD, Nelson (2011), Secrets d’États? Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains, PUL, ENAP.

PAUL, Emily-Anne (2010), Pourquoi les jeunes ne votent-ils pas?, revue parlementaire canadienne, Eté 2010, en ligne, http://www.revparl.ca/33/2/33n2_10f_Paul.pdf.

TRUDEL Rémy (2013), Note de cours, ENP7505 – Principes et enjeux de l’Administration Publique.

 

Direction Générale des Élections du Québec, et ses actualités, en ligne, http://www.electionsquebec.qc.ca/francais/actualite-detail.php?id=5327

Radio-Canada.ca, et ses articles, en ligne, http://www.radio-canada.ca/sujet/elections-quebec-2012/2012/09/03/003-abstention-electorale-jeunes.shtml; http://www.radio-canada.ca/sujet/Elections-Montreal-2013/2013/10/30/001-promesses-lutte-corruption-candidats-montreal-mairie-verification.shtml & http://www.radio-canada.ca/sujet/Elections-Montreal-2013/2013/11/02/001-fecq-feuq-incitent-vote-jeune.shtml

 

Les différents programmes et campagnes pour favoriser la jeunesse de se rendre aux urnes, en ligne :

Implication de la FAECUM, en ligne, http://www.mun2013.com/#!participation-des-jeunes/cnqc

Forum jeunesse de l’île de Montréal, en ligne, http://www.fjim.org/v3/

Les jeunes électeurs, programme de sensibilisation des moins de 18 ans, en ligne, http://www.jeuneselecteurs.qc.ca/pdf/brochure.pdf

Semaine canadienne de la démocratie 2013, en ligne, http://www.inm.qc.ca/activites/scd

Vote camp 2013, en ligne, http://votecamp.ca/

Vote it up 2013, en ligne, http://www.voteitup.ca/uploads/1/3/3/0/13300387/communiqu_vote_it_up_2012.08.22.pdf

 

 

Commentaires

  • Bravo Elsa. Un phénomèue bien contemporain auquel même les USA n'échappe pas (52% ont votés à la dernière élection américaine !!!)
    On lira avec attention.

  • Vraiement des stas qui tirent l'alerte. Que faire. D'abord y réfléchir et ensuite...?????

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