Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

La difficile mise en oeuvre du Plan Nord

La naissance du Plan Nord remonte à la période précédent la campagne électorale de 2008. Le parti libéral est alors au pouvoir et dirigé par Jean Charest. Celui-ci, lors de son intervention à l’ENAP le 2 octobre dernier, a révélé que ce projet était né de son ambition de porter une grande politique pour sa province.

Une politique qui marquerait les esprits. 

Il faut rappeler ici le contexte de cette campagne : Jean Charest est alors au pouvoir depuis 2003, mais a écopé d'un gouvernement minoritaire lors des élections de 2007. Le 1er gouvernement minoritaire depuis 1878. Jean Charest, dans l'espoir de regagner un gouvernement majoritaire, convoque des élections en 2008.

Selon ses dires, il s'est ensuite rendu compte que son parti n’avait pas finalisé la préparation du plan de campagne électorale. 

C’est qui explique sans doute le démarrage un peu chaotique du Plan Nord. Après plusieurs déclarations nébuleuses du gouvernement nouvellement élu, on commence à mettre en doute l'existence réelle d'un plan.

Apparemment à juste titre, puisque la ministre en charge du Plan Nord finit par avouer en 2009 qu'il s'agit plutôt d'une "démarche", d'une "consultation". Elle fait la une des journaux:

Finalement, le « Plan Nord » n'existe pas! Le grand projet de Charest n'est plus qu'une « démarche » menant à des consultations (Le devoir, 14 octobre 2009) 

D’aucun pourrait penser qu’il s’agissait plus d’une promesse électorale que d’un réel projet. 

La machine se met toutefois en branle. En 2010, on trouve enfin les premiers éléments de sa mise en œuvre dans le plan budgétaire du gouvernement. Le contexte économique est récessif. La situation budgétaire est déficitaire (Finances Québec, 2009). Mais il faudra attendre le 9 mai 2011 pour avoir le lancement officiel par le gouvernement du Plan Nord:

Le chantier d'une génération de Québécois

Dès le départ, la mise en œuvre est donc confiée à la Ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau. Ministre qui démissionnera malheureusement en septembre 2011. Elle sera remplacée par Clément Gignac.

De par sa complexité,  et bien qu'il soit encore sous la responsabilité du Ministère des Ressources naturelles, le Plan Nord implique aujourd’hui pas moins de 14 ministres ou ministres délégués.

C’est une politique d’envergure. Un projet que seules les administrations publiques peuvent se permettre. Il doit se déployer sur 25 ans, avec sur cette période des investissements s’élevant à 80 milliards de dollars et 20 000 emplois crées ou préservés (Gouvernement du Québec, 2011). La première phase quinquennale se terminera en 2016 et permettra de faire un premier bilan. Au vu des montants engagés, il aurait été intéressant d'avoir une rétroaction plus précoce. Au moins pour la première phase.

L’ampleur était telle qu’il était prévu de constituer une société pour en gérer les retombées et offrir un guichet unique aux entreprises qui souhaitent investir. Société qui n’a toujours pas vu le jour, et pour laquelle un nouveau projet de loi vient d’être déposé. (Projet de loi n°11 : Loi sur la Société du Plan Nord, séance de l’Assemblée Nationale du Québec du 30 septembre 2014).

Les enjeux sont en effet être nombreux:

  • Économiques: Cette politique prévoit la création d’infrastructures. Du réseau de transport (routes, amélioration des aéroports et des ports, création d'un port en eau profonde), et des réseaux de télécommunication. Elle prévoit l’exploitation des ressources naturelles (bois, eau, minerais, faune), et l’implantation d’entreprises. Des volets production agricole et tourisme sont également prévus.
  • Sociaux : Le respect des droits des populations autochtones, la santé, l’éducation (les taux de réussite scolaire sur ce territoire sont plus bas que la moyenne provinciale). Il faudra éventuellement corriger la différence de niveau de vie entre la population qui s’installera et la population existante. La création de nouveaux logements.
  • Environnementaux : Avec notamment l’impact de l’exploitation des ressources naturelles non renouvelables comme les minerais, et la protection de 50% du territoire. Il faut ici rappeler ici que le Canada possède 10 p. 100 des forêts du monde. Il a la plus vaste étendue de forêts certifiées du monde. Près de 42 p. 100 des forêts certifiées de la planète se trouvent au Canada. L'exploitation forestière est un des enjeux du développement durable.
  • Souveraineté: Puisqu’il s’agit de l’exploitation et l’occupation d’un territoire. Selon la Cour Suprême du Canada, l’existence de la propriété d’un territoire est établie par la démonstration de son occupation et de son utilisation régulière et exclusive.
  • Culturels: Bien que souhaité par Jean Charest, les projets de ce type sont encore peu nombreux.

Et l’on peut imaginer les attentes générées par les consultations au sein des populations concernées.

À ce jour …

Bon an, mal an, le Plan Nord poursuit toutefois sa route.

Les gouvernements se succèdent et le renomme selon leur humeur. Ainsi, nous aurons eu:

  • le Plan Nord du gouvernement Charest,
  • le Plan Nord pour tous  du gouvernement Marois
  • et le Plan Nord plus du gouvernement Couillard.

Mais, heureusement, tous semblent s’entendre pour le voir aboutir à défaut d’être en total accord sur le contenu. Et les investissements financiers devant être dédiés au Plan diffèrent finalement peu d'un gouvernement à l'autre.

En conclusion, nous sommes clairement en présence d'une politique qui est pleinement du ressort de l'État. Et que seul l'État a la capacité de mener. On peut cependant noter que les changements de ministre, de gouvernement, ralentissent considérablement ce projet.

Pour citer Jean Charest : « la continuité en politique est une condition nécessaire à la réussite des grandes politiques publiques » (intervention du 2 octobre 2014, ENAP).

Jessica Tornare

 

[i] Président du comité ministériel du Plan Nord : Pierre Arcand

Ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles et ministre responsable du Plan Nord

Vice-président : Geoffrey Kelley
Ministre responsable des Affaires autochtones

Membres

Stéphanie Vallée, ministre de la Justice et ministre responsable de la Condition féminine

Jacques Daoust, ministre de l’Économie, de l’Innovation et des Exportations

Pierre Moreau, ministre des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire

Yves Bolduc, ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport et ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science

David Heurtel, ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques

Dominique Vien, ministre du Tourisme

Robert Poëti, ministre des Transports

François Blais, ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale

Laurent Lessard, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs

Lucie Charlebois, ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse et à la Santé publique

Luc Blanchette, ministre délégué aux Mines

Jean-Denis Girard, ministre délégué aux Petites et Moyennes Entreprises, à l’Allègement règlementaire et au Développement économique régional

Références:

http://www.rncan.gc.ca/publications/statistiques-faits/1242#sec1

Projet de loi n.27 : Loi sur la Société du Plan Nord 

Projet de loi n.11: Loi sur la Société du Plan Nord

Site Plan Nord : http://www.nord.gouv.qc.ca/

Plan québécois des infrastructures 2014-2024 : http://www.tresor.gouv.qc.ca/infrastructurespubliques/planquebecoisdesinfrastructures/

Asselin, H. (2011). Plan nord, éducation et droit. Recherches amérindiennes au Québec, 41(1). 

Colloque Enjeux et gouvernance du développement des ressources en milieu nordique. (2012). Chaire de responsabilité sociale et de développement durable ESG UQAM.

Finances Québec. (2009), Plan Budgétaire et discours 2009/2010. 

Finances Québec. (2010), Plan Budgétaire et discours 2010/2011. 

Finances Québec. (2011), Plan Budgétaire et discours 2011/2012. 

Finances Québec. (2012), Plan Budgétaire et discours 2012/2013. 

Finances Québec. (2013), Plan Budgétaire et discours 2013/2014. 

Gouvernement du Québec. (2011), Plan Nord, Invest Québec. 

Institut de recherche et d’informations socio-économiques. (2012), A qui profite le Plan Nord ?

Lemieux, V. (2009). L'étude des politiques publiques. Les acteurs et leur pouvoir: Les Presses de l'Université Laval.

Martel, M. (2013), « Nord québécois. Une réponse à la pression mondiale sur les ressources naturelles » : 49e Parallèle, vol. 1, no 2, p. 38-41.

Secor. (2012), Évaluation des retombées économiques du Plan Nord.

 

Commentaires

  • Un super bon sujet d'analyse et d'observation de principes fondamentaux en A. P....Jessica

Les commentaires sont fermés.