Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

#2 Andryse -Déconcentration ou Décentralisation en Haiti

Déconcentration ou Décentralisation en haïti

 

La violence inouïe de la secousse tellurique du 12 janvier 2010 offre à la nation haïtienne la chance unique d’inaugurer une communauté à la dimension du rêve de grandeur politique et de justice socio-économique des Pères de la Patrie, c’est-à-dire une communauté qui n’a pas besoin de la communauté internationale pour être unie, exister et se développer.

 

Avec une puissance de 7,3 à l’échelle de Richter, le séisme du 12 janvier a tout chamboulé et surtout, il a laissé derrière lui un pays dévasté où des milliers de vies (près 280.000) ont été ensevelies sous des tonnes de gravats. Il faut, comme si ce n’était pas suffisant, y ajouter un million de sans-abris, des milliers de déplacés, des centaines de handicapés, des milliers d’orphelins et les principales institutions publiques détruites. On est encore à l’état d’urgence, les rues sont remplies de décombres, les sinistrés attendent de l’aide.

 

Et déjà, on parle de s’organiser, de reconstruire ou carrément de construire. Cela dépend dans quel angle on se tient. Les rencontres, les colloques se multiplient, les idées ne manquent pas. Elles se chevauchent et se choquent. Reste à les réaliser. La tâche s’annonce complexe et gigantesque. Mais une idée-force se dégage, celle de désengorger Port-au-Prince pour mieux intégrer les régions dans le développement du pays.

 

Alors, faut-il déconcentrer ou décentraliser l’état et les services ?

 

Avant le séisme, 60% du PIB (produit intérieur brut) haïtien étaient concentrés à Port-au-Prince. Cette ville abritait une population 10 fois plus élevée que celle prévue. Toutes les grandes institutions y étaient. C’était une centralisation excessive.

 

L’ampleur de la catastrophe a accéléré les besoins criants de décentralisation. Aujourd’hui, on part à zéro, il faut repenser le pays. On doit viser une décentralisation véritable des services et non une déconcentration où les régions ne sont que de simples succursales à guichets. La décentralisation souhaitée ne doit pas être une simple stratégie de routine mais une dynamique formelle de développement politique intégral des départements et de leurs populations.

 

Pour ce faire, il faut penser à un plan stratégique pour les 10 prochaines années, mettre à contribution toutes les instances locales, nationales, internationales, utiliser une approche holistique et participative. La décentralisation demeure certes un défi pour le pays, mais il faut s’y mettre et tout de suite. Ce n’est plus option d’autant que la décentralisation est étroitement liée à la mission de l’état : offrir des services de qualité à tous les citoyens peu importe leur lieu de résidence sur le territoire national.

 

Le succès de cette décentralisation est tributaire de la capacité infrastructurelle des villes à assumer ces nouvelles responsabilités. Il les faut doter d’institutions viables, de ressources humaines, matérielles et financières tant sur le plan politique que socio-économique, car la décentralisation, contrairement à la déconcentration, est un concept qui évoque un processus simple : la responsabilisation des régions et la culture de cette responsabilisation dans la pensée politique nationale.

 

Il y va de soi que la nouvelle architecture sociale haïtienne passe un élargissement des soins de santé aux plus démunis et par une implication effective et décisionnelle des régions et des villes dans la gestion des services de santé offerts à leurs populations respectives. Il faut également réorganiser le système éducatif haïtien afin que l’éducation en Haïti ne soit plus désormais un privilège, mais un droit. L’état a l’obligation, et non le choix, d’investir massivement dans l’éducation et la santé de ses enfants. Pour cela

 

.- il faut relever la qualité des soins de santé offerts dans nos hôpitaux, relever la qualité de l’enseignement dispensé dans nos écoles publiques, nos centres de formation professionnelle, nos lycées, nos universités.

 

.- il faut augmenter le nombre de Centres de Santé disponibles dans les villes de province tout en évitant le piège d’une santé curative au détriment d’une santé préventive. Le retour de l’hygiène publique enseignée dans les petites écoles apparaît aujourd’hui comme une option à ne pas négliger.

 

.- il faut augmenter le nombre des maisons d’enseignement primaire, secondaire, universitaire et professionnel et élaborer, en collaboration avec les responsables régionaux et municipaux, un plan de réussite pour les établissements. Les comités ou les élus locaux devront superviser la gestion des écoles et des universités : revoir les normes et les règlements des institutions.

 

.- il faut enfin une décentralisation du système économique afin de créer des emplois dans les régions. Ce qui sera un incitatif pour forcer les citoyens à regagner les provinces et à y demeurer. Dans cette optique, la création d’une Banque haïtienne de Développement et la mise en place d’un programme d’aide agricole aux paysans sont des éléments à considérer dans la nouvelle Haïti.

 

Cette décentralisation doit se faire avec les Haïtiens et pour les Haïtiens. Il faut éviter de reproduire les erreurs du passé. Il faut certes importer certaines stratégies qui ont déjà fait leurs preuves ailleurs, mais il faut le faire sans ébrécher la souveraineté haïtienne. Les objectifs doivent être clairs. Il faut analyser, planifier, coordonner, communiquer et contrôler les interventions, utiliser différents champs de compétence. Il faut oser des initiatives sans oublier les problèmes de base.

 

On veut le changement. Un vent nouveau doit souffler sur Haïti. C’est le moment de prendre conscience et d’agir en conséquence. La décentralisation ne se fera pas sans peine. C’est une tâche d’autant plus colossale qu’il ne s’agit pas seulement de voir comment l’état peut offrir des services sociaux sur l’ensemble du territoire mais plutôt de montrer comment l’état peut agir de l’intérieur même des régions pour faciliter ou accélérer leur développement.

 

Andryse César

Les commentaires sont fermés.