Le pouvoir dans nos organisations
Le pouvoir dans nos institutions publiques
Avec tous les scandales politiques et publics qui prennent place dans les médias, il serait pertinent d’évaluer la place du pouvoir dans nos institutions publiques. Est-ce que la distribution et le contrôle du pouvoir sont correctement établis dans nos organisations? J’espère recevoir vos commentaires pour mieux comprendre, et constater l’impact du pouvoir dans votre environnement professionnel.
Le pouvoir dans les organisations suscite de grands questionnements. Les plus grands penseurs de la gestion en font mention et, même, publient des ouvrages complets sur le sujet; Henry Mintzberg en est un exemple. Les organisations évoluent avec le pouvoir des gestionnaires, leur autonomie permet plus de créativité et apporte une évolution certaine par des innovations utiles. Par contre, il peut y avoir un effet inverse, lorsqu’un gestionnaire abuse de son pouvoir et s’attaque à l’essence même de l’organisation, c’est-à-dire, à sa productivité en freinant la créativité des employés. Il faut l’admettre, l’efficacité de l’administration publique est très liée au pouvoir et, malheureusement, ce pouvoir est souvent mal utilisé.
Le manque de productivité des organisations est provoqué par plusieurs facteurs et la mauvaise gestion par l’abus de pouvoir en est une. Souvent les fonctionnaires sont visés par l’opinion publique pour leur rendement et, dans la réalité, ce manque de rendement est souvent causé par le gestionnaire qui croit tout connaître et l’impose à l’ensemble de ses employés. Le pouvoir accordé à certains gestionnaires est contre-productif. Il est difficile pour certaines personnes de faire la différence entre assumer ses responsabilités face à son rôle de gestionnaire et gérer avec émotion appuyé par les croyances populaires. Combien de fois dans mon entourage j’entends dire « il va me le payer », « ils vont manger dans ma main » ou « ils sont incompétents ». Devant ce genre de commentaires, nous ne pouvons croire que ce gestionnaire agit avec maturité et qu’il encourage le développement. Il démontre qu’il agit et gère avec émotion et se permet ce genre de commentaire à cause de son pouvoir. Je pose la question suivante « Agirait-il pareil s’il était l’employé visé? ».
Arrêtons de penser que la base d’une hiérarchie représente à elle seule le problème. Analysons la distribution du pouvoir et assurons-nous du contrôle de celle-ci avec les conséquences qui viennent. Protéger les gestionnaires amis est aussi très néfaste et représente encore une fois un abus de pouvoir. « Le besoin de pouvoir des membres de l’organisation conduit les organisations à avoir des structures excessivement centralisées »1.
« Le pouvoir est toujours lié aux liens interpersonnels et le besoin de coopération qui existe entre les individus. Souvent critiqué, le pouvoir est toujours recherché. Délégué ou imposé, le pouvoir se heurte souvent à la notion de liberté à laquelle il est lié »2. Cette définition du pouvoir représente les enjeux de celui-ci, tout d’abord recherché, ensuite délégué ou imposé.
Dans le cas ou le pouvoir est délégué, nous assisterons à la mobilisation des acteurs ce qui amènera une croissance et une productivité accrue. Dans le cas ou le pouvoir est imposé, la productivité et la mobilisation devraient s’amenuiser. Il est important de réaliser l’impact du pouvoir sur l’individu et l’organisation avant de le distribuer.
L’environnement dans lequel un cadre évolue dans nos organisations publiques permet de croire qu’il y a un problème; le cadre est le supérieur sans en être un car il est d’abord le représentant du citoyen. Dans cette mesure, il risque d’avoir des comportements inappropriés et le manque de liberté peut créer des abus de pouvoir. Peu importe le niveau du cadre, il utilisera le pouvoir qui lui est accordé.
La particularité des organisations publiques réside dans l’impact du politique sur l’administratif. Souvent ceux qui ont le plus de pouvoir dans une organisation publique auront été mis en place par les élus ou bien les nominations auront été influencées par ceux-ci. Cette démarche enlève une certaine latitude à ceux qui auront été mis en place et a un impact sur les gestionnaires en place.
La structure des organisations sera influencée par les choix des gens au pouvoir. Dans mon organisation, le pouvoir a été centralisé, selon les gestionnaires en place, cette modification de structure a été très néfaste pour le service aux citoyens. Nous offrons un service de proximité et qui de mieux placés que les gestionnaires de premier niveau pour évaluer les besoins. Dans un service comme le mien, nous aurions avantage à décentraliser le processus de décision et laisser l’autonomie à l’équipe de gestion de chacune des régions. Dans cette démonstration, nous observons certainement un abus de pouvoir, malgré les consultations et les revendications des gens en place, le membre de la direction qui avait à lui seul le pouvoir à fait fi des cadres et a procédé au changement de structure en centralisant la prise de décision. Tous abondent dans le même sens, cette structure permet un contrôle total de ce membre de la direction en ayant la main mise sur tous les dossiers et la prise de décision. Avec certitude, le citoyen en paie le prix, le service est tributaire d’un individu. Est-ce qu’un seul individu peut gérer 2 300 des milliers d’employés. Un mentor m’a dit un jour, « un homme ne peut gérer seul une organisation, mais un seul homme peut la détruire ». Cette phrase démontre l’importance du pouvoir et de sa distribution.
Deux autres exemples dans notre société québécoise : le réseau de la santé et notre système d’éducation, deux merveilles du modèle québécois. Inutile de vous décrire les guerres de pouvoir intestines dans les organisations citées.
J’ai soulevé dans mon exemple la notion de centralisation et de décentralisation dans les organisations. Cette dimension dans les organisations publiques est très importante car il ne peut y avoir une application générale. Une analyse des besoins et des services rendus doivent être faite avant de choisir celle qui corresponde le mieux à la situation. Je souligne cette dimension d’importance car elle est tributaire de ceux qui ont le pouvoir et le choix de ceux-ci déterminera l’efficacité du service. Encore une fois un pouvoir libertin peut devenir néfaste…
Je fais régulièrement mention de l’impact sur le service aux citoyens mais il ne faut pas négliger l’impact sur les deniers publics. Si nous avions une gestion efficace des ressources, qui sont essentielles pour maintenir le régime québécois, nous pourrions diminuer le fardeau fiscal des québécois. La solution la plus simple, remplacer un fonctionnaire lorsqu’il y a deux départ à la retraite, simple comme un + un.
Le courage demeure dans la saine gestion et la productivité. Cette productivité découle généralement de l’efficacité des cadres ou des gestionnaires. Encore une fois mon expérience me dit que le pouvoir de tous les paliers décisionnels influence grandement la productivité et l’innovation. Jusqu’à quel point le denier public est-il une priorité dans la gestion de chacun?
M. Parizeau dans son livre « La souveraineté du Québec : hier, aujourd’hui et demain »3 soulève qu’il est important pour l’état québécois d’améliorer la productivité et l’innovation. En lisant ce livre, je réalise que le succès passe par l’éducation. Cette éducation pourrait avoir comme impact de changer les mœurs et d’améliorer le niveau de gestion dans nos organisations car les enjeux seront mieux identifiés et le pouvoir mieux apprivoisé. L’éducation permet à l’homme d’évoluer.
Facile de critiquer - lorsque nous apportons une critique, nous avons le devoir de l’appuyer par une ou des solutions. Dans le cas qui nous concerne, les solutions peuvent être nombreuses. La première est de s’assurer d’attribuer un pouvoir qui peut être contrôlé. Ce contrôle peut être fait de plusieurs manières, il peut être horizontal tel une équipe de gestion de même niveau, il peut être d’implanter un conseil qui veille aux abus, il peut aussi être d’impliquer, dans la culture organisationnelle, les subalternes dans le processus décisionnel.
À titre d’exemple, dans mon organisation, le décideur a modifié la structure pour qu’il soit le seul à son niveau hiérarchique, aucune opposition d’idée et a le droit de vie ou de mort sur chacun des membres du groupe de gestionnaire, ce qui amène un climat de dictature.
Finalement, pour toutes les organisations publiques, il est important d’encadrer le pouvoir et de démontrer le plus de transparence possible. Les enjeux des années futures seront relevés en faisant preuve de courage et en assumant nos responsabilités au détriment de notre petit pouvoir. Comme disent certains, notre priorité, le citoyen…
Références
Le pouvoir dans les organisations, Les Éditions d’organisation, Paris, Henry Mintzberg1
http://www.dicopsy.com/dictionnaire.php/_/psychologie-travail/pouvoir2
La souveraineté du Québec, hier, aujourd’hui et demain, Jacques Parizeau, Édition Michel Brûlé. Les secrets de la croissance page 167 à 186.3