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Lettre ouverte à Mme Marois par Lyne Couture

En débutant,  je tiens à vous féliciter pour votre élection.  Il est important pour moi de vous dire que vous pouvez être fière d’être la première femme élue comme Première Ministre du Québec. 

Moi qui suis de nature « apolitisée », j’ai eu la chance de prendre le cours de principes et enjeux de l’administration publique dans le cadre de ma maîtrise en administration publique et ce, durant la période des élections.    Ceci m’a permis de bien comprendre les stratégies et les enjeux qui doivent être déployés par les parties politiques. 

Vous entrez en poste au moment où tous les yeux sont rivés sur nos dirigeants.  Avec toutes les histoires de corruption,  vous n’aurez aucun droit à l’erreur.  Le législatif est vraiment à son apogée et vous aurez comme mission de redonner confiance à la population envers nos dirigeants.  Un des principes directeurs dans l’administration publique est que tout doit être approuvé et faire l’objet de reddition de comptes.  Êtes-vous consciente du pouvoir mais aussi des responsabilités qui vous sont confiés ?  Je veux donc ici aborder la responsabilité ministérielle qui vous oblige à devoir répondre de tout ce qui relève de vous.  Responsabilité ministérielle et solidarité ministérielle, jamais je n’aurais pensé que ces deux expressions avaient un si gros poids.  Quelle semaine vous devez avoir eu après les élections, nommer les bonnes personnes aux bons postes, essayer de ne pas décevoir afin de vous assurer de cette solidarité tout au long de votre aventure malgré le fait que les ministres n’ont d’autres choix que de se soumettre aux décisions du conseil des ministres ou bien de se démettre, un peu comme nous, les fonctionnaires, qui n’avons pas le choix d’obéir à moins que ce que l’on veut nous faire faire soit illégal. 

Aussi un autre principe que j’ai acquis est que « tout ce que l’on fait dans l’administration publique prend racine dans la constitution ».  Honte à moi d’avouer que je ne me suis pas vraiment intéressée à la constitution jusqu’à présent et pourtant j’aurais découvert et compris que les lois y prenaient racine et que nous devions lui accorder de l’importance.

Et que dire du Modèle de Westminster qui sépare l’administration de la politique ainsi que la législature de la bureaucratie.  Je n’avais jamais pensé à ceci auparavant mais qu’en serait-il si cela était autrement ?  Imaginez des congédiements massifs et de nouvelles façons de faire à chaque fois que le gouvernement changeait !!! Il est important de réaliser que notre société n’aurait jamais pu évoluer sans le Modèle de Westminster.

La politique oui, mais il y a une femme derrière tout cela.  Après 72 ans du droit de vote aux femmes, votre élection m’a permis de découvrir la politicienne mais également la femme derrière celle-ci.  J’ai été émue entre autre par le fait que vous ayez interrompu une rencontre alors que vous étiez ministre de la Main d’œuvre pour donner naissance à un de vos fils, étant moi-même mère, je comprends toute la dévotion derrière ce geste et de la dualité entre la carrière et la vie familiale.   

Vous avez beaucoup fait parler avec vos rénovations et votre train de vie mais j’ai appris que vous croyez aux principes de l’accessibilité de l’État Providence et j’ai été surprise d’apprendre que vos fils étaient allés à l’école publique, ce qui pour moi est cohérent avec le fait que vous défendiez l’administration publique. 

Quel expérience vous avez, les ministères n’ont pas beaucoup de secrets pour vous, vous qui avez été Ministre de la Condition féminine, de la Main d’œuvre et Sécurité du revenu, de l’Administration et fonction publique, des finances, du Revenu, de l’Éducation, de la Santé et des services sociaux, de Recherche, Science et Technologie, de l’Industrie et Commerce, du Conseil du trésor et de la famille.  Et comme si cela n’était pas assez vous avez été Vice-première ministre et chef de l’opposition officielle, quel parcours politique ….    

Vous avez également à votre actif les réalisations suivantes : 

  • Aboli les commissions scolaires confessionnelles pour les remplacer par les commissions scolaires linguistiques
  • Diminuer de moitié le nombre de commissions scolaires au Québec
  • Implanter le nouveau régime pédagogique (la réforme)
  • Implanter les services de garde en milieu scolaire
  • Instituer la maternelle à cinq ans pour tous
  • Introduit le congé parental dans les conventions syndicales des employés des secteurs publics et parapublics

Si vous avez mis tout ceci en place c’est que vous avez une facilité à prendre en compte l’émergence des besoins. 

J’ai donc pour la première fois de ma vie assimilée un peu plus les fondements de cette administration si complexe. Vous qui naviguez dans ce domaine, je n’ai pas besoin de vous convaincre sur la complexité de l’administration publique. 

A l’heure actuelle, vous vous êtes rendu compte que vous aviez fait des promesses sans avoir complètement l’image des finances du Québec et vous devrez prendre des décisions difficiles afin de ne pas augmenter la dette.  Nous avons assisté au premier budget de votre ère et je dois dire que je suis restée sur mon appétit mais ce n’est pas facile de débuter avec déjà plusieurs milliards de dollars de déficit. 

Il sera important de bien prioriser vos actions car un point émis par notre professeur, Rémy Trudel, disait qu’à vouloir s’occuper de tout, l’État… n’arrive pas à s’occuper de quoi que ce soit » et je suis d’accord avec cette affirmation.  De plus en plus dans la population, nous entendons des commentaires concernant l’Etat Providence et le désir de la population de réduire mais cela est vrai quand les décisions prises ne touchent pas directement leurs besoins ou leur finance.    Bien sûr vous prendrez des décisions qui feront plaisir et d’autres qui déplairont mais surtout n’oubliez pas de consulter la population car dans notre état de droit,  la meilleure façon d’échouer est de prendre des décisions sans se soucier des intérêts ou de l’opinion de vos citoyens.

Saurez-vous teinter notre politique d’un côté artistique.  À mon avis, le côté science de l’administration publique est plus facile mais le côté artistique nécessite de sortir du cadre, de faire autrement, ce qui n’est pas toujours évident.  

Les médias, les autres parties, et la population ne seront pas toujours tendres envers vous … Pendant des années, le peuple québécois fut effacé mais on sent que cela change.  En raison de l’accès à l’information et de la présence des médias, les groupes de pression et d’intérêt ont de plus en plus de pouvoir, surtout ne le négligez pas. 

Étant moi-même gestionnaire au CHUM bien sûr je suis préoccupée par notre système de santé.   Je suis consciente que nous devons de plus en plus apprendre à gérer par résultats mais croyez bien que je m’attendrai moi aussi à des résultats de votre part.    Surtout, gardez l’orientation sur les principes fondamentaux soit la gestion publique, l’intégralité, l’universalité, la transférabilité ainsi que l’accessibilité.   Même si notre système n’est pas parfait, je crois que nous sommes privilégiés d’avoir un système semblable et celui-ci fait l’envie de plusieurs autres pays. 

Je suis fière de ne pas avoir grandi dans une province ou un pays où le « public choice » serait la façon de faire.   C'est-à-dire que l’individu est responsable de son bien-être ou de son malheur.  Je ne voudrais pas avoir à vivre dans un monde aussi individualiste.   Je suis privilégiée d’être dans le modèle québécois qui privilégie la solidarité, la concertation, un état entrepreneur et que dire de son côté défenseur de sa francophonie.   

Si j’ai un regret c’est d’avoir perdu tout ce temps avant de m’intéresser à ce monde si intéressant, moi qui travaille dans l’administration publique, donc je vous suivrai du regard en apprenant de plus en plus et en vous surveillant aussi un peu car vous savez ce que notre ère fait que nous sommes informés en temps réel et avec les avantages et les inconvénients que cela imposent.  


 

Quelques références

 Édition souvenir Châtelaine, 4 septembre 2012

 Notes de cours : Principes et enjeux de l’administration publique, Rémi Trudel

 MICHAUD, Nelson (dir) et coll. (2011).  Secret d’Etats

 

Commentaires

  • Lynne j'ai lu ta lettre avec beaucoup t'attention, tu as vraiment toucher toute les aspects de l'administration publique. tu as meme toucher un des principes du cour que le prof Trudel nous rappele a chaque seance qui est effectivement un des principes directeurs dans l’administration publique, tout doit être approuvé et tout doit faire l’objet de reddition de comptes.

  • Lynne j'ai lu ta lettre avec beaucoup d'attention, tu as vraiment toucher toute les aspects de l'administration publique. tu as meme toucher un des principes du cour que le prof Trudel nous rappele a chaque seance qui est effectivement un des principes directeurs dans l’administration publique, tout doit être approuvé et tout doit faire l’objet de reddition de comptes.

  • Félicitation Lyne pour ce grand résumé du cour à travers le quel tu rends un grand honneur à notre toute première première ministre et ancienne ministre si fortement expérimentée. Je ne le savait pas!

    Bon, le côté artistique elle n'aura pas le choix d'aller le chercher. En fait, faire des promesses que l'on n'est pas très sure de réaliser quitte à prendre du recul sous prétexte d'avoir écouté l'opinion publique c'est artistique! Elle me semble assez apte en toutes circonstance, elle à l'air d'une grande intervenante sociale (acquis pour une socio démocratie) maitrisant parfaitement l'interface entre l'administration et les administrées naturellement revendicateurs.

    Les gens ont aussi la phobie de la mondialisation, ce qui ne fait pas forcement ses affaires; ne lui facilite pas certaines avancés trop gauchistes, trop providentialismes. Dieu merci certains députés de l'opposition doivent penser, à mon avis, à leur pointage avant de songer de renverser son gouvernement, c'est le bon moment pour étaler sans forcement imposer. Surtout les députés de l'opposition doivent bien miroiter leur base de sondage pour s'engager dans un tel risque. Le revers leur serait frontal (pertes financières et même de crédibilité qui pourrait s'étendre au discrédit de leur parti).
    Le peuple aussi n'ignore pas ses valeurs et face aux médiats et aux différents groupes de pression elle n’oublie pas qu'elle doit forcement obtenir des résultats malgré son gouvernement minoritaire. Il lui faut un tact de nature artistique!

    Ses nombreux reculs sur des choix sensibles, ces derniers jours, démontrent qu'elle est parfaitement sage et conséquente, quitte à se faire traité d’hésitante. Ne perdons pas de vue que la partie électorale n'était pas gagnée d'avance et les autres (PLQ, CAQ) doivent dire quelque chose pour prouver leur attention, contenter leurs électeurs et capter quelques mécontents des extrémités du PQ!

    Merci pour tes éclairages une fois de plus.

    Simon P

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