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PARCE QU’ON EST EN 2015 : LA REPRÉSENTATION DES FEMMES AU CONSEIL DES MINISTRES

Travail effectué dans le cadre du cours ENP 7505 - Intra 2
Par Julie Demers

La récente nomination d’un conseil des ministres paritaire par Justin Trudeau a fait couler beaucoup d’encre. S’il existe un certain consensus à l’effet que les femmes doivent être représentées au sein du conseil privé, la parité hommes femmes fait cependant l’objet de discussions houleuses. Mérite, compétence, représentativité, discrimination, équité, sexisme ; ce débat soulève un ensemble de questions à propos des critères de sélection des ministres, mais également à propos de la représentation des femmes en politique.

De tout temps, différentes contraintes se sont imposées au premier ministre du Canada au moment de la formation de son conseil privé. La représentation régionale, l’équilibre entre les forces progressistes et conservatrices, entre les nouveaux venus et les plus expérimentés et entre les hommes et les femmes sont au nombre de ces éléments (Michaud, 2011, 178). À cela peut s’ajouter d’autres critères comme la langue, les qualités individuelles, les objectifs politiques du premier ministre et l’image qu’il souhaite projeter (Paquin, 2010, 126-7) (Tremblay et Andrews, 2010, 145). Le Premier ministre doit donc composer avec une pluralité de considérations et de sensibilités dans ce processus de sélection. Pourquoi donc le critère du genre suscite-t-il plus particulièrement des remises en question du public et des journalistes, alors qu’aucun conseil des ministres, par le passé, n’a été formé uniquement sur la base de la compétence et du mérite?

C’est sans compter que diverses études établissent qu’il n’existe pas de disparités importantes entre les profils des femmes et des hommes élus, notamment au Québec et aux États-Unis. Plus spécifiquement, l’étude menée au Québec conclut que les élus québécois, peu importe leur sexe, partagent des caractéristiques similaires – éducation, années d’expérience de travail, âge, expérience politique, implication dans les instances des partis, etc. – et donc des expertises équivalentes (Paquin, 2010). Si telle est la situation au Québec et aux États-Unis, il est sommes toutes probable que ce soit également le cas pour le Canada. Ainsi, dans l’optique où le premier ministre du Canada est contraint de choisir ses ministres parmi les députés, et non pas uniquement en fonction de leur expertise, et que ces députés ont des parcours similaires, les inquiétudes manifestées à l’égard des femmes choisies par M. Trudeau ne semblent-elles pas exagérées?

Par ailleurs, qui peut prétendre être parfaitement préparé à devenir ministre? Un fin connaisseur de son domaine d’activité peut s’avérer un mauvais communicateur. Un grand défenseur de sa circonscription peut s’avérer un piètre homme d’État. Une fine connaisseuse des processus législatifs peut s’avérer une mauvaise stratège politique. Tout député, homme ou femme, aura à apprendre un certain nombre de choses en devenant ministre. Différents talents, autres que ceux strictement professionnels, peuvent également avoir une incidence sur la performance d’un ministre. Sa sensibilité, son flair politique, sa connaissance d’une région ou d’un dossier, son réseau, ses positions passées ainsi que ses capacités communicationnelles et à bien s’entourer ne sont que quelques uns d’entre eux. Au fond, maints facteurs entrent en ligne de compte pour établir si un élu est ministrable et s’il sera ultimement compétent. Pourtant, le débat actuel sur la parité fait peu état de cette complexité, en plus d’occulter le fait que chaque ministre a à sa disposition une solide expertise qui est garantie par la fonction publique qui l’accompagne dans son mandat.

Alors que le nombre de femmes élues stagne autour de 25% à 30% aux niveaux fédéral, provincial et municipal, quelle fierté y a-t-il à transposer la sous représentation des femmes élues dans les instances exécutives (Conseil du statut de la femme, 2012) (Assemblée nationale, 2015) (Parlement du Canada, 2015)? Et pour ceux qui pensent que Justin Trudeau est allé très loin en matière d’égalité hommes femmes, il faut peut-être rappeler que le tiers des femmes nommées dans son conseil sont des ministres déléguées, alors qu’aucun homme n’occupe cette position (De Granpré, 2015). Elles sont donc subordonnées à des homologues masculins sur le plan budgétaire et administratif (Michaud, 2011, 178). Également, sitôt nommées, sitôt les médias ont relaté que certaines femmes ministres libérales gagnaient un salaire moindre que celui de leurs homologues masculins (Radio-Canada, 2015). Il a également été soulevé que les femmes avaient hérité de ministères avec des portefeuilles et des responsabilités restreintes. Au final, même si on en 2015, il semble qu’il reste du chemin à faire en matière d’égalité entre les hommes et les femmes dans la sphère politique.

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ASSEMBLÉE NATIONALE DU QUÉBEC. « La présence féminine ». En ligne. http://www.assnat.qc.ca/fr/patrimoine/femmes1.html (page consultée le 2015-12-04)

CONSEIL DU STATUT DE LA FEMME. (2012) « La sous-représentation des femmes dans les municipalités aux conseils municipaux et dans les mairies » En ligne. https://www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/la-sous-representation-des-femmes-dans-les-municipalites-aux-conseils-municipaux-et-dans-les-mairies.pdf

DE GRANDPRÉ Hugo. (2015) «Le tiers des femmes sont des ministres déléguées », [En ligne] La Presse : http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-canadienne/201511/06/01-4918012-cabinet-trudeau-le-tiers-des-femmes-sont-des-ministres-deleguees.php

MICHAUD, Nelson (dir.) (2011) Secrets d’États? Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains, Québec, Presse de l’Université Laval.

PAQUIN Magali. (2010) « Le profil sociodémographique des ministres québécois : une analyse comparée entre les sexes ». Recherches féministes, vol. 23, no1, p. 123-141.

PARLEMENT DU CANADA. Femmes - représentation politique fédérale. En ligne. http://www.parl.gc.ca/Parlinfo/compilations/parliament/womenRepresentation.aspx?Language=F&Parliament=b67c82bf-0106-42e5-9be1-46ecb5feaf60 (page consultée le 2015-12-04)

RADIO-CANADA. Le salaire de cinq femmes sera ajusté. En ligne : http://www.ledevoir.com/politique/canada/454589/le-salaire-de-cinq-femmes-ministres-sera-ajuste-assure-le-parti-liberal. (Page consultée le 2015-12-04)

TREMBLAY Manon et Sarah ANDREWS. (2010) « Les femmes nommées ministres au Canada pendant la période 1921-2007 : la loi de la disparité progressive est-elle dépassée? ». Recherches féministes, vol.23, no1, p. 143-163.

Commentaires

  • La représentation ans nos institutions démocratique est toujours un sujet d'intérêt.

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