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#2 Simon PASSO, Les conceptions culturelles libérales (Canada) et républicaines (Québec) se passeront-elles des frictions un jour en terre québécoise?

Les origines des configurations particulières du rapport État/société qui prévalent dans les diverses sociétés tiennent à la trajectoire des sociétés et aux rapports de force qui y ont joué historiquement (côté, 2011 : 46). Le Québec a bien réagi aux exigences de la mondialisation et à la révolution technique estime Brault (2009) dans la première illustration des notes de cours de la séance 13 : l’État et le modèle québécois. Ce que ProfTrudel traduirait en ces termes s’il était d’avis avec Brault : «Les Gaulois d’Amérique ont su harnacher la mondialisation à leur profit jusqu’en 2009». Cependant, le maintient de cette performance nécessite des stratégies commerciales affinées tout autant qu’il ne se passerait pas  des frasques inhérentes aux idéologies qui opposent très souvent le modèle québécois, par essence socio démocrate, au libéralisme canadien de rôle social résiduel-providence (Côté, 2011 :45). Afin de jeter un regard critique sur les meilleures perspectives cohérentes aux convictions (Dufour, 2011 : 22) québécoises, il serait utile de lorgner les valeurs prioritaires de chacun des modèles en jeu sur le territoire québécois. En d’autres termes, pour mieux comprendre  les forces confrontées en terre québécoise,  je me pose les questions qui suivent : quelles sont les inspirations prioritaires originelles (valeurs de base) du libéralisme? Quelles sont les inspirations prioritaires de base du républicanisme? Quelles sont les inspirations convergentes entre les deux? Quelles sont les inspirations divergentes des deux champs idéologiques? Peuvent-ils cohabiter avec franchise sur un même territoire? Comment le Québec pourrait-il tirer son épingle du jeu? Voilà les questions auxquelles mes modestes réponses, je l’espère,  tenteraient de relancer le débat.

Inspirations idéologiques du libéralisme

Le modèle du libéralisme de tradition anglo-saxon appliqué aux USA, en Angleterre, au Canada et en Australie, est d’abord et avant tout conforme aux traditions du libéralisme pluraliste favorable au multiculturalisme et opposé à la souveraineté nationale. Il accorde moins d’importance civique à la nation. Il priorise les libertés individuelles définies par les intérêts et la propriété privée; liberté dite « négative ». Il s’assure de garantir la liberté naturelle de l’individu et de prémunir l’individu de tout abus de la part de l’État. Le respect de la propriété, des lois et du libre commerce y est assuré par l’État. « Il n’accorde pas de privilèges à des églises particulières. La communauté politique est d’abord un rassemblement de sujets de droit et la liberté est définie en ses termes » (Courtois, 2010 : 286).  Il définit ainsi la neutralité en matière religieuse, reste favorable à toute confession et à un État comme entreprise multinationale.

Inspirations idéologiques du républicanisme

Le modèle du républicanisme est davantage républicain comme son nom le dit et attache un haut prix à la souveraineté nationale (communauté politique nationale et au citoyen). Cet idéal de la « communauté citoyenne » table sur la liberté du citoyen fondée sur sa participation à la communauté politique nationale. La liberté y est plus politique et indissociable du statut de citoyen. Il est favorable  à l’unité culturelle opposée à l’ethnie et se base sur l’école républicaine pour former tous les citoyens de la nation, natif ou non. C’est ainsi que parlant du modèle québécois, Courtois  (2010 : 293) souligne que la politique interculturelle peut être interprétée comme encourageant l’échange interculturel au niveau des cultures premières (culture d’origine de l’immigrant) et la convergence culturelle au niveau de la culture seconde (acquise spécialement à l’école). Le républicanisme se démarque aussi par l’importance qu’il accorde à la démocratie, à l’autodétermination, dans le diptyque « démocratie libérale »

Trait commun actuel entre le libéralisme du Canada et le républicanisme du Québec

Les deux modèles croisent actuellement les deux composantes idéologiques de la démocratie libérale. Ils sont tous des modèles hybrides et diversifiés issus des valeurs de base du libéralisme et de la démocratie. La véritable différence réside dans l’attachement aux points des départs, dans le degré ou dans l’intensité volontaire d’inspiration (Mercier, 2011 : 475).  Tous sont ouverts à l’ethnicité, dont aucun n’est ouvert à ethnicité fermée comme l’apparence peut laisser croire. Les deux ne limitent pas l’immigration en appliquant exclusivement le droit du sang à la citoyenneté comme le Japon et l’Allemagne dans le passé. Les modèles canadiens et québécois se soucis de l’intégration des immigrants tous les deux aussi, et prennent au sérieux la culture d’origine des immigrants (culture première) et de la culture seconde à quelque différence prête.

 

 

Ce qui distingue le libéralisme du Canada et le républicanisme du Québec

Défini à partir de la Révolution tranquille et la Loi 101, le modèle québécois est orienté essentiellement par la conjonction de la Charte de la langue française et la politique de « convergence culturelle » (Courtois  2010 : 289) alors que le modèle du Canada est multiculturel. Ainsi sur le plan culturel et identitaire, le Canada est défini comme mosaïque alors que le Québec est épars et favorise l’intégration à la communauté politique nationale, intégration à la fois culturelle et civique. Le Québec républicain insiste sur la liberté « positive », l’intégration culturelle à la nation québécoise, avec la convergence culturelle et la laïcité alors que le Canada insiste sur la liberté « négative » et reste libéral et « court whig », neutre en matière religieuse. De fait, selon les termes de Courtois  (2010 : 287) les institutions canadiennes  encouragent le maintien de l’identité ethnique issu de l’immigration, et le Québec en revanche, encourage la convergence culturelle et la participation civique à la nation québécoise. 

Défis et perspectives du modèle québécois

Les contrastes idéologiques sus évoqués permettraient difficilement un jeu franc entre socio démocrate québécoise et partisans du libéralisme Canadien. Le maintien du multiculturalisme au Canada aura toujours des effets sur le Québec qui peut choisir ses immigrants sans pour autant leur octroyer la citoyenneté (responsabilité fédérale).  Ainsi les frictions seront toujours de mise sauf si miraculeusement le Québec parvient à établir à long terme sa propre citoyenneté. Par ailleurs beaucoup de multinationales et de services clés installés en terre québécoise obéissent plutôt à la charte fédérale favorable au libéralisme poussé et au multiculturalisme.  Face à la suprématie du modèle canadien en territoire québécois (conséquence de la constitution de 1982), et aux difficultés en matière de francisation, difficultés accrues à Montréal par le bilinguisme des services publics et parapublics, fédéraux et provinciaux, le modèle québécois rencontre les trois principaux défis que sont : difficultés de cohérence avec un conflit légal vis-à-vis du modèle canadien, défis culturels et défi linguistiques singuliers, liés à sa situation politique. La perpétuation de la nation québécoise est ainsi mise en rude épreuve avec de nombreuses invalidations des aspects de la loi 101. L’affaire du kirpan en est une autre illustration. Bien plus, ces faits ne démontrent-ils pas  que la nation québécoise a du mal à faire valoir ses choix démocratiques et de s’autodéterminer? La culture publique a été critiquée et considérée comme l’assimilation à la française. La survie de l’inter culturalisme et du modèle québécois face à la suprématie du multiculturalisme canadien en territoire québécois exige une forte  vigilance au niveau de la dynamique de francisation.

Le renforcement de  l’intégration des immigrants serait l’une des meilleures perspectives qui s’offrent au modèle québécois à moyen terme en deçà des luttes souverainistes qui pourraient revenir à l’ordre du jour et de manière plus efficiente à long terme. Il serait ainsi question essentiellement de renforcer la prédominance du français, de sélectionner une immigration plus francophile. Pour cela il vaudra mieux  renforcer l’implantation des consulats dans les pays francophones et d’y socialiser et franciser les potentiels immigrant avant la sélection. Cette proposition contradictoire à une certaine volonté de fermeture de ces consulats permettra d’affronter plus efficacement le recul de la langue française. Le défi démographique ne devrait pas se perdre de vue et il est utile de bien comprendre que la volonté des conservateurs de partager certaines ambassades avec la Grande-Bretagne peut plutôt participer au recul de l’immigration des francophones : y porter un regard attentif rendrait service à la culture québécoise. De même il faudra aussi bien voir quelles ambassades et consulats sont visés par la fermeture et le jumelage sous prétexte d’équilibre budgétaire.  Sinon l’équilibre budgétaire se fera-t-il au dépend du maintien du français comme langue nationale? L’application de la loi 101 aux institutions relevant du fédéral au Québec serait aussi une bonne idée, mais ce profitable combat est loin d’aboutir aux bons résultats tout comme l’idée de  soustraire le Québec à de la loi sur le multiculturalisme. Réviser les grilles de sélection à l’immigration afin de retenir les plus habiles sur le marché de l’emploi au Québec. Franciser davantage l’immigration à la source éviterait les pertes de temps et certaines dépenses aussi.

 

 

QUELQUES RÉFÉRENCES 

BRAULT, Simon (2009). Notes de cours : Principes et enjeux de l’administration publique, Rémi Trudel

COUTOIS, Charles-Philippe (2010). La nation québécoise et la crise des accommodements raisonnables; bilan et perspectives. Revue internationale d’études canadiennes, vol 42,  P. 283-306.

CÔTÉ, Louis (2011). Enjeux contemporains sur le plan social : concepts et évolution», dans Nelson Michaud et coll.  Secret d’État : Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains, PUL, p. 41-59.

DUFOUR, Christian (2011). Enjeux contemporains sur le plan social : concepts et évolution», dans Nelson Michaud et coll.  Secret d’État : Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporains, PUL, p. 41-59.

MERCIER, Jean (2002). L’administration publique : de l’école classique au nouveau management public, Sainte-Foy, PUL, 518p., ISBN 2763778313.  

MICHAUD, Nelson (dir) et coll. (2011).  Secret d’Etats : Les principes qui guident l’administration publique et ses enjeux contemporain, PUL, 810p.

 

 

 

 

 

Commentaires

  • Bien reçu Simon. À la correction maintenant. Bonnes suites. Prof

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