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Le privé à la Fraser

 

 

 

 

            Pour ce deuxième blogue, je me permets un texte d’humeur. Chacun a son opinion et sa vision du système de santé et de service sociaux. Nous en voyons les avantages et les désavantages, les succès et les échecs. Dans le texte suivant, je désire vous exposer ce qui me semble être un enjeu actuel du système de santé et services sociaux, un enjeu qui menace l’intégrité même du système, qui le ronge tranquillement.  Je crois que nous avons une responsabilité comme citoyen et comme artisan du système de santé et de services sociaux. En effet, un mouvement social de fond semble vouloir remettre en question les fondements de notre système de santé.  Ce mouvement  tend à chercher une solution unique à une série de problèmes complexes d’un système complexe.

 

            Il suffit d’ouvrir les journaux, de consulter internet afin de constater l’attaque de toutes parts du système public de santé. Certains propos, davantage nuancés, font avancer le débat, comme les articles qui ont entouré le départ du Dr Yves Lamontagne de la présidence du Collège des Médecins (La Presse, 4 octobre 2010). Parfois les propos sont beaucoup moins nuancés. Ceci m’amène donc à commenter l’omni implication de l’Institut Fraser dans le débat public sur l’avenir du système de santé et services sociaux. Mais qu’est-ce l’Institut Fraser ? « Notre mission consiste à mesurer, à analyser et à faire connaître les effets d’un marché concurrentiel et de l’intervention gouvernementale sur le bien-être des citoyens » (Institut Fraser, site consulté le  12 octobre 2010). Dans les faits, l’institut Fraser analyse les politiques sociales à partir de données statistiques de différentes sources. Cependant, une ligne directrice semble claire : l’Institut Fraser se positionne contre l’intervention de l’État dans plusieurs domaines tels que la santé et l’éducation. Nous devons, entre autres, à l’institut Fraser, le controversé palmarès des écoles, publié dans la revue L’Actualité. Ce palmarès, permet aux écoles privées d’occuper le haut du pavé du palmarès, au détriment des écoles publiques. L’Institut Fraser est un organisme idéologique qui, par ses études, tend à influencer la population dans ses choix politiques (à droite, disons le).

 

            Je suis tout à fait en accord avec une société qui permet le débat et la réflexion. Cependant, depuis quelques temps, j’ai l’impression de voir de plus en plus les études de l’Institut Fraser dans les médias. À la fin août 2010, l’Institut a publié son étude annuelle sur la performance des systèmes de santé des provinces canadiennes. (Rovere, 2010) L’étude reprend les deux mesures proposées par le ministre Bachand : la contribution santé et la franchise. L’institut se positionne en faveur du tournant idéologique de l’État québécois. Cependant, elle critique l’aspect universel de la mesure de la contribution santé.  Elle nomme :

Puisque les patients paient pour leurs soins de santé par l’entremise des impôts, il n’y a aucun prix au moment de recevoir les services. Sans signaux de prix, les individus n’ont pas d’incitations à limiter la quantité de soins  qu’ils reçoivent, ce qui mène inévitablement à une demande excessive pour des services de santé » (Rovere, 2010 p. 16). 

L’Institut Fraser prend clairement position en faveur de la franchise santé, sans égard aux choix politiques des québécois en ce qui concerne l’universalité des services et la prise en charge des gens en difficulté par l’État (depuis la publication du rapport, le ministre Bachand a dû mettre de côté ce projet). Dans un point de presse, publié le 4 octobre 2010 (Institut Fraser, site consulté le  12 octobre 2010) et diffusé aux médias canadiens,  l’Institut Fraser nous démontre que de se pencher sur le prix des médicaments serait une mesure inefficace afin de faire face aux hausses de coût du système de santé. À l’aide d’une série de chiffres, l’organisme fait la démonstration que le contrôle du prix des médicaments aurait un impact dérisoire étant donné ce que représentent le prix des médicaments et la hausse des budgets de la santé. La conclusion du rapport fait appel à l’acquisition d’une assurance maladie privée par les citoyens. Encore ici, la pensée idéologique de l’organisme propose une solution unique à un problème complexe. Pourtant dans le débat du prix des médicaments, je n’ai pas entendu de politicien ou de gestionnaire proposer le contrôle des prix comme solution unique aux coûts engendrés par le système de santé publique. 

 

Alors là je me questionne. Lorsqu’on choisi de publier une étude de l’Institut Fraser est-ce que l’on assiste à une prise de position du média ? L’intérêt de cet organisme nous semble purement idéologique et son apport aux débats sociaux est peu scientifique mais plutôt politique. Les arguments sont une série de sophismes qui mènent constamment à la même conclusion : le système public de santé canadien est non-viable et la solution est une assurance privée pour tous.  De grands pans de la société civile sont alors mis de côté. Nous pouvons penser aux personnes les plus pauvres mais, également, aux personnes ayant des problèmes de santé chroniques ou temporaires.  Oubliez également les fondements de la santé publique.  Les principes même de la Loi canadienne sur la santé sont remis en question. Nos valeurs, mises de l’avant, dans notre système de santé et service sociaux au Québec sont bafouées. On vise ce qui ne fonctionne pas, on renie ce qui fonctionne et on annonce la mort du système. On propose constamment des solutions qui sont une remise en question totale du système, sans égard aux conséquences sociales du changement.   Dans ce contexte, comment peut-on innover et faire évoluer notre système de santé et services sociaux, avec ses valeurs et principes, quand le débat est miné ainsi par des positionnements idéologiques  et pseudo-scientifiques extrêmes ? Je crois que le débat sur la pérennité du système de santé et de services sociaux est trop important afin que nous accordions de l’espace à des études scientifiques qui semblent plutôt être des pamphlets idéologiques. Comme artisans du système de santé, je crois que nous avons un rôle de créativité dans la recherche de solution, mais également de séduction auprès de la population. Nous devons montrer ce qui fonctionne et s’attaquer aux difficultés. Nous devons également être conscient que peu importe ce qui sera fait, il y en aura pour qui un système de santé publique n’a pas sa raison d’être et que cette position peut avoir une bonne attraction dans le contexte de visibilité actuelle.

 

           

Références

 

Rovere, Mark. (2010). Réforme de la santé au Québec. Perspectives, Été 2010, 14-17.

 

Institut Fraser (page consultée le 12 octobre 2010),   site de l’Institut Fraser [en ligne], http://www.fraserinstitute.org/fr  

 

Ugo Forget

ENP 7328 (jeudi pm)

Commentaires

  • À lire avec grand intérêt. Proftrudel

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