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Le futur pont Champlain... à quel prix?

Mise en contexte

Malgré son relatif jeune âge, le pont Champlain se fait vieux.  Puisque la réfection ne fait plus partie des options, un nouveau pont sera construit… mais à quel prix?

D’ores et déjà, nous savons que la construction du nouveau pont Champlain sera un projet en partenariat public-privé, communément appelé PPP.  Par ailleurs, le gouvernement fédéral souhaite qu’un système de péage y soit installé.  « Pas de péage, pas de pont » dit son représentant.  Ce que le gouvernement provincial et l’administration municipale refusent catégoriquement.

L’objectif de ce texte n’est pas de faire le procès d’un PPP, ni de se demander si le pont pourra être considéré comme un bien public considérant l’éventuel péage.  Il identifiera plutôt quelques impacts du principe d’utilisateur-payeur, et les conditions qui pourraient en favoriser l’instauration, le cas échéant.

Le pont Champlain : juridiction fédérale ou provinciale

Une spécificité de l’article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 fait en sorte que les ponts Champlain, Jacques-Cartier, et la moitié du pont Mercier sont de compétence fédérale, tout comme la voie maritime du St-Laurent par-dessus laquelle ils passent.  La société « Les ponts Jacques Cartier et Champlain incorporée » a d’ailleurs été constituée pour assurer la gestion, l’entretien et le contrôle de ces ponts.

Le principe d’utilisateur-payeur et ses impacts

Selon le grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française, le principe de l’utilisateur-payeur est défini comme un principe selon lequel l’utilisateur doit assumer les coûts internes et externes reliés aux ressources, aux infrastructures et aux services qu’il utilise.  Bien qu’utilisé dans des contextes variés, il est souvent question du principe de l’utilisateur-payeur lorsqu’on veut financer la construction ou l’entretien d’infrastructures (par exemple en instaurant un tarif pour passer sur un pont ou sur une autoroute).

Dans la situation qui nous intéresse, nous sommes toutefois en droit de nous demander : si le péage est instauré sur le pont Champlain, qu’en sera-t-il de Jacques Cartier?  Et qu’adviendra-t-il des autres ponts qui ceinturent l’Ile de Montréal?  Doit-on « traiter » les utilisateurs de ponts fédéraux différemment de ceux des ponts provinciaux?  On voit poindre dans ce cas une inégalité, une iniquité dans le traitement de ces usagers.  Imaginons le scénario : certains citoyens de la rive sud, pour circuler de leur domicile à Montréal, devront payer.  Mais pour se rendre à Montréal, ceux de la couronne nord n’auront rien à défrayer.

Évidemment, il y a aussi une question de coût pour l’utilisateur.  Certes, il faut rentabiliser la construction, mais il y a une limite à faire payer l’automobiliste qui franchira le nouveau pont.

Et si les citoyens boudaient le nouveau pont?  Certaines villes et arrondissements, d’un côté comme de l’autre de la voie maritime, en subiraient assurément des contrecoups économiques.  Par ailleurs, on pourrait aussi croire qu’il y aurait un achalandage accru sur les autres artères permettant d’accéder à l’Ile…

Parlant d’achalandage, est-ce que l’ajout d’un péage pourrait créer un ralentissement de la circulation?  Voire même être une cause de congestion?  La nécessité pour l’usager de ralentir à l’approche du péage a des impacts négligeables si le flot de véhicules est limité, mais rappelons simplement qu'actuellement, avec près de 60 millions de véhicules annuellement, le pont Champlain est le plus achalandé au pays.

Finalement, on pourrait aussi se questionner sur l’effet de l’instauration d’un péage sur le transport en commun, le transport de marchandises, les taxis, etc.  Qui en paiera la note?  L’utilisateur?  Le citoyen?

Et si une partie de la solution se trouvait dans l’histoire…

Au début des années 1940, des citoyens habitant sur les rives nord et sud du Saint-Laurent au centre du Québec, demandaient aux gouvernements du Canada et du Québec de construire un pont pour permettre le développement de la région.

Dix ans plus tard, à la suite d’une longue série d’activités et une importante mobilisation citoyenne, la Corporation du pont de Trois-Rivières voyait le jour.  Cet organisme a pu être fondé grâce à une permission particulière accordée par le gouvernement fédéral.  Par cette entente, le gouvernement fédéral autorise la corporation à prendre en charge la construction du pont, qui débute en 1964.

C’est finalement en décembre 1967 que le pont est inauguré et ouvert à la circulation.  De juridiction provinciale, le pont Laviolette constitue le seul lien routier entre les deux rives du fleuve Saint-Laurent, entre Québec et Montréal.

Quel lien cette histoire peut bien avoir avec le pont Champlain?  Tel que vu précédemment, l’instauration d’un péage aura des impacts certains, et ce, à différents niveaux.  Relevant du gouvernement fédéral, il revient à ce palier de gouvernement de prendre les mesures pour remplacer le pont Champlain, mais est-ce que le travail concerté des différents partis pourrait être envisagé?  De nombreux acteurs sont déjà mobilisés, pourquoi ne pas les faire œuvrer ensemble, et efficacement?

Sur la base de l’histoire du pont Laviolette, nous constatons que l’entente particulière est possible.  Ainsi, bien que nous soyons 50 ans plus tard, nous croyons que le gouvernement fédéral gagnerait à discuter avec les partis concernés, et élaborer cette entente particulière qui favoriserait la réalisation du projet tout en répondant aux besoins de tous.

Renée Guillemette

 

Commentaires

  • À partir de l'actualité on peut y "déterrer" des principes fondamentaux de l'administration publique et ...des enjeux qui en découlent !!
    On examine ça de près .
    Bravo pour avoir osée !

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