Blogue no.1,enp7505 - Jean-Luc Groulx
Le droit de ne travailler qu’en français au Québec ; Avantages certains… Handicape probable pour la nation!
Avant tout pour les inconditionnels de la langue de Molière, ne tirez pas sur le messager. Je tiens à préciser que je suis en faveur du travail et des études en français. Mais avec le temps, à force de travailler et d’échanger avec des gens de différentes cultures, je crois que les cultures et langues distinctes font partie intégrante d’une richesse individuelle ainsi que celle d’un peuple. Mon propos tend à démontrer que nous nous devons comme peuple, d’accepter certaines distinctions des autres, si nous voulons qu’ils reconnaissent les nôtres.
Puisque que l’anglais est utile dans le travail et dans les échanges commerciaux au niveau public et privé, les principes de l’administration publique qui sont en cause dans ce débat sont pourtant bien connus de nos politiciens. En particulier lorsqu’ils ont trait à l’efficience dans les services et à la reddition de compte. Une nation qui désire s’ouvrir et être maître de ses décisions, ne peut tenir ses citoyens dans l’ignorance. Comme le dit l’adage, les canadiens français étaient «nés pour un petit pain», il faudrait donc se reprendre en main et améliorer nos conditions de vie et de travail.
Bien qu’il est indéniable que la langue française soit une richesse, je crois par ailleurs que l’anglais n’est pas une menace en soit à l’extinction du français. Nous devrions plutôt nous concentrer à son encadrement; vous me direz que c’est ce que l’ont fait en adoptant des lois. Alors, si nous voulons changer les choses et protéger nos acquis, la théorie des petits pas me semble des plus appropriée face à des lois massues. N’oublions pas que dans l’histoire de l’humanité les peuples qui n’ont pas su composer avec l’évolution, s’ils n’ont pas disparus, ont pour le moins cessé d’évoluer et ont été isolés. Il est important de démontrer du leadership, de l’innovation et d’utiliser nos cellules grises. Il est dit qu’une bonne théorie est essentielle dans la pratique, alors pourquoi semblons-nous simplement resserrer les mesures avec le projet de Loi 14?
Sur quels principes ont pu reposer leur réflexion? C’est à se demander sur quelles fonctions de la gouverne l’état agira. Nous savons que l’état québécois en est un qui défend sa francophonie et fait la promotion de sa culture (Trudel. 2013, séance 13 p. 1). Ceci vient renforcer l’énoncé du besoin du projet de loi 14 pour le gouvernement. Cette Loi vient affecter la Charte de la langue française et la Charte des libertés de la personne et d’autres dispositions législatives. De plus cette loi touche notamment; au droit de travailler en français; au droit de vivre en français, à la langue de l’enseignement; à la langue de l’administration ; à la langue du commerce; à l’intégration de services concertés entre organisme et à la facilitation de l’intégration en région des immigrants (Assemblé Nationale. 2013). La déclaration est noble, bien entendue, il apparait normal de vouloir se protéger. Toutefois, il ne faut pas oublier que nous avons des citoyens de culture anglaise qui sont également des Québécois depuis toujours. Pour leur défense, plusieurs d’entre eux comprennent et baragouinent le français, mais la langue maternelle revient très vite au galop. Par contre, je suis d’accord avec vous, depuis le temps, ils auraient pu faire plus d’effort pour apprendre, mais la nature humaine… Ils ont pour la plupart en horreur la «Language police». Surtout lorsque nous sommes rendus à donner des billets d’infraction pour des lettres sur un écriteau qui ne respecte pas tout à fait une proportion établie entre le français et l’anglais. Il apparaît que ce genre d’initiative finit même par exaspérer plusieurs d’entre nous. Lorsqu’une organisation relevant du gouvernement est même rendue à reprocher le mot «pasta» ou «caffe», en entête dans un menu de restaurant italien, il y a matière à se remettre en question. N’est-ce pas de bon aloi d’accepter certains des régionalistes ethniques devenus au cours des années des citoyens québécois? Les communautés ethniques ont également une identité distincte et sont également des citoyens québécois à part entière. N’oublions pas que la Ville de Montréal a même désigné et reconnu des quartiers à caractère ethnique comme la petite Italie. De là, la théorie des petits pas énoncée précédemment, il me semble préférable afin de faire accepter nos aspirations nationalistes. Parfois, avec certains accommodements qui ne semblent pas déraisonnables, nous pourrions sans doute arriver à de meilleurs résultats. Et non créée des polémiques qui font le tour de la planète, nous ne sommes pas seuls en terre du Québec, nous sommes également des immigrants en terre amérindienne.
Pour revenir à la théorie, cette loi 14 touche par le fait même à plusieurs ministères. Elle affectera donc aussi les relations entre la politique et l’administratif. L’interaction des acteurs politiques et administratifs reposera sur des valeurs et des objectifs. (…) «On sera peut-être porté à se dire, au moins au sens figuré, que les politiciens et les administrateurs ne seront pas de la même race ni de la même culture! Quoique forcée(…).[i] (Morin. 2011, p.515). Le ministre désirant soumettre une loi devra travailler de concert avec ses sous-ministres et autres conseillers et ce, même si quelques fois les opinions peuvent différer. N’oublions pas que le sous-ministre et tous les conseillers administratifs doivent servir objectivement et de manière impartiale. « L’obéissance et le service au gouvernement du jour ne peuvent dépasser les frontières de la …légalité.» (Trudel. 2013).
En conclusion, l’administration publique est complexe. Peu importe l’orientation du gouvernement lorsqu’il prend des décisions ou adopte des lois, il se doit d’utiliser le pouvoir législatif et administratif et prendre en considération les commentaires de ses citoyens. Afin d’adopter un projet de loi, ils doivent se pencher en commissions et en séances de travail. Dans ce cas-ci, j’espère que ce gouvernement prendra une décision éclairée et prendra le temps d’écouter les différents groupes d’intervention. Gilles Vigneault a souvent chanté les beautés de notre langue française et sur les gens de notre pays, je reste convaincu que ces affirmations restent au goût du jour. Comme je suis ouvert d’esprit, je termine sur cette citation d’un grand homme qui s’applique à toutes les langues : « If you talk to a man in a language he understands, that goes to his head. If you talk to him in his own language, that goes to his heart.» Nelson Mandela.
Assemblée Nationale (2013). Page consulté, 2 mars 2013
Morin Claude (2011), Secrets d’états? Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains chapitre 22, p. 515
Trudel Remy (2013), notes de cours séance 13, p.1
Trudel Remy (2013), notes de cours séance 6, p.1
Commentaires
Loin de moi l’idée de dénigrer le messager venu nous annoncer, via les ondes du blogue du cours d’Enjeux et principes de l’administration publique, l’arrivée prochain du projet de loi 14 à l’Assemblée nationale du Québec. Toutefois, il est important, je crois, de se pencher sur la question du français comme langue de travail au Québec et, plus particulièrement pour nous étudiants de l’ÉNAP, dans le domaine de l’administration publique.
Bien qu’il semble évident, à première vue, que l’anglais est colonisé la plupart des milieux de travail à travers bon nombre de pays dans le monde ce n’est pas parce qu’un phénomène se voit multiplié en grand nombre que celui-ci est nécessairement une bonne chose ou, tout de moins, qu’il ne comporte pas certains effets pervers.
Si l’on regarde de plus près, on peut observer que « les langues du monde ont été colonisées par un anglais de type particulier, celui du management » ce qui a eu comme conséquence que « de nombreux textes écrits dans cette variante de l’anglais se sont trouvés traduits vers le français de façon servile, en reproduisant tels quels les mots et les tournures propres à l’anglais. Dans le domaine du management, il existe ainsi une abondante documentation écrite en un « français » qui ne constitue en fait que de l’anglais translittéré ou déformé » (Deneault 2013, 21).
Pour nous étudiants en administration publique et futurs employés du secteur public (c’est déjà le cas pour plusieurs d’entre nous), il est impératif, et sur ce point je serai catégorique, de défendre notre langue française dans notre milieu de travail non seulement comme un simple outil de communication, mais comme le disait si bien le sociologue allemand Max Weber « une communauté de langue [qui] facilite au plus haut point la compréhension réciproque, par conséquent l’établissement de toutes les relations sociales » (Weber 1995, 81).
Références :
Deneault, Alain. 2013. Gouvernance. Le management totalitaire. Montréal : Lux éditeur.
Weber, Max. 1995. Économie et société I : Les catégories de la sociologie. Paris : Pocket.
La langue française doit nécessairement être protègée. Je considère toutefois que les récents événements en lien avec l'Office de la langue française sont quelque peu exagérés. Il me semble que les fonctionnaires ont le devoir d'utiliser leur gros bon sens afin d'applicquer les procédures et directives imposées. Quoi qu'il en soit, l'anglais est présent partout et on ne peut l'ignorer. Se confiner uniquement à l'utilisation du français afin de le "protèger" restreindrait de beaucoup la gestion et la gouvernance du Québec. Les impacts seraient beaucoup plus néfastes que l'utilisation ponctuelle qu'on pourrait en faire.
Je suis de ceux et celles qui travaillent dans un milieu de travail bilingue. Bien que mon lieu de travail soit dans un environnement majoritairement francophone, le domaine d'affaires de mon organisation fait que le travail en anglais est inévitable. Malgré le fait que l'anglais soit très présent dans mon milieu de travail, je m'efforce de de communiquer en français la majorité du temps. Je crois très important de protéger notre langue, mais je crois qu'il y a une façon de le faire. Le projet de loi 14 semble noble en ce sens, mais comment sera-t-il mis en application? Comment pourrait-on s'assurer que les entreprises plutôt anglophones de 26 à 49 employés respectent la loi? Est-ce que le gouvernement va mettre en place des outils ou des cours pour offrir de la formation en français aux employés de ces entreprises?
En conclusion, comme je l'ai dit précédemment je crois que le français est une grande richesse pour nous et nous nous devons de protéger cet héritage. Je crois cependant aussi que l'ouverture et la capacité de parler plusieurs langues est également une richesse. Anglais, espagnol, allemand, mandarin, italien... plus on est de fous plus on rit, n'est-ce pas?
Votre article est très intéressant. Le Québec en voulant protéger sa langue : le français ne renie pas les caractéristiques distinctives des autres peuples. La langue permet non seulement de communiquer mais aussi de transmettre des valeurs et de véhiculer une culture donnée. Quand j’ai appris l’anglais, ce n’était pas seulement la grammaire, la conjugaison et le vocabulaire mais également des façons de faire et d’être propre la communauté anglophone ou plus précisément dans mon cas aux États Unies. La langue m’a même permis de connaitre les subtilités de la culture américaine. « La découverte d'une langue est indissociable de la découverte culturelle ». (http://www.aclille.fr/dsden59/ressources_peda/langues_vivantes)
La langue symbolise également une identité bien définie et la protection du français par le Québec est une question de survie identitaire. Mais, comme vous l’avez si bien mentionné, les méthodes pourraient être questionnables. Le projet de loi 14 est louable mais semble être une tentative désespérée… Malgré toutes les lois et amendes, l’anglais continue de gagner du terrain et c’est un phénomène mondial. C’est la langue internationale. Je ne suis pas défaitiste mais le combat semble perdu d’avance : l’anglais est un bulldozer (bouteur en français du Canada selon Wikipedia). Aujourd’hui, je suis allée à l’hôpital et la première phrase de la réceptionniste a été : « Hi ». On n’est pratiquement gêné de dire qu’on ne parle pas anglais. Avant de travailler dans la fonction publique, tous les emplois dans le communautaire nécessitaient de parler anglais et les employeurs testaient mon niveau en entrevue.
Dans le projet de loi 14, il est question du droit de travailler en français. Il faudra déjà passer le cap de l’entrevue. Ce sera comme la discrimination raciale, il sera très difficile de prouver que le poste nous a été refusé car on est unilingue français pour la simple et bonne raison qu’il existe de nombreuses causes au refus d’une candidature.
La ministre Diane De Courcy mentionne que le bilinguisme individuel est souhaitable « mais le bilinguisme institutionnel, et le bilinguisme généralisé de la langue de travail au Québec, nous fait reculer individuellement et collectivement». (http://quebec.huffingtonpost.ca/2013/03/09/projet-de-loi-14-le-droit-de-travailler-en-francais_n_2845821.html).
Nous ne pouvons pas nous battre contre le bilinguisme qui est inéluctable mais nous pouvons empêcher l’anglais de prendre le pas sur le français. Et, à bien y réfléchir, s’il le faut, utiliser tout l’arsenal de lois et de règlements car l’enjeu est bien trop important.