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Vers une meilleure tarification des services publics

En septembre dernier, il y a eu beaucoup de bruit au sujet de la tarification des services publics et la hausse annoncée de certains tarifs par le gouvernement québécois. Ce court texte cherchera à apporter un peu de lumière sur la situation actuelle en ce qui a trait à la tarification des services publics au Québec, fera un bref rappel de certains principes d’administration publique et enfin, émettra une opinion quant à la démarche en cours.

En septembre dernier, les militants libéraux réunis en conseil général à Drummondville ont proposé au gouvernement d’imposer des tarifs sur les services publics.  On se rappelle bien des propositions émises lors de cet événement, telle une hausse des tarifs d’électricité, l’instauration de péages routiers, l’imposition de droits de scolarité au collégial ou encore les redevances sur l’eau.  Les jeunes libéraux avaient fait de même en août dernier alors qu’ils étaient réunis en congrès en suggérant d’établir le péage sur toutes les autoroutes du Québec.

Quelques mois auparavant, lors de la présentation du budget 2009-2010, la Ministre des Finances de l’époque avait fait quelques avancées sur ce sujet en admettant que les tarifs imposés aux contribuables québécois étaient demeurés inchangés depuis 1996.  Ainsi, les tarifs d’environ une trentaine de services devrait être indexé d’ici les cinq prochaines années, c’est le cas par exemple des droits sur les permis de conduire ou les certificats de naissances qui sont les mêmes depuis dix ans.  Cette indexation des tarifs se fera en vertu de la nouvelle politique de financement des services publics dont l’objectif est « d’améliorer le financement des services pour en maintenir la qualité et s’assurer de la transparence et de la reddition de compte du processus tarifaire.[1] »  Cette politique est résolument tournée vers le principe d’utilisateur-payeur et encourage les ministères et organismes à faire en sorte que les services qui profitent exclusivement aux utilisateurs de ces services soient financés par la tarification de l’usager.

De plus, tous ces événements surviennent à peine un an après la publication d’un rapport du Groupe de travail sur la tarification des services publics publié en avril 2008 et intitulé « Mieux tarifer pour mieux vivre ensemble ».  Suivant les vives réactions suscitées à la publication de ce rapport, le gouvernement Charest s’était empressé de le remiser afin de calmer les inquiétudes des contribuables.

La question se pose donc à savoir comment sont financés les services publics au Québec. Actuellement, la majorité des services sont financés à partir des impôts sur le revenu tandis que seulement certains services publics sont assujettis à une tarification.  C’est le cas, par exemple, des garderies.

En administration publique, la tarification est un moyen utilisé par les gouvernements afin de contrôler les dépenses, plusieurs avancées à ce sujet ont d’ailleurs été effectuées en Europe par exemple.  Au Québec, les tarifs sont soumis à un contrôle ministériel direct ou indirect.  En effet, les ministères et organismes possèdent un Cadre de référence auquel ils doivent se conformer afin de déterminer les tarifs.  Selon le rapport Groupe de travail sur la tarification des services publics, ce contrôle a pour seul résultat de faire en sorte que les tarifs ne reflètent pas les coûts réels puisque le Cadre de référence n’a pas force de loi.  On observe effectivement une distorsion, généralement méconnue des contribuables, entre les tarifs et les coûts réels des services publics.  De plus, les modalités suggérées par le Cadre de référence ne sont souvent pas respectées puisque les tarifs sont fixés arbitrairement et ne sont pas indexés sur une base régulière, ce qui mène la plupart du temps à des rattrapages qui peuvent être brutaux, par exemple, lors de l’augmentation des droits de scolarité universitaire.

Il est possible de dégager plusieurs avantages de l’utilisation de la tarification : le fait de faire payer uniquement les usagers évite que les non usagers paient la facture, ce qui est plus équitable, tout en incitant à une utilisation plus efficace des services[2]. En effet, la majorité des Québécois ont tendance à percevoir les services gouvernementaux comme étant gratuits.  Cette idée mène souvent à des abus et au gaspillage des ressources puisque les contribuables ne connaissent pas les coûts réels des services publics qu’ils utilisent.  Ils ont aussi tendance à voir la tarification comme étant une taxe supplémentaire.  En fait, un tarif ne constitue pas un impôt.  L’impôt sur le revenu doit être utilisé pour financer la mission de l’État, ce qui bénéficie à la collectivité.  La tarification vise le financement d’un service indépendamment des autres missions de l’État.

Si le gouvernement actuel décidait d’aller de l’avant avec le concept d’utilisateur-payeur, il apparaît primordial que cette décision se doive d’être appliquée sans exception, et ce, à tous les services publics bénéficiant uniquement à ses utilisateurs par opposition à d’autres services, qui bénéficieraient à l’ensemble de la collectivité.  Ce n’est cependant pas la voie choisie par le gouvernement Charest, qui semble se lancer dans un exercice de tarification désordonné.  En effet, la décision a été prise de ne pas inclure certains services publics dans cet exercice et ce, afin d’éviter le mécontentement des contribuables québécois.  C’est le cas des garderies à 7$ pour lesquelles on nous assure que les tarifs n’augmenteront pas à court terme et ce, sans justification valable.

Bref, la tarification, bien que justifiable pour financer les services publics se heurte à des obstacles politiques, culturels et idéologiques.  Un gouvernement au pouvoir veut conserver son électorat et sa popularité, c’est pourquoi certains domaines demeurent intouchables.  Une majorité de Québécois estime avoir droit à des services publics gratuits et cette conception nuit grandement à la transition vers une meilleure tarification des services publics.  Dans le contexte économique actuel, il est facile de comprendre pourquoi une hausse des tarifs serait difficile à avaler par les contribuables.  Or, nous avons appris cette semaine que le déficit prévu pour l’année en cours est d’environ 4,7 milliards $.  La question qui se pose donc est d’autant plus pertinente; comment financer les services publics afin de retrouver l’équilibre budgétaire et ce, sachant que les Québécois ont choisi de se doter d’un modèle d’État qui privilégie la collectivité.


Mariane A. Cours du lundi soir



[1] Gouvernement du Québec. (2009). « Assurer la qualité et le financement des services publics ». Ministère des Finances du Québec.

[2] Jean Mercier.  (2008). L’administration publique : De l’École classique au nouveau management public.  Les Presses de l’Université Laval, p. 227.

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