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Mourir dans la dignité

Mourir dans la dignité

Par Caroline Landry

ENP-7328

2e Blogue

 

Le gouvernement procède actuellement à une consultation publique sur la question du suicide assisté et de mourir dans la dignité. La question de mourir dans la dignité n’est pas nouvelle. On se souvient tous du cas très médiatisé de Sue Rodriguez en 1993, qui souffrait de la maladie de Lou Gehrig[1] et qui désirait que le jour où elle ne serait plus en mesure de profiter de la vie, un médecin qualifié soit autorisé à mettre en place les moyens technologiques appropriés afin qu'elle puisse mettre fin à ses jours, au moment qu’elle jugerait opportun. Tout un débat juridique entoura cette question. Elle s’est adressée aux tribunaux et souleva l'invalidité de l’alinéa 241b) du Code criminel qui prohibe le suicide assisté. La Cour suprême du Canada, par une majorité de 5 à 4, a affirmé que cet alinéa était constitutionnel et ne violait pas la Charte canadienne des droits et libertés.

 

La majorité des juges reconnurent également que le droit à la sécurité de Sue Rodriguez était brimé par l'alinéa 241b) parce qu'il la privait de son autonomie personnelle en ne lui permettant pas qu'on l'aide à mettre fin à sa maladie qui lui causait des douleurs atroces. Cette privation, toutefois, dit la majorité, est conforme aux principes de justice fondamentale; l'aide au suicide est intrinsèquement blâmable sur les plans moral et juridique et pourrait conduire à des abus. Il n'y a pas de consensus à propos de la décriminalisation du suicide assisté, pas plus au Canada que dans les autres démocraties occidentales. La majorité invoque aussi le respect de la vie humaine à l'appui.

Un aspect intéressant de cette décision de la Cour Suprême est celui de l’opinion minoritaire qui conclue que l'interdiction du suicide assisté est arbitraire. En effet, la personne physiquement capable peut se suicider (ce n'est pas un acte criminel), tandis que la personne physiquement incapable commet un crime lorsqu'elle demande de l'aide pour accomplir le même acte. Cette distinction est contraire aux principes de justice fondamentale, à leur avis. Le combat de Sue Rodriguez s’est terminé en 1994, lorsqu’elle  a décidé de s’enlever la vie avec l’aide d’un médecin.

 

Au-delà du débat juridique, il y a le débat humain. Le problème est que les lois n’évoluent pas aussi rapidement que l’opinion publique. Comment pouvons-nous justifier de laisser un être humain souffrir lorsqu’il n’existe aucune cure, connue en médecine moderne, pour le guérir de sa maladie. Nous avons plus de compassion envers les animaux qui souffrent qu’envers les humains. N’importe qu’elle personne en pleine possession de ses moyens peut décider de s’enlever la vie mais pas quelqu’un qui souffre d’une maladie dégénérative, à moins qu’elle puisse s’enlever la vie elle-même. L’aide au suicide étant illégale.

Je comprends que le législateur soit frileux sur cette question. Après tout, il y a toujours ces personnes voraces qui profiteront d’une ouverture dans la loi afin de se débarrasser d’un proche pour empocher l’héritage. Afin d’éviter cette situation, il ne faudrait pas légiférer explicitement dans le sens d'une autorisation ou d’une légitimation du suicide assisté. Il faudrait plutôt encadrer la procédure par des règles strictes et spécifiques. Notamment, prévoir une liste spécifique de maladies qui pourraient donner ouverture au suicide assisté et la phase à laquelle cette option pourrait être considérée (évidemment, chaque cas étant un cas d’espèce, un médecin devra se prononcer) et prévoir l’obligation que le suicide soit médicalement assisté.

J’ai la chance d’être en parfaite santé et de n’avoir, pour l’instant, aucune personne dans mon entourage qui souffre d’une maladie dégénérative. Par contre, cette réalité pourrait changer du jour au lendemain. Si, un jour, on me diagnostique atteinte d’une maladie dégénérative sans perspective de guérison, j’aimerais avoir le choix de déterminer comment terminer mes jours.

Est-ce que la société québécoise est prête pour une telle évolution comme on l’a vue chez les belges? C’est ce que nous dévoilera les résultats de la consultation publique sur le droit de mourir dans la dignité.

 



[1]La maladie de Lou Gehrig est le nom commun de la maladie neuro-dégénérative invalidante, la sclérose latérale amyotrophique (SLA).

 

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