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La croissance des coûts de santé

Les principaux éléments responsables de la croissance des coûts de santé, particulièrement au Québec, sont de 5 ordres. Premièrement, une inflation des coûts de l’ordre de 5 % annuellement, ce qui représente environ le double du taux d’inflation actuel. Ceci s’explique grossièrement par l’ancienneté croissante du personnel, par les services offerts de plus en plus spécialisés et coûteux, par le développement des technologies et des médicaments et par une augmentation du prix des équipements. Deuxièmement, il n’existe pas actuellement de lien entre le producteur, le payeur et le consommateur. Les médecins sont rétribués dans la majorité des cas à l’acte et directement par le Ministère de la Santé (via la Régie) et ne sont pas employés par les hôpitaux, alors ils ne sont pas nécessairement intéressés à participer à l’amélioration des services. Le consommateur de services ne sait pas combien il coûte à l’État et les hôpitaux ne voient pas nécessairement leur budget augmenter s’ils améliorent ceux-ci (efficacité), la chaîne d’imputabilité est discontinue. Troisièmement, la gestion et le management se font à court et moyen terme, en fonction d’un système de contrôle de dépenses annuelles et non sur les résultats ou l’impact sur la santé de la population, sans oublier le vieillissement de celle-ci. Quatrièmement, le gouvernement du Québec a connu une perte de contrôle sur les déficits de ses hôpitaux, accélérée par les coupures du gouvernement fédéral. Le déficit passe de 553,4 millions en 1999-2000 à 1,26 milliards en 2009-2010. Cinquièmement, le coût du régime d’assurance médicaments est en hausse constante et ne réussit toujours pas à faire ses frais.

 

D’autres éléments secondaires contribuent à la hausse continue des coûts de santé. Il suffit de penser aux nombreuses reconfigurations du réseau et au départ massif des effectifs au milieu des années 90 (réforme de M. Rochon).

 

Cela dit, comment arrimer les finances publiques et les besoins ? En augmentant les ressources financières? En réduisant le panier de services offerts ? En repensant les places respectives du public, du privé et des organismes communautaires? En redéfinissant ce qu’il faut entendre par soins de santé ?

 

Toutes ces questions sont légitimes et doivent être posées. Il ne faut pas escamoter la question du financement.

Pour obtenir des solutions durables au problème de financement, il s’agit d’abord de mettre en branle un virage curatif, la prévention diminuant les coûts de santé et l’impact financier de la baisse du nombre de travailleurs. Il est nécessaire d’adapter une partie du système des soins actuels de courte durée et en soins de longue durée (CHSLD). Du côté politique, les décisions stratégiques du gouvernement doivent dépasser la perspective du court terme (4 ans), selon un agenda de réélection. Aujourd’hui, les acteurs ne se questionnent plus uniquement sur le « quoi faire », ils envisagent toute la dimension du « comment le faire ». Évidemment, couvrir l’entièreté du processus en fonction d’une vision politique à court terme devient difficile. Dans ce contexte, il faut aussi limiter le pouvoir de certains groupes de pression, comme les syndicats et les médecins.

 

Sur le plan de financement, en plus d’établir un lien d’imputabilité entre les différents acteurs du système, il faut continuer d’investir dans la technologie médicale et d’information, fixer des limites financières par rapport aux services offerts et favoriser la mise en place d’incitatifs tout en évaluant les résultats en fonction de l’impact sur la santé de la population et non en fonction des intrants tels que les budgets spécifiques, les ressources matérielles, etc. La question de la participation du privé dans le système de santé québécois se pose en raison de la performance des outils de gestion à leur disposition, de la déréglementation et de la décentralisation des ressources actuelles ainsi que l’instauration de la subsidiarité entre établissements avec incitatifs à la performance.

 

Du coté des ressources humaines, pour obtenir une solution durable au problème du financement, il faut repenser la planification de la main d’œuvre, offrir aux employés de la formation continue et de qualité, reconnaître leurs compétences et favoriser l’intégration de nouvelles professions au sein d’équipes interdisciplinaires. Il s’en suivra une baisse des tensions corporatives et au niveau d’encadrement supérieur, c’est-à-dire tant du travail des employés que des patients eux-mêmes. Une dernière solution à envisager est une modification profonde ou le retrait pur et simple du programme d’assurance médicaments public. La mutualisation des risques ne couvre pas toute la population, mais bien un échantillon incomplet (en excluant les travailleurs, qui ont, eux, une assurance privée et généralement une situation de vie plus favorable) et ce contribue à l’augmentation des risques et à l’explosion des coûts.

 

Pour faire face à la croissance des coûts de santé, les solutions à privilégier sont multiples. Les facteurs particuliers de l’environnement des organisations de santé pourront être d’excellents leviers, mais aussi d’incroyables entraves à l’évolution de notre gouvernement.

 

Serions-nous prêts à faire autrement ?

 

Daniela Lascu

Cours ENP-7328

Enjeux contemporaines de gestion dans les organisations de services de santé et de services sociaux

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