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Quand la bonne gouvernance impose son "diktat"

Blog n* 2  ENP 7505 – 20/11/09 -

Quand la bonne gouvernance impose son « diktat »

(par Dany Christian NSOMBE, groupe du lundi soir)

 

 

Ce qui aura à coup sur marqué les esprits des montréalais à l’issue de la campagne et des dernières élections municipales, c’est le besoin de chaque candidat de montrer que s’il était élu, son mandat serait placé sous le signe de l’éthique, de la transparence, bref de ce qui est communément appelé la bonne gouvernance. En effet, pendant la campagne électorale, tous les messages des candidats étaient tramés de ces concepts là. Normal dirait-on lorsqu’on sait qu’à la veille de ces échéances, il y a eu des révélations de toutes sortes : d’une part sur le financement douteux des partis politiques, et d’autre part le scandale du secteur de la construction dans la ville de Montréal. Comment ne pas ajouter à cette liste les non moindres scandales tel celui des contrats des compteurs d’eau  annulés à la société Genieau et  celui de la Société d’habitation et de Développement de Montréal ( SHDM) où des terrains ont été bradés quelques mois auparavant. Face à cette autre actualité qui a finalement pris le pas (on serait tenté de le dire vu le faible taux de participation des citoyens qu’on pourrait attribuer aux conséquences malheureuses de ces révélations qui auraient enlevé tout crédit aux candidats aux yeux des populations) sur la vraie actualité électorale, le regard que je porte est celui non pas du « montréalais normal », mais plutôt celui du montréalais originaire d’un pays en voie de développement où le quotidien de l’administration est rythmé par ce type de comportements, ce qui a conduit à l’émergence depuis peu, du concept de bonne gouvernance.

Cette notion, qui hante les nuits des dirigeants du tiers monde n’est- elle pas entrain d’imposer son « diktat » à Montréal? Tout porte à le croire surtout lorsqu’on sait que vingt quatre heures après sa victoire, les premières déclarations du nouveau  (ancien) Maire ont porté sur le rétablissement de l’intégrité au travers de quelques mesures d’envergures à savoir :

-         L’élaboration du code d’éthique de la ville;

-         La probable nomination dans les semaines qui suivent d’un commissariat à l’éthique;

-         Révision du système d’appels d’offre

-         La réduction des investissements de la ville jusqu’à ce que lumière soit faite sur les allégations de collusion et de corruption dans le milieu de la construction.

-         La réflexion qu’il compte mener avec le Ministre Claude Béchard sur le financement des partis politiques.

 

Quel programme révolutionnaire et iconoclaste? Serait t-on tenté de dire, car en effet, il vient rompre avec les traditionnelles déclarations et programmes qui font d’habitude suite  à une élection. Et si on s’amusait à jouer au visionnaire, il ne serait pas prétentieux de dire que quelque soit le candidat qui aurait été élu, le discours serait le même. Comme nous pouvons le constater, l’actualité a orienté les débats, elle a imposé ses priorités. La nécessité de redonner confiance aux citoyens s’imposait et au finish, c’est la bonne gouvernance qui est le grand vainqueur de ces élections, car toutes les actions présentes et à venir à la Mairie de Montréal au cours de ce mandat seront empreintes de cette notion, d’où la nécessité de mieux la cerner.

 

La notion de gouvernance est un terme polysémique qui rend difficile une définition unique. Il y a tout un débat autour de cette notion dont le domaine d’application s’est multiplié au cours des dernières décennies. C’est ainsi qu’on parle de gouvernance locale, de gouvernance urbaine, de gouvernance d’entreprise, de gouvernance mondiale…pour ne citer que les notions les plus fréquemment utilisées

 

Pour la définir, Catherine Baron[1] propose de faire un détour par l’étymologie du terme pour pouvoir mieux le circonscrire.

Le terme de « gouvernance » vient du latin « gubernare », ce qui signifie gouverner, piloter. Il s’agit donc de l’art ou de la manière de gouverner, en favorisant un mode de gestion des affaires original dans un environnement marqué par une pluralité d’acteurs (une firme, un État, une collectivité locale, une organisation non gouvernementale, une association ou une instance internationale) qui disposent, chacun à des degrés divers et de façon plus ou moins formelle, d’un pouvoir de décision. La complexification de l’environnement socio-économique qui en découle accroît l’incertitude et justifie le recours à de nouveaux modes d’organisation. Cependant, l’action de gouverner suppose aussi que l’on s’interroge sur la direction dans laquelle on souhaite « piloter le navire », d’où une réflexion sur la finalité de l’action. Quels sont les objectifs poursuivis par ceux qui gouvernent les actions des autres ? Quels moyens, quelles règles (formelles, informelles), quelles formes de rationalité sont mis en œuvre ? Autant de questions qui amènent des réponses parfois opposées, suscitant le débat entre les différentes approches. Ce détour par l’étymologie permet tout simplement d’avoir un cadre général dans lequel inscrire les définitions de la gouvernance. Et la bonne gouvernance dans tout ca?

La banque Mondiale est le principal diffuseur de cette acception de la gouvernance qui vise à élaborer des critères de « bonne gouvernance ». Elle introduit le concept de gouvernance dans un rapport paru en 1992. Le contexte est celui de l’échec des plans d’ajustements structurels dans les pays en développement qui nécessite de trouver de nouveaux modes de gouvernement face à une pauvreté croissante, à une stagnation de la croissance et à une succession de crise en particulier en Asie et en Russie. Ce rapport définit le rôle que devrait jouer l’État, mais énonce aussi des critères de bonne gouvernance à respecter à savoir la responsabilité, la transparence, l’éthique, un état de droit et la participation d’une pluralité d’acteurs.

 

Comme nous pouvons le voir, c’est dans un contexte particulier que cette notion a été vulgarisée par la banque mondiale dans les pays en voie de développement, et pour la ville de Montréal, les scandales ayant précédés les élections municipales ont mis cette notion sous les feux de la rampe. Le parallèle est donc tout trouvé, à événement particulier, mesure particulière, ou bien comme dit le vieux dicton, aux grands maux les grands remèdes.

En effet, il s’agit bien de maladie ici, certains ont même parler de mettre la ville de Montréal sous tutelle, mais irait on jusqu’a là?

Nous pensons que la thérapie de « bonne gouvernance » que s’est auto prescrit le Maire Tremblay sous la pression des événements devraient si les doses sont bien administrées, porter ses fruits. Dans les pays en voie de développement cela n’a pas toujours été le cas, car le contexte politique, économique et même social n’est pas favorable à une bonne administration. Au Québec, et à Montréal en particulier, les vertus de la démocratie devraient œuvrer pour.

 

Rendez-vous est donc pris dans quatre ans, à l’heure de faire le bilan de ce mandat particulier sous fond de bonne gouvernance. Vivement que les thèmes à développer lors des prochaines échéances électorales changent, là on aura compris que la bonne gouvernance a marqué son territoire, que sa thérapie a fonctionné, et enfin que le malade, je voulais dire la ville est guérie de ses maux.

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] Baron C; LA GOUVERNANCE: DÉBATS AUTOUR D’UN CONCEPT POLYSÉMIQUE, Droit et Société 2003/2, N 54 p.329-349

Commentaires

  • Selon moi, la mesure la plus évocatrice du désir de Gérald Tremblay de faire le ménage à la ville de Montréal est sans aucun doute le fait qu'il ait écarté certains poids lourds de son ancienne administration du nouveau comité exécutif de la ville de Montréal (dont Claude Dauphin et Luis Miranda). Nous pouvons déduire que ces personnes ayant été mêl de près ou de loin aux récents scandales municipaux, ont perdus la confiance du Maire.

    Toutefois, je reste sceptique quant aux autres mesures annoncés pas le Maire et je ne crois pas que le loup sera capable de faire le ménage dans la bergerie. De surcroît, les récentes révélations ont démontrés que la corruption était tellement intégrer à Montréal et dans le milieu de la construction que seule une thérapie choc saura régler ce problème systémique. Si le Maire Tremblay est rempli de bonnes intentions à ce point, pourquoi alors n'appuie-t-il pas la création d'une commission d'enquête sur le financement des partis politiques et la construction, seule mesure qui permettea d'y voir clair dans ce dossier et de prendre les mesures correctives qui s'imposent pas la suite?
    Ce refus démontre vraiment que le Maire Tremblay n'est pas de bonne volonté dans ce dossier.

  • Même si les définitions foisonnent et peuvent même, des fois, sembler contradictoires, la notion de gouvernance, ou de « bonne » gouvernance, est, en effet, devenue centrale pour qui s’intéresse à l’administration publique.
    Dans les pays en voie de développement, elle semble même prendre un sens particulier et ne constitue qu’un doux euphémisme utilisé pour ne pas aborder frontalement la question de la corruption.

    Mais ce qui est encore plus remarquable, c’est de voir comment tous ces concepts semblent plus être des « effets de mode » au gré des tendances décrétées à Paris, Rome, Bruxelles ou Genève.
    Il fut, en effet, un temps où c’était la question du genre qui était la plus prédominante; et tout projet de développement qui n’intégrait pas cette composante semblait d’ores et déjà voué à l’échec.

    La question des impacts environnementaux fut aussi très à la mode dans les années 90; remise au goût du jour avec les derniers développements sur la question.
    La question que l’on se pose est donc de savoir si l’agitation de tous ces concepts relève d’un agenda orienté sur de vraies priorités ou s’il ne s’agit juste que d’effets de mode passagers inspirés des salons feutrés de Bretton Woods.

    Amadou Lamine CISSÉ

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