#1- Anne Paquin-Bilan d'une crise:de la pratique à la Théorie
Étudiante: Anne Pepin 30 septembre 2012
Cours: Principes et enjeux de l'administration publique
Session: A-12 travail intra-session
J'évolue depuis maintenant vingt ans dans le monde collégial. J'ai enseigné au secteur technique et j'assume depuis peu, le rôle de coordonnatrice d'un département, dans un cégep. J'ai découvert l'administration du secteur public, avec en toile de fond, la crise étudiante. De même souffle, mon premier cours à la maîtrise, Principes et enjeux de l'administration publique, a débuté avec un changement de gouvernement.
J'ai parfois l'impression que ce contexte me prédestinait à un retour aux études. J'ai besoin de comprendre. En effet, quotidiennement, le théâtre de ma vie professionnelle me fournit un immense laboratoire qui regorge d'exemples de différents principes enseignés au fil des semaines.
Revenons en arrière, au ''Printemps érable'', période du tintamarre des casseroles, des manifestations étudiantes quotidiennes. Au tout début de la crise, j'avais la naïve impression que tout se règlerait en quelques jours. Je croyais que l'administration de mon collège, l'appareil de l'État dans le modèle de Westminster n'aurait d'autre choix que d'appeler la police aussitôt que les étudiants bloqueraient l'entrée aux étudiants désireux d'assister à leurs cours. En effet, les professeurs, c'est à dire les employés de l'État étaient payés pour donner ces cours et ils devaient respecter la loi. Ma lecture des choses était un peu trop simpliste...
Mme Beauchamp alors ministre de l'éducation et représentante du pouvoir exécutif l'avait d'ailleurs rappelé aux directions des collèges. Elle demandait aux directions des collèges que les cours soient donnés aux étudiants désireux de les recevoir tel que le stipule la loi et cela même si les associations étudiantes avaient obtenu par un vote démocratique, la légitimité de faire un boycott des cours.
En effet, selon M. Nelson Michaud, le principe de légitimité est subordonné au respect de la légalité. Dans l'État de droit, ce principe est à la base su système de l'organisation politique et sociale. À première vue, cela semble simple! Avec le recul, je crois que la lecture de la ministre était tout aussi réductrice que la mienne. Une intervention du chef du pouvoir exécutif, le Premier ministre Jean Charest m'amène à conclure cela. En effet, au lendemain de la déclaration de la ministre de l'éducation, M. Charest a évoqué le principe de subsidiarité et a donc nuancé la directive de Mme Beauchamp, en délégant à la direction de chaque collège le pouvoir de décider.
Selon La Presse Canadienne, dans un article publié le 13 avril 2012, M. Charest avançait ceci alors qu'il était à Sao Paulo, Brésil.
"Nous laissons à chaque institution le soin de prendre les décisions qu'elles doivent prendre en fonction de plusieurs critères qui incluent la sécurité, qui incluent également la gestion de son établissement."
Par une telle directive, il a alors priorisé la proximité des services et des personnes pour tenter d'amener chaque établissement collégial à persuader les étudiants de rentrer en classe, tout en gardant à l'esprit qu'il pourrait intervenir avec une loi spéciale, en cas de dérapage majeur.
Les choses se sont envenimées, les décisions des directions des collèges ont été multiples. Cetaines désiraient protéger la chèvre et le chou alors que d'autres appliquaient tête baissée, les directives de la ministre. Dans les faits, certaines ont demandé l'aide du pouvoir judiciaire en appelant la police en renfort alors que d'autres ont préféré annuler immédiatement la tenue des cours, sous prétexte de craindre pour la sécurité des personnes. Les différents rapports de force entre les parties patronnales et syndicales, de chacun des collèges impliqués dans le conflit peuvent sûrement expliqués en partie la variété des réponses des établissements scolaires.
Face à ce cahot, ce manque d'homogénéité dans les cégeps du Québec et les délais pressants, le Gouvernement libéral majoritaire de M. Charest n'a eu d'autre choix que de voter une loi spéciale (la loi 78). Plusieurs aspects de cette loi révolta une grande partie de la population.
Simultanément, dans d'autres sphères médiatiques, il y avait des révélations d'anciens fonctionnaires à des journalistes et des témoignages troublants à la commission Charbonneau évoquant la corruption et l'implication probable de membres du Gouvernement. Le Gouvernement commençait à être sérieusement remis en question et déclencha des élections puisque toujours selon Nelson Michaud, il est important que les institutions étatiques et politico-administratives évoluent dans le respect des valeurs de la société qu'elles servent. Dans le cas présent, les multiples sondages énonçaient clairement qu'il fallait vérifier les valeurs du peuple en pareilles matières et ainsi aller aux urnes.
Cette crise nous montre plus que jamais la grande nécessité de l'existance de l'État de droit. Pour certains, il servira à contraindre l'anarchie et pour d'autres à contrer les dérives d'un capitalisme arrogant.
Comme plusieurs, j'avais des préjugés face à l'administration publique et la lenteur de sa bureaucratie. Cette crise vécue de l'intérieur et éclairée par les lectures du cours provoquent chez moi une remise en question importante. L'actualité me démontre la grande nécessité de cette administration publique. Ses rouages et l'intégrité des gens qui la composent sont les principaux gardiens de cet équilibre fragile qu'est la démocratie.
Quelques références:
MICHAUD, Nelson (dir). et coll. (2011). Secrets d' États, 778p.
La Presse canadienne, publié 13 avril 2012 à 07h33