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Quand l’allaitement devient un pourcentage, un objectif à atteindre.

Je tiens tout d’abord à préciser que je suis un homme.  Je suis aussi un heureux père d'enfants qui ont tous été allaités. Ce sujet qui peut paraître éloigné de mes préoccupations et pour lequel je suis loin d’être considéré comme un spécialiste, mérite tout de même que l’on si arrête quelques instants.

La préoccupation sociale sur l’importance de l’allaitement ne date pas d’hier. Au début du 20ème siècle, les médecins étaient préoccupés par le taux de mortalité infantile très élevé. Les mauvaises conditions de vies, le fait de donner de l’eau non potable et du lait non pasteurisé sont tous des facteurs qui ont fait augmenter, selon les chercheurs de l’époque, le taux de mortalité. Et ce taux est encore plus élevé chez les canadienne-françaises qui sèvrent rapidement le nourrisson suite à sa naissance. Des initiatives sont donc mise en place. Inspirée de la France, la première clinique « Goutte de lait » voit le jour en 1910 à Montréal. Leur objectif étant de faire l’éducation de la mère face à certains facteurs de risques et de promouvoir l’allaitement! (références tirées du mémoire de Mme Chantal Bayard, Les représentations sociales de l’allaitement maternel chez des femmes enceintes québécoises qui désirent allaiter)[1].

Personne n’oserait mettre en doute les vertus de l’allaitement. De multiples recherches prouvent les bienfaits de cette pratique pour l’enfant, autant au niveau physique que psychologique. Le gouvernement du Québec, conscient de ces bénéfices en a d’ailleurs fait découler des objectifs :

 

Un objectif général  et des objectifs intermédiaires ont été définis. L’objectif général est le suivant :

 Que d’ici 2007, l’allaitement maternel  la sortie des services de maternité augmente  85 % et qu’il soit de 70 %, 60 % et de 50 % respectivement aux deuxième, quatrième et sixième mois de la vie de l’enfant, et de 20 %  [2]

 

Il y a donc eu la naissance d’organismes vouées au soutien des mères qui allaitent (Mouvement allaitement Québec, Infact, la ligue la lèche, etc…). Il y a eu des programmes instaurés dans les CSSS tel que : Initiative des amis des bébés, qui encadrent et soutiennent les CSSS voulant promouvoir l’allaitement. Il y même une prestation spéciale d’allaitement pour les femmes étant sur l’assistance sociale d’un montant de 55$ mensuel qui répondent aux critères d’éligibilité.[3]

Évidemment, dans un souci d’économie à long terme sur les soins de santé prodigués à des enfants pour qui l’alimentation aurait été déficiente, il peut y avoir justification. Des études ont d’ailleurs été faites à ce sujet. Mais attention, je parle ici d’enfants avec des carences au niveau des nutriments de bases et non pas des enfants ayant reçus une alimentation artificielle adéquate. Mais est-ce que les comparaisons ont été faites au niveau des coûts? Est-ce que tous les programmes et efforts mis en place justifient les dépenses en communication, en prestations, en personnel etc?

Également, si l’allaitement permet une meilleure protection de l’enfant faces aux divers agents pathogènes externes, la santé publique ne peut qu’y trouver son compte.

Mais qu’en est-il du taux de dépression post-partum causé par la pression sociale associée à l’allaitement? Est-ce que les effets de cette pression sociale et gouvernementale ont été mesurés dans les causes de la dépression?  Qu’en est-il des coûts sur le système de santé?

J’ai appris uniquement au troisième enfant les raisons néfastes de donner de la nourriture solide  à un enfant trop jeune. Pourquoi? Parce que dans les cours prénataux, beaucoup de temps est passé sur l’allaitement, trop peu selon moi sur la nourriture artificielle.

J’ai vu ma conjointe se faire harceler par une infirmière à la naissance de mon premier enfant, en soulignant l’importance d’allaiter et de bien le faire. Reprendre le bébé et le positionner en manipulant ma conjointe comme un biberon et non une personne. Pourquoi? Peut-être parce que mon hôpital était un « ami des bébés allaité »…

Et qu’en est-il de toutes celles qui souffrent le martyre pour offrir « ce qu’il y a de mieux » à leur enfant? Voir des mères pleurer de douleur parce que leurs seins les font souffrir. Entendre la détresse d’une amie dont l’enfant ne prend pas assez de poids car elle  « ne fournit pas assez de lait » . Est-ce que l’objectif provincial vaut ce désespoir?

Au Québec en 2009-2010, selon Statistiques Canada, 82.7% des mères  ont allaité ou essayé d’allaiter.[4]  L’objectif est quasiment atteint. Mais à quel coût ? Je n’ai malheureusement pas trouvé de chiffres.

Nous nous sommes dotés d’un État impliqué. D’un État qui soutient ces citoyens, qui connait ce qui est bon pour eux et qu’il leur offre ce qu’il y a de meilleur. Mais jusqu’où irons-nous en tant que société ? Est-ce que les femmes qui donnent le biberon devront un jour se cacher ?

Je ne suis pas contre l’allaitement, ni contre l’alimentation artificielle. Je suis uniquement contre le fait qu’un choix tellement personnel soit autant orienté par l’État.

Finalement, dans un principe de reddition de compte, quels sont les avantages financiers à une telle démarche par rapport aux montants investis depuis le début des années 2000? Est-ce que nous sommes encore autant à risque d’un haut taux de mort infantile qu’en 1910 ? Ne devrions-nous pas repenser notre façon de faire ?

Commentaires

  • Il y a aussi des enjeux délicats qui ne doivent pas être négligés dans le débat public et le rôle de l'État de droit en cette matière et dans d'autres.
    Bravo pour avoir osée ...ce sujet délicat mais réel !

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