Les Premières Nations comptent!
Le récent débat organisé par le professeur Rémy Trudel à l’ENAP en présence de Ghislain Picard chef de l’assemblée des premières nations du Québec et du Labrador puis de Michelle Audette, présidente de femmes autochtones au Canada, a permis aux étudiant(es) de se familiariser davantage à la situation des autochtones au Québec ainsi qu’au Canada.
En 2008 le premier ministre Harper proclamait : « le gouvernement du Canada est sincèrement désolé, et demande pardon aux populations autochtones de ce pays, pour avoir si profondément failli à leur égard. Nous sommes désolés » (Harper, 2008). Ces propos relèvent- ils du cynisme ou de la mauvaise volonté ? En 2013, le rapporteur spécial de l’ONU estimait que les autochtones du Canada connaissaient des « conditions de vie comparables à celles des pays les plus pauvres ». Qu’en est-il aujourd’hui ?
Les populations autochtones.
Les autochtones regroupent environ 1,4 million de personnes sur l’ensemble du territoire de la fédération canadienne, soit 4% de la population. Selon la définition donnée par le gouvernement canadien, le mot autochtone renvoie aux premiers peuples d’Amérique du Nord et leurs descendants. La loi constitutionnelle de 1982 distingue trois catégories de peuples autochtones : les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Comme le mentionna Ghislain Picard, la population autochtone du Canada a particulièrement progressé au cours des dernières années. Un rapport d’Amnistie Internationale vient confirmer cette affirmation, puisqu’après différentes études, l’ONG souligne que la proportion de ces peuples a augmenté de près de six fois le taux de croissance de la population non autochtone entre 1996 et 2006 (AI, 2012).
Une situation sociale toujours préoccupante.
Suite à notre débat à l’ENAP, nous pouvons comprendre que la situation sociale des autochtones est particulièrement difficile. Selon Michelle Audette, ces populations souffrent d’un taux de suicide élevé, d’une grave pénurie de logements en dépit de la relance des investissements en 2000. La crise du logement touche avant tout les jeunes de ces communautés dont le taux d’incarcération est le plus haut du pays. Autre point sensible, les femmes autochtones demeurent fortement exposées aux violences ainsi qu’aux disparitions. Le rapporteur général de l’ONU James Anaya a relevé que le risque pour ces femmes d’être assassinées est huit fois plus important que pour les femmes non autochtones (Anaya, 2013). Par ailleurs, il fut récemment estimé par la Gendarmerie royale du Canada qu’au moins 1200 femmes autochtones seraient mortes ou auraient disparu au cours des vingt dernières années au Canada (la croix, 2014). Ces chiffres font bien sûr écho à l’affaire Robert Pickton, auteur de 22 meurtres sur des jeunes femmes pour l’essentiel autochtones, dans la région de Vancouver. Déferlement odieux de violence, cette histoire n’est pourtant que la continuité d’une longue série de violences racistes que ces femmes subissent depuis longtemps. Ces tragédies démontrent l’échec du Canada, l’un des pays les plus développés du monde, qui semble avoir abandonné les femmes autochtones à leur sort.
Cynisme ou mauvaise volonté d’Ottawa ?
À l’occasion de la manifestation se déroulant à Montréal carré cabot, l’un des principaux protagonistes de l’évènement nous confia que les autochtones demandaient simplement des actions claires et précises au regard de leurs attentes en matière de logement, d’éducation et d’emploi. Qui plus est, les autochtones paraissent cruellement manquer de confiance envers les gouvernements qui se succèdent dans la capitale fédérale.
En témoignent, les discussions houleuses au sujet du projet de réforme de l’éducation autochtone entre le gouvernement Harper et les premières nations en début d’année 2015. Alors que certains y voient une avancée, d’autres estiment que ces dispositions ne vont faire que renforcer la main mise d’Ottawa sur l’éducation autochtone (Le devoir, 2015). Même si la question autochtone est quelque peu « la grande oubliée » des élections fédérales de 2015 selon les propos de Michelle Audette, il n’en demeure pas moins que certains candidats se laissent aller à des propositions en la matière. Ainsi, face au constat du sous-financement des systèmes d’éducation des premières nations, Justin Trudeau promet plus de trois milliards pour l’éducation autochtone (Buzzetti, 2015). Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, le gouvernement fait preuve d’insuffisance à l’égard de ces questions. Comme le souligna très bien le rapporteur général de l’ONU, « les problèmes d’aujourd’hui découlent de ceux d’hier » (Anaya, 2015).
Les autochtones canadiens et les aborigènes australiens : même combat ?
Lors de la manifestation des autochtones à Montréal, le slogan principal était : « les premières nations comptent ». Ce message renvoie également à la lutte des aborigènes australiens contre le gouvernement de Canberra qu’ils accusent de mépriser leur culture. Comme les autochtones canadiens, ces derniers souffrent d’une situation sociale difficile avec des violences liées aux consommations de drogue et d’alcool. Dans un récent rapport gouvernemental sur les inégalités entre les aborigènes et le reste de la population, il est clairement stipulé au sein d’une disposition que les autorités d’Australie-Occidentale refusent de « subventionner les choix de vie de ces communautés » (Le Monde, 2015). Voilà peut-être une explication de l’inertie des gouvernements canadiens à remédier aux problèmes rencontrés par les autochtones…
Matthieu
Commentaires
La manif sert donc...à quelque chose...