L’intégration des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (EHDAA)
L’intégration des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (EHDAA)
La réforme de l’éducation avait, comme objectif, d’intégrer les élèves qui avaient certaines difficultés dans une classe régulière. Donc, tous ceux ayant les capacités devaient être intégrés. Ainsi, les élèves du régulier pouvaient aider l’élève en difficulté à progresser et lui permettant, du même souffle, de socialiser avec plusieurs types de personnes. Suite à sa mise œuvre, les enseignants ont rapidement soulevé des problématiques qui complexifiaient leur tâche et entachaient la réussite de tous leurs élèves. Les cris d’alarme des enseignants n’ont pas tardé et l’ancienne ministre Courchesne a présenté, en 2008, un plan d’action pour aider l’intégration de ses élèves sans clarifier les balises. Elle s’était donné 1 an pour y arriver, mais ses objectifs n’ont jamais été réalisés.
En 2010, cette question est remise au goût du jour. Le 25 octobre dernier, la ministre Lyne Beauchamp a réalisé une rencontre ministérielle sur l’intégration des élèves handicapés et en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EDHAA). Pour une seconde fois, le mandat est d’élaborer les balises à l’intégration d’ici le mois de juin. Lors de cette réunion ministérielle, plusieurs constats d’échec d’élèves en intégration dans une classe régulière ont été mis à jour. De ce fait, la première mission de la nouvelle ministre est maintenant de régler la question des élèves handicapés ou en difficulté. À la lecture de tous les faits qui ont été évoqués il y a quelques semaines, je veux maintenant soulever des solutions réalistes pour régler cette question en tant qu’enseignante en adaptation scolaire.
Les faits
La réforme de l’éducation avait de belles ambitions avec leur programme d’intégration des EHDAA dans les classes régulières, mais maintenant les résultats sont loin de ceux escomptés. Le pourcentage des EHDAA est passé de 13.5 % en 2002-2003 à 18.4 % en 2009-2010. Le gouvernement à injecter 1.8 milliard en ressource pour ses élèves en 2008-2009. Même avec cette hausse, le taux de diplomation n’a pas augmenté et les problématiques demeurent. En ce moment, sur 163 000 élèves en difficulté ou handicapé seulement 25 % arrivent à décrocher un diplôme, ce qui correspond à 1 élève sur 4 au secondaire.[1] De plus, les enseignants aux niveaux réguliers ont souvent des classes où 30 % de leurs élèves éprouvent des difficultés. Ses classes ont souvent peu de moyens ou ils sont insuffisants pour les besoins de leurs élèves. Les enseignants sont épuisés dû à cette surcharge de travail et les élèves du régulier ne peuvent plus progresser aussi rapidement qu’ils le pourraient.
Une solution individualisée pour chaque élève
Les classes régulières ne sont pas adaptées à tous les élèves. Ainsi, je partage l’idée de L’Association québécoise des troubles d'apprentissage qui rappellent que chaque élève est différent et qu'il faut établir des plans d'intervention dotés de ressources humaines et financières suffisantes pour leur permettre un soutien approprié dans leur développement scolaire. [2] Dans un milieu régulier, l’élève EHDAA doit être relativement autonome. Il doit être capable d’avoir des relations interpersonnelles, un comportement généralement adéquat et d’être à un niveau de scolaire semblable à la classe, sinon l’écart est trop grand, entrainant des conséquences négatives pour la classe entière. Il faut connaître tous les moyens d’adaptation possible, faire des procédures flexibles aux besoins de l’élève et lui donner les ressources matérielles, humaines ou financières dont il a besoin. Il faut regarder le besoin de l’individu avant de le placer dans une structure fixe et être capable de le changer au cours de sa scolarité en le réévaluant selon ses capacités. Plusieurs exemples d’intégration sont possibles : l’élève peut être dans une classe régulière tous les jours avec une éducatrice spécialisée, un autre faisant ses cours de base dans une classe spéciale et ses cours complémentaires au régulier ou il peut faire son primaire intégré au milieu régulier et son secondaire en classe spécialisé. Il faut reconnaître leur différence et développer des moyens personnels pour qu’ils vivent des réussites propres à chacun.
Les classes-répits ou classes-ressources
Les propos des enseignants ayant des EHDAA dans leur classe sont clairs : il manque de ressources et ils sont épuisés par la surcharge de travail. La ministre Beauchamp propose, dans ses solutions, d’amener un projet de classes-répits ou classes-ressources afin de décharger les enseignants du régulier.[3] Que ce soit pour une période par jour ou pour une journée par semaine, ses élèves vont bénéficier d’activités adaptées à leur besoin et à leur capacité pour qu’ils vivent des succès épaulés par des spécialistes. Que ce soit un problème de concentration, d’hyperactivité, d’hypersensibilité aux bruits, de langage, de lecture, d’attachement, il faut admettre que ses élèves ont besoin de plus de pauses dans une journée pour bien fonctionner, demandant, du même coup, plus d’attention de l’enseignant. Ses élèves intégrés doivent doubler d’énergie pour effectuer le même travail qu’un élève du régulier. Ils se comparent souvent aux autres élèves de leur classe, amenant des répercussions sur leur estime personnelle. Ainsi, ses classes-répits ou classes-ressources vont offrir un moyen pour faire tomber leur pression et pour leur offrir de l’aide supplémentaire qu’ils n’auraient pas eue en classe régulière. En plus de décharger les enseignants et de permettre d’augmenter le climat général, ses classes vont pouvoir amener les élèves en difficultés à vivre des réussites et rehausser, du même coup, leur confiance en eux.
Limiter à 10 % le nombre EHDAA dans une classe
À 30 % d’élèves éprouvant des problématiques dans une classe, on peut comprendre la fatigue qu’éprouvent les enseignants et les possibles répercussions sur les élèves du régulier. Une autre solution intéressante est proposée par la Fédération des syndicats de l'enseignement qui désire limiter à 10 % le nombre d'élèves en difficulté intégrés dans les classes. De cette façon, les élèves du régulier, en plus grand nombre, peuvent tirer les élèves éprouvant des difficultés vers le haut. L’énergie des enseignants n’est plus seulement axée sur les élèves en difficulté et le cheminement normal de la classe n’est donc pas perturbé. Dans cette situation, les élèves EHDAA vont pouvoir vivre des répercussions positives d’une intégration en classe régulière.
Il faut réussir à adapter notre système aux élèves éprouvant des difficultés. L’intégration en classe régulière ne doit pas se faire à tout prix. Ses élèves ont des besoins individuels et il y a plus d’un modèle d’intégration qui doit être mis à leur disposition. On doit aussi offrir un support approprié aux enseignants pour qu’ils puissent être dotés de moyens pour soutenir ses élèves. À ce jour, un grand mandat attend la nouvelle ministre. Elle tend déjà l’oreille vers l’extérieur, mais elle doit maintenant mettre en place des solutions concrètes dans notre réseau scolaire avant que le taux de diplomation ne baisse encore. Contrairement à sa prédécesseure, madame Beauchamp sera-t-elle capable d’atteindre ses objectifs d’ici le mois de juin?
Sophie Meunier enp7505
[1] http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/201010/24/01-4335701-eleves-en-difficulte-a-peine-25-reussissent.php?utm (consulté le 12 novembre 2010)