Blogue 2 Alex Brissette : Effets Commission Charbonneau
La commission Charbonneau sur l’industrie de la construction vient tout juste de se terminer. Depuis le 19 octobre 2011, elle a vu passer nombres de témoins et intervenants. Le but de cette commission était de faire la lumières sur les pratiques de gestion et d’octroi des contrats au Québec. Un but très louable pour enrayer la corruption qui semblait s’être installé dans les milieux municipaux et aussi au sein des partis politiques. Mais est-ce que ces 3 années de chasse aux sorcières s’est fait au détriment de l’économie du Québec ? Quels ont été les effets collatéraux ? Deux questions que je vais tenter de répondre.
Au Québec, pour l’octroi des contrats publics, on doit suivre certaines règles. Par exemple, pour des dépenses de 100 000$ et moins, une municipalité selon la loi des cités et villes, article 573, doit faire un appel d’offre par invitation à au moins 2 entrepreneurs ayant les compétences pour soumissionner sur les services ou biens demandés. La règle pour les montants qui déterminent si l’appel d’offre sera public ou par invitation a été établie principalement au début des années 90 avec des accords de libération des marchés (marché interprovincial et accord avec l’État de New-York principalement). Le but de ces règles est de favoriser le marché local en deçà d’un certain seuil et d’ouvrir le marché pour le reste des contrats publics. Par contre, en 1990, les contrats de moins de 100 000$ étaient beaucoup plus fréquents, vu qu’avec le temps, l’inflation a fait son œuvre. Donc en dollars d’aujourd’hui, une municipalité a-t-elle encore le potentiel d’encourager son économie local en octroyant des contrats aux entrepreneurs locaux ? De moins en moins. Un simple contrat de déneigement pourra facilement dépasser le seuil d’appel d’offre public, obligeant les municipalités à ouvrir le marché au détriment de l’économie locale. Je ne suis donc pas surpris que les élus ont été tentés de contourner les règles, malheureusement, en y tirant un avantage personnel. Les entrepreneurs locaux sont très importants pour les régions, ils fournissent des emplois de qualité et bien rémunérer aux résidents de ces villages qui leur donnent des contrats. La perte d’un contrat récurrent depuis plusieurs années à un entrepreneur local aura des effets désastreux, et ce souvent pour sauver que quelques dollars. Certes ces dollars sont ceux des citoyens, mais comment un citoyen payera sont compte de taxe en perdant son emploi ? Il existe un concept en ingénierie et dans plusieurs domaines appelé l’importance relative, ou bien en d’autres mots, la gestion du risque. La recherche d’un prix le plus bas, le jeu en vaut-il la chandelle ? À mon avis, non, la commission Charbonneau nous a clairement montré que le marché avait été truqué et les prix gonflés.
Ma solution à ce problème, augmenter les seuils d’appel d’offre, ou modifions les appels d’offre pour toujours favoriser les entrepreneurs locaux, mais jamais au détriment d’une saine gestion des finances publiques. On réduirait ainsi l’attrait pour le versement d’avantage aux élus (corruption!) de la part des entrepreneurs pour favoriser leur soumission. Ensuite, continuons avec un principe de soumissions, mais éliminons la plus basse et la plus élevée, dans le cas de la plus basse, il est légitime de se poser la question si les travaux seront convenablement rendus, par expérience, une basse soumission contient souvent des omissions et contiendra souvent des extras en cours de travaux, qui coûtent une fortune en bout de ligne. Et finalement un processus d’évaluation des soumissions, qui peut par contre être très lourd à gérer, permet une évaluation juste et équitable des soumissionnaires, mais ne nous place toujours pas à l’abri de pot-de-vin, il est facile d’évaluer à la hausse nos amis…
En gros, je pense qu’on doit faire un peu plus confiance aux élus, leur donner les moyens de gérer leur ville en favorisant l’économie locale.
En ce qui concerne les effets collatéraux de la commission, je vous en citerai quelques-uns. Premier, introduction de redditions de compte complexes et longues pour les municipalités. Afin de s’assurer qu’il n’y a pas collusion, corruption, favoritisme, chaque cenne doit être justifiée. Mais a-t-on calculé combien ça coutait pour se surveiller de la sorte ? Hypothèse : peut-être que ça coûte moins cher payer un contrat un peu plus cher que de contrôler tout pour être certain que ça coute moins cher ?
Un deuxième effet, plusieurs municipalités ont retardé des travaux. Conséquences : diminution importante des contrats de services professionnels aux ingénieurs, architectes. Les étudiants en génie ont peine à se trouver des stages. Les embauches sont gelés dans les firmes et aussi au niveau des municipalités pour ces professionnels. Peu étonnant que le bilan de l’emploi au Québec soit peu reluisant.
En conclusion, je suis impatient de voir les conclusions de la commission Charbonneau, et je tiens à mentionner que je suis totalement contre la corruption, jamais personne ne devrait avoir d’avantages en octroyant un contrat, par contre, la bonne gestion des municipalités passent par une certaine libéralisation des règles et contrôles. À la limite je dirais qu’on aurait peut-être intérêt à faire une gestion tel que des entreprises et appliquer la règle si souvent mentionnée par notre professeur : Tout est permis, sauf ce qui est interdit.
Commentaires
Alexandre... Bien reçu pour nourrir nos connaissances et mieux se former une opinion. Bonnes suites.