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#1-Dave Sévigny-: L'âge de la retraite: lorsque les principes et les enjeux s'entrechoquent! Par Dave Sévigny

L'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral de Jean Lesage en juin 1960 marque le début de la Révolution tranquille et du développement de l'État-providence au Québec. Le Gouvernement Lesage offre de plus en plus de services à la population. C'est à cette époque que naît le réseau universitaire québécois, Hydro-Québec, la Société Générale de placement et la Régie des Rentes du Québec.  

Le 30 janvier 1967, M. Rogers-H. Taschereau, de Québec, recevait le premier chèque de la Régie des rentes du Québec. Personne ne se doutait à ce moment que 45 ans plus tard, l'âge de la retraite serait au cœur d'un débat de société où des principes fondamentaux ainsi que des enjeux politiques et économiques s'affrontent. Nul doute que la période des années de l'État-providence (de 1960 au début des années 80) avec ses choix politiques fait en sorte qu'aujourd'hui le gouvernement se trouve face à une situation économique précaire. D'autant plus que les dépenses de l'état ne cessent d'augmenter, et ce, plus rapidement que le PIB (produit intérieur brut) confirmant la loi de Wagner d'un état de droit.

Les prévisions effectuées dans les années 60 des régimes de retraite ne sont pas au rendez-vous. En effet, plusieurs facteurs expliquent ce constat. Parmi ceux-ci:

Ø  L'augmentation de l'espérance de vie des hommes et des femmes du Québec ne cesse de croître. L'espérance de vie chez les hommes est de 79,6 ans alors qu'elle est de 83,6 ans chez les femmes;

Ø  Le contexte économique des dernières années agit négativement sur les caisses de retraite;

Ø  La population active est de plus en plus vieillissante.

Devant ce phénomène, les deux paliers de gouvernement ont annoncé des  mesures pour éviter la fonte des fonds du régime de Sécurité de la vieillesse et de la Régie des rentes. Au provincial, l'ex-ministre des finances Raymond Bachand a annoncé qu'à compter du 1er janvier 2013, les rentes prises après 65 ans seront bonifiées de 0,2% passant 0,5% à 0,7% et ce, jusqu'à l'âge de 70 ans. Du même souffle, il annonçait que la pénalité passera de 0,5% à 0,6% pour chaque mois compris entre le début du paiement de la rente du RRQ et le 65e anniversaire et ce, à compter du 1er janvier 2014. Sur une période de cinq ans, cela représente une diminution de rente de 30% si la retraite est prise à 60 ans. Le Gouvernement Harper quant à lui a annoncé que les Canadiens pourront reporter volontairement leur demande de prestation de Sécurité de vieillesse, et ce, à partir du 1er juillet 2013. Ainsi, les Canadiens auront l'occasion de bonifier leur pension de 7,2%. De plus, ce même gouvernement a annoncé que l'âge de la retraite passera graduellement de 65 à 67 ans entre 2023 et 2029.  Deux gouvernements, deux stratégies. Dans un premier temps les deux gouvernements optent pour une stratégie incitative en permettant au travailleur d’accroître leur prestation et en prolongeant leur nombre d’années actives sur le marché du travail. Jugeant cette mesure insuffisante, le Gouvernement Harper en augmentant l’âge de la retraite de 65 à 67 ans utilise une stratégie plus régressive de par son imposition.      

Ces annonces n'ont pourtant pas suscité de grand mouvement de contestation. Pourtant, celles-ci touchent l'ensemble de la population (régime de Sécurité de vieillesse) et des travailleurs (Régie des Rentes du Québec). Ne sont-elles pas aussi importantes que l'annonce de l'augmentation des frais de scolarité? Il est clair que ces mesures affecteront l'ensemble de la population de moins de 54 ans quant à leur départ à la retraite. Une majeure partie des baby-boomers esquiveront l'augmentation de l'âge de la retraite bénéficiant encore une fois des largesses de l'État-providence. Il faut dire que la crise étudiante du printemps 2012, a occupé une place omniprésente dans l'actualité. Ce qui a sûrement porté ombrage aux impacts futurs de ces mesures en lien avec l'âge de la retraite. Une autre théorie peut expliquer cette faible opposition : la prise de conscience de la population de l'obligation de prendre de telles mesures afin d'assurer le maintien de ces régimes. Cette conscientisation agit comme un levier de pression sociale obligeant les gouvernements en place à prendre des décisions. Un exemple de cette conscientisation est l'entente de travail survenue, le 20 octobre dernier, entre les cols bleus de la ville de Montréal et la Ville. À l'origine, le syndicat et la Ville se sont rencontrés pour discuter des avenues possibles afin de combler le déficit du régime de retraite des cols bleus. Résultat, en plus d'avoir trouvé une solution aux problèmes de la caisse de retraite (augmentation de la participation de 2,7% des cols bleus) les cols bleus et la Ville en sont venus à une entente sur une nouvelle convention collective et ce, même avant la fin de la présente convention collective de travail. Du jamais vu chez les cols bleus. Assistons-nous à un renouveau des relations de travail en ces temps où l'administration publique (surtout au municipal) est souvent critiquée pour ses largesses envers ses employés?

Nonobstant ces faits, les acteurs politiques ne sont pas au bout de leur peine pour la mise en place de ces mesures. Qu'adviendra-t-il de la  Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles? Cette loi est régressive quant aux allocations de revenu après l'âge de 65 ans. Devront-ils revoir cette loi pour l'harmoniser avec le nouvel âge de la retraite à 67 ans? On peut se poser la même question en ce qui concerne les régimes d'assurances maladie ainsi que de l'assurance médicament. L'âge de cotisation à l'assurance médicament universelle passera-telle à 67 ans? Qu’en sera-t-il des travailleurs à régime à prestation limitant ses prestations à l’âge de 65 ans? Basculeront-ils dans un régime à cotisation pour une période de deux ans? D'autre part, plusieurs régimes de retraite offrent un pont (bridge) pouvant atteindre 0,5%, jusqu'à l'atteinte de l'âge de 65 ans. Ce pont sera-t-il reporté jusqu'à l'âge de 67 ans. Si la réponse est oui à toutes ces questions, quels impacts auront ces nouveaux déboursés sur la situation des caisses de retraite, des régimes privés d'assurance et sur l'assurance médicament universelle? Voilà quelques questions pertinentes auxquelles les différents acteurs  politiques, patronaux et syndicaux devront trouver des solutions.

Il est évident qu'au cœur de ces débats, les gouvernements devront s’assurer de la pérennité des régimes de retraite privés et publics. Il est certain que des principes de tout ordre s'entrechoqueront avec les enjeux politiques et économiques. Comme nous vivons dans un état de droit sous le modèle de Westminster, les deux paliers de gouvernement devront garder en tête qu’ils ont l’obligation de reddition de comptes lors de leur prise de décision. D’autant plus que dans un état de droit de modèle de Westminster, c’est le peuple qui décide. Vive la démocratie!

 

 

Références

http://www.lesaffaires.com/secteurs-d-activite/gouvernement/retraite-a-65-ans-moins-allechante/528598

http://www.rrq.gouv.qc.ca/fr/programmes/regime_rentes/rente_retraite/Pages/montant_rr.aspx

http://affaires.lapresse.ca/dossiers/budget-ottawa-2012/201203/30/01-4510823-ottawa-repousse-la-retraite-a-67-ans.php

http://argent.canoe.ca/lca/affaires/canada/archives/2011/03/20110322-163132.html#texte

http://www.journaldemontreal.com/2012/10/20/les-cols-bleus-de-montreal-disent-oui-a-954-

 

Commentaires

  • Une sujet de fond pour une administration publique. Vivement la lecture ...d'un expert !
    Prof

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