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Les piqueries à Montréal : possible implantation ou non?

Les piqueries à Montréal : possible implantation ou non?

Depuis maintenant près de quatre ans, la ville de Montréal et la province  du Québec tente, pour l’instant sans succès véritable, de mettre en place des sites d’injections supervisés (SIS) sur tout le territoire de la ville. Selon Santé Montréal, il y aurait officiellement environ 4000 utilisateurs de drogue par injection (UDI) sur le territoire de la ville. Néanmoins, ce chiffre peut être facilement contesté vu le manque de données fiables et la difficulté reliée au recensement des utilisateurs de drogues. Il est donc très probable qu’en réalité, le nombre soit beaucoup plus élevé.  Avec déjà plus de 90 SIS répartie dans plus de 5 pays dont le Canada à Vancouver et plusieurs études scientifiques démontrant l’efficacité de ces centres, comment ce fait-il qu’une implantation soit si difficile dans la métropole québécoise?

D’abord parce que l’article 56 de la  loi du code criminel règlementant certaines drogues et autres substances rend difficile l’introduction d’un centre où l’injection de drogue serait autorisée.  En effet, selon les dispositions à l’article 56.4 de la loi, la possession de toutes drogues ou autres substances visant à modifier le jugement et le comportement pour un usage récréatif, à l’exception de quelque substance utile à certaine médication. Bref ceci interdit donc la possession de toute drogue récréative, sauf autorisation spéciale, par exemple dans le cas du cannabis médicinal. L’article 56.5 rajoute qu’il soit interdit de faire le trafic de l’une de ces drogues, ou de chercher à en faire le trafic et même de favoriser celui-ci. Bien que la Cour Suprême du Canada ait statué que le centre supervisé de Vancouver ne contrevenait aucunement à la loi, une implantation à  l’échelle du pays ne peut se faire si rapidement. Effectivement, le problème de la loi reste toujours présent et il est du devoir des autorités québécoises de démontrer l’importance des SIS.  Le ministère de la Santé et des services sociaux doivent s’assurer que les projets demeurent dans les balises déterminées par le ministère de la Justice et de la Sécurité publique, mais aussi qu’il s’agit d’une solution fiable et sécuritaire qui aiderait à remédier aux problèmes de transmissions d’infection et de maladie du sang. L’un des seuls moyens de contourner la loi sur l’utilisation et la possession des drogues est de démontrer que la mise en place de centre SIS est une question de sécurité publique.  En effet, la majorité des utilisateurs de drogue par injection sont affectés par l’hépatite C, le VIH ou des ITS qui peuvent se transmettre par contact sanguin. Aussi, l’absence de lieu sécurisé pour les UDI fait en sorte que ceux-ci doivent s’injecter dans des lieux non supervisé, non stérile et public et qu’ils doivent disposer de leur équipement du mieux qu’ils peuvent, dans les poubelles s’ils sont consciencieux, sinon dans les ruelles ou même dans les parcs. Tout ceci ce produit dans le cas ou une injection ne cause aucun problème. Le marché de la drogue étant ce qu’il est, les matières entrant dans la fabrication de celui-ci sont de plus en plus variées et dangereuses pour la santé. Aussi, les doses peuvent être difficiles à calculer pour un individu étant  déjà affecté par celle-ci. Ces deux facteurs, séparés ou combinés, peuvent facilement causer une surdose, qui, si elle n’est pas interrompue, peut causer la mort.  Dans la réalité de la rue, personne ne leur vient en aide, personne n’appelle les services d’urgences.

Les SIS fournissent donc des endroits sécurisés et propres avec de l’équipement neuf et du personnel de soutien en cas de problème et surtout, ils fournissent un endroit ou disposé des seringues usagées. Les UDI doivent eux-mêmes se procurer les substances qu’ils désirent s’injecter.  Lorsqu’on observe le fonctionnement des SIS, il est possible de voir qu’il s’agit beaucoup plus que d’une pièce chauffée où les « junkies » vont prendre leur dose. En effet, le personnel présent sur place offre un accueil chaleureux et une présence humaine à ces gens qui sont isolés et qui souffrent d’une solitude immense. Aussi, les centres ont tous des miroirs qui donnent la possibilité à certaines personnes de se regarder, chose qu’ils n’ont pas toujours l’occasion de faire. Pour une certaine proportion de ces gens, la vue de leur état suffit à leur donner un choc assez puissant et leur fournit la motivation nécessaire afin de vouloir s’en sortir et démarrer une cure de désintoxication. Si cela est le cas, les SIS offrent du soutien et de l’aide en les mettant en lien avec des personnes ressources qui pourront les aider, sans jamais les obliger. Aussi, dans le cas éventuel où une surdose venait à se produire, les infirmières sur place ont les capacités, les connaissances et les moyens d’agir afin d’éviter la mort de l’usager et lui permettre d’obtenir les soins adéquats, qui, parfois, donnent aussi la motivation nécessaire pour sortir de la rue.

À Montréal, Cactus œuvre auprès des gens de la rue et fournissent du matériel et de l’aide aux personnes dans la rue depuis maintenant 1989 et travail sur la possibilité d’ouvrir un centre SIS depuis 2010. Aussi, le maire Coderre à l’automne 2014, a démontré son appui à ces politiques de prévention et a annoncé l’ouverture éventuelle de trois centres sur l’île de Montréal. Néanmoins, beaucoup de travail reste à faire quant à la vision et à l’opinion de la population concernant ces centres.  L’opinion publique reste un obstacle majeur ralentissant le processus d’implantation de sites d’injections supervisés. La peur en est le principal moteur. En effet, plusieurs ont la certitude que la création de SIS viendra augmenter l’achalandage de UDI et que leur quartier sera aux prises avec un problème de drogue et de mal propreté. D’autres croient aussi que la création de ces sites ne servira qu’à camoufler l’échange et le trafic de stupéfiants. Plusieurs autres raisons peuvent être évoquées et il est important de démontrer à la population les bienfaits qu’ont les SIS tant sur les UDI que sur la sécurité publique.  L’information et l’éducation restent les meilleures armes afin de réussir à combattre les préjugés reliés aux sites d’injections supervisés.

L’implantation de SIS à Montréal n’est donc pas impossible et ne revêt pas que de l’illusion. Du chemin reste à parcourir, mais les bienfaits et l’impact énorme sur la vie des utilisateurs des centres méritent que l’on se batte pour eux, autant pour leur sécurité, que pour la nôtre et celle de nos enfants.

 Vanessa Adams

Liens utilisés :

http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/c-38.8/

http://www.santemontreal.qc.ca/aide-et-services/servicespartheme/dependances-alcool-drogues-et-jeu/services-dinjection-supervisee/

http://cactusmontreal.org/a-propos/mission-et-historique/

http://publications.msss.gouv.qc.ca/acrobat/f/documentation/2008/08-216-01.pdf

http://www.dsp.santemontreal.qc.ca/fileadmin/documents/4_Espace_media/Dossiers_de_presse/sis/sommaire_rapport_SIS_vf.pdf

 

 

Commentaires

  • Très bon sujet selon moi ... Je suis aussi d'avis que des SIS, avec de bons paramètres, seraient très utile dans une ville comme Montréal. La bataille juridique et les études scientifiques en Colombie-Britannique ont réellement relancées le débat.

  • Tu as raison d'indiquer ''avec de bons parametres'', autrement je comprendrais le sceptisisme de la population vis à vis des SIS...

  • Voilà un sujet d'actualité qui doit préoccuper l'administration...publique au premier chef. On va lire avec attention
    prof

  • Je ne peux qu'applaudir la venue peut-être prochaine des SIS à Montréal.

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