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#2-V Bélanger :LE PLAN NORD : À FOND DE TRAIN! - Vincent Bélanger

 

LE PLAN NORD : À FOND DE TRAIN!

 

Le développement du Grand nord présente plusieurs défis administratifs pour le gouvernement du Québec notamment en ce qui a trait aux infrastructures de transport pour les effectifs et les ressources naturelles exploitées.  L’annonce du prolongement de la route 167 de 240 km en provenance de Chibougameau vers les monts Otish au coût de 331,6 millions (originalement 280 millions) est une perspective annoncée qui contribuera au développement de l’industrie minière (44 millions de ce coût étant assuré par la compagnie d’exploitation de diamants Stornoway diamond corporation selon certaines conditions).  Mais est-ce la bonne??

 

Dans un autre ordre d’idées, le ministre des finances a annoncé en Mars dernier l’investissement de cinq milliards pour la création d’un nouveau chemin de fer parcourant 800 km entre la fosse du Labrador et le port minéralier de Sept-Îles.  Le projet créerait 1000 emplois permanents pour l'exploitation de la ligne dès 2017.

 

Plusieurs autres projets font l’objet d’études sur les avantages et les inconvénients d’une voie routière par rapport à une voie ferroviaire et ce à la demande même des partisans de l'élargissement du réseau du rail vers le Québec septentrional.  Le train est beaucoup moins polluant et possède des atouts certains pour le transport du minerai, étape indispensable à l’exploitation des gisements nordiques.  De plus, il permettrait un décloisonnement des populations vivant au Nord de la province et faciliterait leur développement.

 

Voici quelques exemples faisant état de la situation du transport ferroviaire dans le nord du Québec et de son expansion.

 

 

CHIBOUGAMEAU ET LE NORD DU LAC-ST-JEAN

 

Une partie de la route 167, qui sera prolongée vers les monts Otish, est déjà doublée d’une voie ferrée pour la portion allant de St-Félicien à Chibougameau mais celle-ci présente, selon la ville de Chibougameau et son organisme de développement, plusieurs lacunes importantes.  On y mentionne l'état lamentable du rail, des wagons et du service dans le tronçon Triquet-Faribault.  Le directeur de Développement Chibougameau rappelle l’effervescence de l’exploration minière dans la région et craint l’abandon des liens ferroviaires les moins rentables au profit d’une rationalisation par le Canadien National.  Le maire de St-Félicien ainsi que le député bloquiste de la région déplorent aussi le manque d’investissement du CN pour ce tronçon et souligne l’importance stratégique du maintien de ce chemin de fer pour la région du Lac-St-Jean (d’autant plus que certains trajets ont déjà été abandonné dont l’axe Chapais / Lebel-sur-Quévillon).  Le problème, entre autres, est l’extrême lenteur du train (maximum de 40 km/h) attribué au mauvais état du rail.  Une livraison vers Toronto par exemple prend une semaine alors qu’en camion cela prend 24 heures.  Le CN assure qu’il y aura plus d’investissements s’il y a augmentation des volumes et les compagnies minières (dont Chantier Chibougameau) assure qu’il y aura plus de volumes si l’amélioration du service est considérable (la compagnie qui expédie présentement un quart de sa production par train se dit très soucieuse de faire davantage pour améliorer son bilan environnemental).

 

 

Donc la situation est la suivante:  le CN pourrait abandonner plusieurs tronçons de rail non-rentables et qui devront éventuellement être maintenus par des investissements locaux et par le gouvernement du Québec afin d’assurer la survie de plusieurs entreprises qui dépendent de cette voie ferrée.  La reprise de ces tronçons avec l'aide de subventions provinciales, municipales et possiblement quelques actionnaires pourraient donc contribuer à améliorer le service de chemin de fer afin d’éviter d’utiliser le camionnage, à grands frais de transport et d'entretien de routes, et ce, sans compter les dommages et dégâts causés à l'environnement.  Mais en définitive, il n’y aura pas d’expansion du réseau ferroviaire puisque c’est la route (projet de route 167) qui fut ici retenue comme la meilleure des solutions.

 

 

SCHEFFERVILLE ET LA CÔTE-NORD

 

 

Le 29 Juin 2011 marqua historiquement la région de la côte-Nord puisqu’un train chargé de minerai de fer en provenance de Schefferville prit son départ vers Sept-îles pour la première fois depuis 1982, année où la compagnie minière IOC cessa ses activités d’exploitation de son gisement.  Le train n’avait pas cessé complètement de fonctionner puisqu’il transportait marchandises et passagers, assurant ainsi l’approvisionnement des communautés isolées- le chemin de fer étant passé en 2005 aux mains d’une compagnie ferroviaire autochtone (Transport ferroviaire Tshiuetin ou TFT).  La ligne Québec North Shore & Labrador (QNSL) a donc repris du service mais l’arrivée récente de plus en plus de compagnies minières intéressées par ces gisements de fer et surtout l’intérêt de celles-ci à la création d’un nouveau tracé vers le port minéralier de Pointe-Noire à Sept-Îles, a pressé le gouvernement à agir.

 

 

C’est lors de la remise de son troisième budget annuel le 20 Mars dernier, que le ministre des finances Raymond Bachand a indiqué son appui à la caisse de dépôt et placement du Québec ainsi qu’au Canadien National pour la construction d’une ligne de chemin de fer entre la ville de Sept-îles et les chantiers miniers de la fosse du Labrador.  Ce projet de cinq milliards (détenu au tiers par la CDPQ et au reste par le CN) suscite par contre bien des mécontentements et notamment de la part des entreprises qui développent de nouveaux projets d'exploitation du fer dans la Fosse.  Elles voudraient plutôt construire elles-mêmes un nouveau chemin de fer à usage commun, en partenariat avec les autochtones de la région. Elles ne veulent surtout pas qu'une compagnie de transport par rail s'en occupe et craignent que le CN et la Caisse ne leur chargent trop cher pour expédier leur production.  Chose certaine, le gouvernement n’acceptera pas la mise en chantier de deux lignes ferroviaires et les minières devront se résoudre à utiliser celle qui sera construite, c’est-à-dire celle du CN et de la caisse, ou la leur.  Des accords entre les partis sont toujours à venir.

 

 

Le porte-parole du Parti Québécois en matière de finances publiques Nicolas Marceau croit que la participation de la caisse de dépôt au projet dépasse largement son mandat, mais dans une perspective de développement durable, je crois qu’il est primordial que Québec investisse dans les infrastructures du Nord et qu’à long terme, c’est la force d’un réseau de transport fiable et efficace qui permettra l’épanouissement et la pérennité du potentiel économique du Grand Nord.

 

 

ENCORE PLUS AU NORD

 

 

Le Gouvernement a aussi investit en 2011 près de 60 millions afin d’étudier les différents scénarios pour relier Kuujjuaq, au Nunavut, à la Transtaïga, une route qui va de la baie James au sud du Québec.  La possibilité d’un lien ferroviaire était ici sérieusement envisagé de même que sur la liaison de 250 kilomètres à établir entre Radisson, au coeur du complexe hydroélectrique La Grande, et Whapmagoostui-Kuujjuarapik, un village sur les rives de la baie d'Hudson.  En Décembre dernier, le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un premier document portant sur le projet de construire quelque 600 kilomètres de rail de Schefferville à Kuujjuaq, sur la baie d'Ungava.  Dans toutes ces études, la conclusion est la même: sans l’apport de l’industrie minière, ces projets ne sont pas viables.  Car malgré le bénéfice assuré d’un lien terrestre pour les communautés du Nord, qui verraient ainsi le coût de leur ravitaillement diminuer, c’est l’or, l’uranium, le nickel, le diamant et surtout le fer qui permettraient la rentabilité de cette expansion ferroviaire.

 

 

Par contre, les obstacles à surmonter sont nombreux et celui qui arrive en tête de liste est sans surprise l’argent nécessaire à l’élaboration de ce réseau.  En effet, malgré l’investissement de départ de plusieurs milliards de dollars, ce sont plusieurs millions chaque année qu’il en coûterait seulement pour entretenir la voie ferrée selon la firme Genivar chargée de l’étude du projet.  De plus, la centaine de kilomètres que le chemin de fer devrait parcourir sur le pergélisol, bien que ne représentant aucune difficulté majeure, augmenterait du tiers le coût de construction par kilomètre.  Enfin, l’incertitude concernant l’aménagement d’un port en eaux profondes à proximité de Kuujjuaq est aussi déterminante pour la réalisation d’une voie ferrée (car le transport des minerais vers ce port plutôt que vers Sept-Îles pourrait réduire de plusieurs kilomètres la distance à parcourir mais sans le port, pas besoin de train).

 

 

CONCLUSION

 

 

L’ouverture du Grand Nord et le développement de plusieurs régions jusqu’ici isolées se fera donc en relation constante avec l’intérêt et le potentiel économique des ressources naturelles se trouvant à proximité.  Dans tous les cas, on constate les enjeux et les principes inhérents qui motivent le gouvernement à opter pour un développement routier plutôt que pour un développement ferroviaire.  Le partenariat public / privé semble être dans ce contexte une avenue toute désignée pour l’expansion du réseau puisque celui-ci bénéficiera en grande partie à des transporteurs privés.  Cependant, je me pose néanmoins une question, peut-être naïve, mais en lien avec l’implication d’Hydro-Québec dans l’élaboration de ces chantiers, puisqu’elle a elle-même besoin d’infrastructure pour le transport :  Pourquoi n’y a-t-il pas de transport électrique au Nord,et même au Sud, du Québec???  Puisque tout est à faire au Nord, pourquoi ne pas explorer de nouvelles technologies plus propres???

 

En effet, la société d’état fait littéralement partie du décor dans le nord, et puisqu’elle doit transporter son électricité vers le sud, et qu’elle doit d’ailleurs elle-même acheminer équipements et ressources humaines dans les différents complexes, n’y a-t-il pas moyen d’attacher à ses lignes un train à traction électrique à grande vitesse, capable de transporter des charges énormes??? (il est à noter ici qu’il existe sur certains tronçons se situant entre le chantier d’extraction principal et les concasseurs, un modèle de chemin de fer électrique, tout automatique et sans conducteur détenu entre autre par la compagnie minière IOC).  Le développement intelligent demande planification et prévision mais aussi une bonne dose d’innovation pour pouvoir affirmer sa valeur et sa nécessité pour la suite des choses.  Nous sommes ici dans l’ART de la gestion et du développement pour l’épanouissement d’un peuple.

 

Quoiqu’il en soit, le train traditionnel représente un avantage certain bien que plus coûteux.  Il est moins polluant, possède une capacité de chargement énorme et est moins sujet aux caprices météorologiques qu’il rencontrera sur son chemin.  De plus, bien que nécessitant beaucoup d’entretien, les rails offrent une durée de vie nettement supérieure aux routes.  Il ne manque qu’un peu de modernité et d’innovation et …

 

All aboard!!

 

Going north!!

 

 

 

Vincent Bélanger

 

Commentaires

  • Bien reçu Vincent. Au banc des corrections déjà!

  • Moi aussi je crois que le Gouvernement du Québec, qui n'arrête pas de se prétendre une vertu verte, devrait envisager sérieusement l'électrification de ce nouveau chemin de fer. Ca se fait dans le nord de la Suède où la Société Minière LKAB opère un chemin de fer électrifié de 400 km dans des conditions climatiques très similaires au Nord du Québec. Et en plus c'est Bombardier qui fournit les locomotives électriques à cette compagnie. Je vois pas pourquoi on en ferait pas autant.

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