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Intra II - Karine Turcotte

De la discordance au NON.

Depuis les dernières années, la publication dans les journaux du taux de réussite dans les différentes écoles du Québec, vient bouleverser les valeurs fondamentales des Québécois. Les succès des écoles privées au détriment des écoles publiques sonnent la discordance sur le modèle social-démocratie de l’administration publique au Québec qui tant bien que mal, survit au mouvement individualiste du « Public Choice » Américain. En fait, la coexistence des écoles privés et des écoles publiques nous démontre clairement que plusieurs principes du modèle québécois dont la solidarité, la répartition de la richesse et la concertation sont brimés. On favorise une certaine couche de la population qui ont les moyens de se payer des services plus performants et on favorise des élèves dits « parfaits » à accéder aux meilleures pratiques d’enseignement. Du même coup, on délaisse le milieu scolaire public avec une clientèle aux problématiques diverses, où les ressources sont manquantes pour assurer à la collectivité un système d’éducation performant qui répond aux besoins diversifiés à l’image d’une société. Résultat; le système d’éducation double vitesse axé sur les besoins individuels a été créé au préjudice du projet d’éducation collectif. Malgré ce constat du milieu de l’Éducation, nous sentons que depuis les dernières années, le système de santé tant à déraper et que la société est tentée d’utiliser les services privés. La question se pose : «Est-ce que les cinq principes fondamentaux de la loi canadienne sur la santé sont désuets au point de privatiser les services? »

 

Avant de répondre à la question, tentons d’explorer les sources de motivation à prendre un tel virage. Ce désir d’aller explorer la privatisation est souvent motivé par les déboires médiatisés (fondés ou non) des contre-performances du système de la santé surtout en ce qui attrait à l’accès aux services et à la qualité des soins. Le caractère aléatoire et imprévisible des problèmes de santé individuels et collectifs amène à défier le système public et ce, malgré un investissement financier majeur de son budget global. Plusieurs composantes des dernières années ont amené leur lot de défis au système de la santé, tel que le vieillissement de la population et la désinstitutionalisation. La clientèle émergente jette aussi un regard sévère sur ce système. Cette clientèle jeune de plus en plus informée, qui a accès aux nouvelles technologies et qui ont réponse à leur besoin à vitesse « grand V » grâce aux nouveaux médiums de la communication. Cette génération est de plus en plus exigeante et s’attend à des soins de santé pour hier. Pour ceux qui peuvent se le permettre, certains se dirigent vers le privé. Toutefois, au-delà des avancées technologiques, les soins aux individus sont offerts par un groupe d’individus spécialisés. Cette donnée est non négligeable dans la complexité de notre système de santé et dans notre perception de performance.

 

Au-delà de cette motivation plus individuelle que collective, est-ce que les grands principes de la loi canadienne sur la santé priment? Afin de répondre à cette question, rappelons-nous les cinq grands principes; la gestion publique, l’intégralité, l’universalité, la transférabilité et l’accessibilité. L’ensemble de ces principes se juxtaposent sur le modèle politique de l’État Québécois où l’on prône une justice sociale, une répartition de la richesse et où l’on mentionne que l’État est considéré comme un outil de développement et un levier économique. Privatiser le système de santé est en discordance aux schèmes de penser de la société québécoise et la privatisation ne peut faire écho aux solutions. Seule une administration publique peut garantir l’accès aux services de la santé à tous ces citoyens, et cela, sans aucune discrimination. L’État québécois doit donc s’assurer et s’exercer afin qu’on ne puisse faire de corrélation entre disparités socioéconomiques et inégalités de santé des populations. Nous n’avons qu’à penser à la nouvelle loi du gouvernement Harper qui prive de tous services de santé gratuits au Canada, les nouveaux immigrants en attente d’un statut légale. Cette loi est sans contredit un voile de honte pour l’image du Canada au plan internationale et le Québec s’y rallie difficilement voir s’y oppose.

 

L’avenue de la privatisation aura sans aucun doute des conséquences négatives sur la société qui va au-delà de la santé individuelle proprement dite. En fait, les recherches scientifiques ont démontré qu’au-delà des caractéristiques individuelles des personnes, l’état de santé d’une population est un déterminent majeur sur l’environnement physique, culturel, social ou économique d’une population donnée. Nous n’avons qu’à prendre par exemple, nos voisins du Sud, soit les États-Unis d’Amérique chez qui le modèle de la privatisation prime. Au-delà du succès technologique sur le plan médical, ce système rattaché à l’idéologie libérale, place 45 millions d’Américains dans une situation précaire, sans compter le double de citoyens qui ne disposent pas de couverture d’assurance suffisante. Un exemple concret; en excluant le Mexique et la Turquie, les États-Unis sont placés au dernier rang des pays de l’OCDE en ce qui concerne le taux de mortalité infantile. Le choix me paraît évident, afin de garder une collectivité en santé dans sa définition la plus large, l’État doit poursuivre dans la même visée sous le modèle beveridgien, parfois qualifié de nationaliste, qui fait passer le droit de citoyenneté avant le droit individuel.

 

En sommes, l’administration publique québécoise devra résister à l’aspiration du « Public Choice » au profit d’une collectivité en santé. Les efforts consentis des dernières années, soit la politique des soins à domicile ou l’arrimage des services par le continuum des services 1re et 2e ligne, prouvent que le système public évolue et tente de s’adapter aux besoins de sa population. Le gouvernement ne peut toutefois ignorer le développement de la pratique privée. Son défi des prochaines années, en matière de politiques publiques, sera de définir les rôles respectifs de l’assurance publique et de l’assurance privée. Il devra faire preuve de leadership afin d’encadrer cette pratique et d’en prendre le contrôle pour éviter qu’il devienne une marionnette au profit des droits individuels et des règles du marché pour un élément vital de la collectivité, soit la santé.

Commentaires

  • Un tres bon sujet carine.

  • Un tres bon sujet carine.

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