Faire plus (+) avec moins (-)… ou l'art de faire plus ou moins bien !
On parle souvent de la santé et de l'éducation lorsqu'on parle du "secteur public". Ces deux grands réseaux, reçoivent l'essentiel des budgets (environ 70 %) (http://www.tresor.gouv.qc.ca/budget-de-depenses/budget-de-depenses-2010-2011/). Mais qu'en est-il des "autres ministères", moins populaires, qui représentent tout au plus 17 % ou moins du budget ? Je parle ici de ces ministères ou organismes qui exercent un rôle non moins essentiel au sein de la société québécoise (Justice, Sécurité publique, Revenu, Immigration, etc.). Je ne m'étendrai pas sur la mission essentielle de ces ministères d'un État de droit (administration de la Justice, détention et réinsertion sociale, perception des impôts, etc.) puisqu'à tord où à raison, elles peuvent constituer un débat intéressant qui ne fera pas l'objet de mon blogue. Je veux surtout me concentrer sur les impacts des décisions gouvernementales dans ces ministères puisqu'en ce moment, ils existent ces ministères et ils doivent rendre des services publics importants. Vous en avez entendu de tous genres, des commentaires : Croyez-vous que le secteur public va s'en sortir ? De la réputation de "fonctionnaires" qu'il traîne depuis des lunes (http://www.lactualite.com/economie/pierre-fortin/fonctionnaires-bonriens), en passant par les restrictions budgétaires, la réduction de la taille de l'État et l'impopularité, la "machine opérationnelle" gouvernementale tient toujours le coup, elle, mais à quel prix ? Depuis quelques années, il semble qu'un paradoxe existe au sein des "opérations" (ceux qui travaillent sur le plancher, directement en lien avec la clientèle) dans les ministères publics. D'une part le désir probable d'efficience d'une société, d'autre part la réalité vécue. Je m'explique. On veut moderniser l'État. Les promesses électorales et les plans stratégiques tendent à offrir plus de services et beaucoup plus rapidement. On instaure des "déclarations de services aux citoyens" à l'intérieur des planifications stratégiques : http://www.gouv.qc.ca/portail/quebec/pgs/commun/gouv/declarationservices/?lang=fr On fixe des objectifs de performance de plus en plus élevés. Par exemple : http://www.micc.gouv.qc.ca/fr/ministere/declaration-services/delais.html Le citoyen, alimenté par les médias, critique l'appareil, le ridiculise, veut que l'on coupe dans les dépenses. Et les médias en rajoutent en rapportant des cas d'exception de mauvaise gestion. Mais le citoyen, lui, il veut du service quand il se présente à un comptoir ou au téléphone, il veut sa réponse... et adéquate en plus, sans erreur, sinon les processus de plaintes s'enclenchent rapidement !
Pendant ce temps, dans ces ministères, il faut composer avec de moins en moins de ressources. On ne remplace qu'un départ à la retraite sur deux (comme s'il y en avait un de trop…). On ne remplace pas l'absence créée par une personne qui quitte en congé de maternité. On ne remplace pas la personne qui a dû quitter en congé de maladie (burnout) car celle-ci devait assumer son travail, en plus du travail de celle qui est partie à la retraite et celui de celle qui est en congé de maternité. C'est ça la réalité ! Les gestionnaires se doivent donc de rappeler des gens d'expertise qui sont déjà à la retraite et les embaucher comme occasionnels. Ils reçoivent donc leurs salaires de retraite bien méritée et on les paie en plus. Le meilleur des deux mondes. Ils peuvent donc cesser quand ils veulent, rien ne les retiendra si ça va mal. Aussi, afin de maintenir une certaine flexibilité dans sa gestion des ressources humaines, le Gouvernement nomme de moins en moins de permanents. Résultat : Pour offrir le même service, on compense par des occasionnels (à contrat). Le problème, c'est que ces derniers sont tantôt 5, 10 ou 15 ans sans permanence, ne savent jamais combien de temps encore ils vont travailler. Oui, vous me direz que dans le secteur privé, la sécurité d'emploi n'y est pas plus, certes, mais pour une formation semblable, un analyste en informatique par exemple gagne un meilleur salaire dans le privé. L'impact d'avoir beaucoup d'occasionnels crée aussi un désintéressement général de la jeunesse à joindre les rangs de la fonction publique. Il est de plus en plus difficile de trouver de bons candidats, intéressés à exercer des fonctions, sachant qu'ils seront engagés sous contrat d'année en année. Ils entrent, font quelque temps, et repartent. Que d'énergie à la dotation des emplois, la formation, le transfert d'expertise ! Et pendant ce temps, le personnel en place sur la ligne de feu répond toujours à la clientèle avec le sourire, ce qui réussit tout de même à limiter le nombre de plaintes. Ce personnel inclut également le gestionnaire qui doit composer avec la situation. Ce même gestionnaire qui, cherchant à trouver des solutions pour remplacer le personnel absent, tentent continuellement d'innover pour "faire autrement", mais sans moyens financiers supplémentaires au plan matériels, les budgets de fonctionnement étant tout aussi réduits (25% cette année dans le budget). Ce même gestionnaire qui fait, avec ses équipes, rouler l'appareil mais qui reçoit aussi les doléances du citoyen mécontent ou du personnel à bout de souffle. Il faut le dire haut et fort, les cas rapportés dans les médias ne représentent pas l'ensemble des faits ! Je crois sincèrement que ces questions doivent se poser, puisqu'en voulant toujours faire plus avec moins, on risque d'en arriver malheureusement à faire plus ou moins bien. Michel Caouette ENP 7505 (jeudi AM)
Commentaires
Faire plus avec moins ´est ca l efficience
Il y a un prix certes a payer.Pour le moment les fonctionnaires arrivent a faire tourner la machine.
le taux d absentéisme ,l épuisement professionnel , autres maladies devraient faire réfléchir les décideurs surtout
Si l administration tient toujours a la qualité de service .
Je trouve que vous avez dressé un portrait assez juste de la situation actuelle. Désolant... mais juste. En tant que professionnelle dans une institution d'enseignement public, je ne fais que constater un certain retour du pendule.
Il y a eu de belles années et la population avait tous les droits de se payer la tête des fonctionnaires, car les années fastes ont déjà existé. Des emplois en or, une sécurité d'emploi, une convention collective en béton, un excellent fonds de pension, des primes de départ, des bonus de rendement pour les cadres, six semaines de vacances, et j'en passe. Pourtant, ce n’est plus la réalité actuelle.
On a récemment décidé d'abolir les primes de rendement et les bonis de performances. Les possibilités d'avancement sont réduites de moitié, car on remplace une personne sur deux. On augmente le niveau d'études requis pour accéder à des postes supérieurs et il y a absence de plan de relève. Les fonds de pension à prestations déterminées sont appelés à disparaître et malgré tout cela, il faut continuer de répondre aux demandes des citoyens et, comme vous le disiez, avec des standards de performance de plus en plus élevés, mais des conditions à la baisse.
La cloche a sonné et la récréation est terminée, mais la mentalité des gens et les préjugés envers la fonction publique demeurent. Il faudra donner un grand coup de barre pour redresser la situation et redonner confiance aux citoyens dans la fonction publique.
Il est peut-être temps d’arrêter de niveler par le bas et faire en sorte qu’il soit possible de faire carrière dans la fonction publique avec des conditions se rapprochant du privé. On pourrait alors attirer de meilleurs candidats et redorer notre image.
Diane Plante
Étudiante à la maîtrise
ÉNAP (ENP 7505)