Blog 2 : Mélanie Helou -L’AMT : une société d’État sans transparence.
Blog 2 : Mélanie Helou
L’AMT : une société d’État sans transparence.
En mai dernier, les médias ont révélé que l’Unité permanente anticorruption a perquisitionné les bureaux de l’Agence métropolitaine de transport (AMT) dans le cadre d’une enquête sur son ancien PDG, Joël Gauthier. Ce dernier est soupçonné d’avoir commis une fraude envers le gouvernement, un abus de confiance par un fonctionnaire public et de participation à une infraction (dont ingérence dans l'octroi de contrats, détournements de matériaux et recours aux prête-noms). Qui plus est, l’AMT contrevient aux lois de gestion des sociétés d’État, notamment car son conseil d’administration ne représente pas le nombre requis d’administrateurs indépendants. De surcroît, l’AMT connait des troubles de gestion depuis plusieurs années. Le projet de Train de l’Est qui liera le centre-ville de Montréal et Mascouche a également soulevé des questions, notamment dû à plusieurs dérapages dont le dépassement des coûts qui a plus que doublé.
Malgré tout cela, l’AMT reste un des organismes de transport les plus secrets au Canada tel que révèle TVA Nouvelles. Selon une analyse comparative du journal 24 h, le Conseil d’administration est le seul à refuser de tenir des séances publiques parmi les organismes de transport des huit plus grandes villes canadiennes. La direction de l’AMT refuse même de dévoiler les ordres du jour et les procès-verbaux des réunions du conseil. « Ces documents ne sont pas publics. Il n’y a pas de règles prescrites (quant à l’accès au public), c’est un choix de l’organisation » a confié un porte parole de l’organisation au journal 24 h.
Selon cette analyse, l’AMT est loin d’être transparente alors que toutes les autres directions des plus importantes organismes de transport au Canada organisent annuellement plusieurs séances administratives publiques. Leurs réunions sont télédiffusées et les documents officiels sont disponibles sur le Web. Trois des plus grandes sociétés de transport du pays, soit la STM, le RTC et le Toronto transit commission (TTC) font une dizaine de séances publiques par année. D'autres organismes de transport, tels que OC Transpo (Ottawa), Calgary Transit, Winnipeg Transit et Edmonton Transit, gérés par des comités formés par le conseil de ville, télédiffusent toutes leurs séances. Les documents officiels se retrouvent également sur le site web de chaque ville.
Selon les médias, l’AMT se défend en indiquant qu’elle est une société d’État sous la responsabilité du ministre des Transports, plutôt qu’une société de transport, telle que la Société de transport de Montréal (STM) ou le Réseau de transport de la Capital (RTC). L’Agence se compare à des organismes semblables comme, Hydro-Québec ou Loto-Québec, dont les séances ne sont pas publiques. Pourtant, après une vérification du journal 24h, Metrolinx, une société d’état ayant un mandat similaire, organise plusieurs séances publiques. Leurs procès-verbaux et leurs réunions sont même disponibles sur leur site Web.
Je suis d’avis que l’AMT, en tant que Société d’État, devrait démontrer une plus grande ouverture et un maximum de transparence. La transparence est un des principes fondamentaux de notre administration publique. D’ailleurs, « La transparence apparaît maintenant comme une valeur de toute première importance des sociétés démocratiques, valeur que les citoyens à juste titre revendiquent comme un droit. Le (…) gouvernement devrait s’imposer un devoir de bien les renseigner et les administrateurs publics devraient adopter des standards élevés eu égard au respect de la vérité [3]. Le gouvernement se doit de démontrer un maximum de transparence dans les actions et les décisions de nos institutions gouvernementales. De surcroît, suite aux nombreux scandales médiatisés liés à la corruption, la transparence doit être priorisée pour éviter la perte de confiance des citoyens envers le gouvernement et un désintérêt dans l’administration des affaires publiques.
Heureusement, le ministre des Transports, M. Poëti promet du changement. Lors d’un brunch participatif qui a eu lieu à la prestigieuse École nationale d’administration publique, j’en ai profité pour en discuter avec lui. M. Poëti m’a confié qu’il prévoit une révision complète de la gouvernance du transport en commun à Montréal, dont l'AMT. M. Poëti a précisé que cet exercice analysera non seulement la structure, mais également toute la question de gouvernance. M. Poëti considère qu’il est inacceptable que l’AMT refuse d’être transparente. Le ministre a pour objectif de rendre tous les organismes publics le plus transparents possible car c’est selon lui la meilleure façon de respecter les contribuables. Une des solutions qu’il envisage est de rapatrier l’AMT à la Communauté métropolitaine de Montréal.
De toute évidence, une meilleure transparence favorisera une meilleure reddition de compte. En administration, tout doit faire l’objet de reddition de compte. J’aimerais clore sur les propos du Dr Fernando Cupertino. Lors d’une conférence sur le système de santé brésilien, il a dit : « La corruption est une maladie universelle. La reddition de compte et la transparence sont essentielles».
Mélanie Helou
Références consultées :
- TVA NOUVELLES, Société d’État, L’AMT, l’un des organismes les plus secrets, publication 26 août 2014
- 24 H, L’AMT loin des yeux du public, mercredi 27 août 2014-10-17
- MICHAUD, N. et coll. (2011). Secrets d’États? Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains, chap. 20-21, p. 499
Commentaires
Est-ce que l'AMT a sa raison d'être à la base ? Pourquoi dans la région métropolitaine, il existe une multitude d'organisme gérant le transport en commun ? Comme la RATP à Paris, un seul organisme pour tout.
Il est vrai par contre que de pas vouloir ouvrir la porte au citoyen pour un organisme tel que l'AMT donne l'impression qu'il y a quelque chose à cacher. Y aurait-il eu la distribution de généreux bonus aux membres du conseil d'administration ?