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Que deviendra-t-il notre système de santé à deux vitesses?

Que deviendra-t-il notre système de santé à deux vitesses? Rapide pour le riche et lent pour le pauvre contribuable.

Dans notre système de santé universel,  il est malheureux d’entendre constamment les médias nous rappeler que le gouvernement de Jean Charest privatise de plus en plus les soins.  Des cliniques privées pratiquent actuellement des opérations de la hanche et du genou.  Pourtant, nous avons ce qu’il faut dans notre système de santé public pour faire face à ces nombreux défis.  Comment pensez-vous que cela coute aux contribuables de bâtir de nouvelles cliniques avec tout l’arsenal technologique que cela demande pour équiper des blocs opératoires? Quand, nous savons que nous avons le matériel qu’il nous faut dans nos hôpitaux et qu’il s’agirait de renouveler quelques appareils technologiques au lieu de tout remplacer à neuf.   Je pense que l’argent est investi afin d’augmenter les coûts qui sont déjà élevés dans le secteur de la santé.  De plus, la population devra payer doublement : les appareils sophistiqués par ses impôts et les honoraires des médecins au privé.  Que se passe-t-il pour que nous soyons si dépourvus face à une liste d’attente en croissance, au manque de médecins de familles et à l’épuisement de nos professionnels de la santé?  J’ai l’impression que nous tournons constamment en rond depuis de nombreuses années.   Il se succède plusieurs premiers ministres et la situation d’urgence ne semble pas se résorber.

Nous avons l’un des meilleurs systèmes de santé au monde.  D’ailleurs, plusieurs pays nous envient d’avoir l’opportunité d’un réseau public universel qui permet à tous les citoyens du Canada d’être admissibles au régime public d’assurance-maladie.  Même le président Barack Obama a fait la promotion de ce système de santé aux États-Unis.  Le 10 mars 2010, il a lancé un appel au vote pour un plan de réforme : « Le temps est venu maintenant de prendre une décision sur la façon de réformer enfin le système de santé de façon que ça marche, pas simplement pour les compagnies d'assurances, mais pour les familles et les entreprises américaines. »  Le dimanche soir à la chambre des représentants, le résultat du vote est en faveur du plan de réforme.  Ce projet de loi est historique.  Obama a réussi là ou d’autres présidents ont échoués.  Le dernier à avoir tenté d’implémenter la réforme sans succès est d’ailleurs Bill Clinton.  Dans l’article « Obama : Leader positif » publié le 23 mars 2010, Guy Michel Lanthier cite les phrases suivantes : « La raison qui explique notre impression de leadership de la part du premier président noir des États-Unis, c’est ce que j’appelle l’orientation du leadership.  Avec son projet de réforme de la santé, Obama a agi comme un leader positif.  Le leader positif, c’est celui qui agit pour le bien commun.  Il prend des décisions pour le bien-être du groupe et il est au service des autres.   Il n’est pas là pour se servir.  Et c’est exactement ce que fait Obama avec le projet de loi qui crée autant l’espoir que la controverse actuellement aux États-Unis.  Plusieurs admirent son courage pour avoir maintenu sa ligne directrice afin que 35 millions d’Américains puissent acquérir une assurance-maladie.

Je crois qu’au Canada et au Québec ce n’est pas le manque de compétences et de solutions de nos professionnels qui font défauts, mais un problème de leadership de la part de nos premiers ministres et de leur partie politique.  Actuellement, je constate une difficulté à  écouter les suggestions et les recommandations des professionnels de la santé, des services sociaux et de la population en général.   J’ai été témoin de plusieurs lois qui ont été passées sous la loi du bâillon depuis que le parti libéral est au pouvoir.   Nous avons juste à penser aux lois 100 et 103 qui ont été votées dernièrement.  Je crois que nous vivons dans l’ensemble du Canada et du Québec une crise du leadership.   Tant que nos leaders politiques ne seront pas aux services de la population, il sera difficile de trouver des solutions efficaces et durables pour améliorer l’état de notre système de santé.

Présentement, la population paie, en plus de ses impôts, des frais d’honoraires de médecins dans le privé pour pouvoir se faire soigner dans des délais raisonnables.  Il est très facile de mettre sur le dos des listes d’attente et de l’accroissement démographique des personnes âgées afin de favoriser la prolifération de nombreuses cliniques privées au détriment du système public.  Le partenariat public-privé ne semble pas faire l’unanimité chez la population puisqu’elle devra payer davantage pour obtenir des soins de santé.  Le citoyen moins nantie souffre plusieurs mois et même une année en attente d’obtenir des soins tandis que la personne qui peut se payer du privé peut en quelques semaines se faire soigner.  Ce partenariat public-privé ne semble pas tenir compte de la loi canadienne sur la santé qui vise à assurer à toutes les personnes admissibles du Canada un accès raisonnable aux soins de santé assurés, médicalement nécessaire et prépayé, sans avoir à payer directement au point de service.  Que va choisir le citoyen de la classe moyenne.   Souffrir plusieurs mois et parfois même une année ou se payer des soins au privé afin de guérir le plus rapidement possible.   Je pense que le droit à la santé ne devrait pas être monnayable et que tous les ministres devraient respecter la loi canadienne sur la santé et de cesser de la contourner par leurs politiques sur la privatisation. Présentement, le gouvernement libéral agit à l’encontre des principes de la loi canadienne de la santé concernant la gestion publique, l’intégralité, l’universalité et l’accessibilité.  La gestion publique du régime d’assurance-maladie doit être sans but lucratif : présentement, notre système de santé privatisé devient de plus en plus lucratif pour les cliniques privées.  Selon l’intégralité, tous les services médicalement requis doivent être offerts : si les services sont offerts après un an d’attente sur la liste, la personne peut payer pour obtenir dans un temps raisonnable des services au privé.  La loi canadienne offre des services gratuits dans des délais raisonnables et elle n’inclue pas les cliniques privées.  En ce qui concerne l’universalité, tous les citoyens sont assurés: si nous devons payer pour avoir des services dans des délais raisonnables à quoi sert l’assurance maladie.   Le système n’est plus universel puisque le citoyen qui ne peut se payer du privé devra attendre six mois et plus avant d’être traité.  L’accessibilité donne un accès à des services médicalement nécessaires dans un délai raisonnable : avec l’augmentation des listes d’attente nous sommes loin du compte.  L’accessibilité aux services est de plus en plus difficile à obtenir.

Selon le Dr Robert Ouellet, président de l’Association médicale canadienne (entrevue dans le journal de La Presse), il existe dans le monde, des systèmes de santé universels où il y a peu d’attente.   Les gens se font soigner dans des délais raisonnables.   C’est le cas de l’Angleterre, de la Belgique, de la France, des Pays-Bas et du Danemark. M. Ouellet croit que le problème est le manque de volonté politique.  Elle ne viendra que si la population exige des changements et des temps d’attente moins longs.  En Angleterre, le temps de séjour aux urgences a été réduit à quatre heures.  En France, des patients sont régulièrement soignés dans les cliniques privées sans payer un sous, ce qui libère les hôpitaux.  Les pays européens ont aussi revue le financement des hôpitaux.  Au lieu d’un budget global, ils reçoivent un budget par activité.  Les notions de reddition de comptes et de concurrence sont au cœur du système de santé.  Ce qui n’existe pas au Canada.  Cependant, les pays d’Europe peuvent compter sur un plus grand nombre de médecins.  M. Ouellet se dit convaincu qu’il s’agit de changer les perceptions pour améliorer le système de santé.

Selon le devoir du 16 novembre 2007, il y a 2500 médecins qui pensent que le manque de ressources serait dû à une mauvaise organisation.  Une étude a été publiée en Colombie-Britannique et a été lancée à Québec à l’occasion du colloque de l’exécutif québécois  MCRP.   Ce document met en lumière des solutions publiques aux listes d’attente. Le Dr Michael Rachlis mentionne : « Ce sont ces listes qui donnent des munitions aux partisans du privé.  À tort d’ailleurs, puisque les délais d’attente ne sont généralement pas dus à un manque de ressources mais à une mauvaise organisation des services ».  Le Dr Rachlis s’est fait le défenseur d’un système public capable de se renouveler.   Il existe des exemples en Alberta et à Vancouver de solutions qui ont fait fondre des listes d’attente sans avoir recours au secteur privé.

Dans cet enjeu, il est important de souligner les revers du privé.   Selon l’étude, dans les pays où coexistent les systèmes privés et publics, les temps d’attente dans le public sont plus longs que dans les pays qui utilisent essentiellement le système public.  Selon l’institut canadien d’information en santé (ICIS), un remplacement du genou coûte présentement 8000$ au public et entre 14 000 et 18 000 au privé.  De plus, les soins assurés dans les établissements sont aussi moins sécuritaires en raison de la présence moins élevée de professionnels qualifiés.  Les décès sont de 8% plus élevés dans les cliniques privées.  Le système privé accentue le problème de pénurie de la main d’œuvre dans le public.  Par exemple, les ergothérapeutes, les physiothérapeutes et les orthophonistes pratiquent davantage dans les cliniques privées.  De plus en plus de médecins se tournent vers le privé faute d’obtenir des conditions de travail intéressantes : environ vingt médecins par année quittent le système public.   L’APTS a mené une enquête pour déterminer le coup de la main-d’œuvre indépendante qui pratique dans les établissements publics.  Il en coute 5,1 millions pour l’année 2007-2008.  Tandis que si nous avions engagé du personnel du réseau, cela aurait coûté 2,4 millions.  Le secteur privé a donc couté 110% de plus dans ce cas-ci.

Il existe chez nous des provinces comme l’Alberta et Vancouver qui ont trouvé certaines solutions pour diminuer les listes d’attente et améliorer le système public.   Dans le monde, nous avons identifié quelques pays qui ont réussi à relever le défi.   D’ailleurs, nous avons des professionnels qui sont prêts à travailler ensemble pour améliorer notre système public afin qu’il demeure public.   Ce qui est certain, c’est qu’il y a une volonté des employés du réseau de la santé et des services sociaux de discuter avec le gouvernement pour trouver des solutions. Lors du renouvellement de la convention collective du secteur public et parapublic de la santé et des services sociaux, les employés du réseau public ont soutenu que les soins devraient être desservis que par le système public.  Qu’attendons-nous pour relever ensemble ce défi?

 

Lison Trottier

 

 

 

 

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