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#2 - Démocratisation des systèmes de santé dans les pays du Maghreb

Hanafi Tessa - 10 décembre 2012

Introduction

L’accès aux soins de santé est non seulement un droit universel, mais également un levier de développement socioéconomique. À l’instar de l’Éducation, la Santé constitue un secteur névralgique, une espèce de baromètre indiquant si la direction empruntée par un État correspond à une vision de développement à long terme, dont le souci est le bien-être global de la population, ou bien à un laissé-allé des autorités publiques et des pouvoirs politiques peu soucieux du « pouls populaire ».

Le système de santé dans l’État de droit

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit le droit à la santé en ces termes : «Le droit à la santé suppose que les pouvoirs publics créent des conditions telles que chacun puisse jouir du meilleur état de santé possible. Ceci implique notamment l’existence de services de santé, des conditions de travail sûres et saines, un logement adéquat et une alimentation nutritive». Autrement dit, un État, par l’entremise de son appareil administratif, doit réunir toutes les conditions favorables à une construction d’un système de santé inclusif, juste, démocratique et efficace. Non seulement, la santé est un droit universel, mais le Maroc, l’Algérie et la Tunisie ont consacré dans leur Constitution respective le droit des citoyens à la protection de leur santé. Si, en théorie, la problématique ne se pose pas, c’est, en revanche, dans la pratique où les besoins se font sentir.

Un bref aperçu des systèmes de santé maghrébins

Bien qu’à l’origine l’idée abondait dans ce sens, les systèmes de santé des pays maghrébins présentent d’importantes lacunes en termes d’accessibilité aux soins et d’efficacité organisationnelle et opérationnelle. Ces systèmes, dont les structures sanitaires sont héritées de l’époque coloniale, présentent les mêmes défis : une insuffisante couverture hospitalière pour des superficies considérables (les trois pays totalisent 2,990 millions de km carrés pour 80 millions d’habitants) , une organisation des services de santé qui se cherche, une formation médicale et paramédicale déficientes et chaotiques, des services de proximité aux citoyens qui sont largement en deçà  des attentes, des ressources financières et matérielles inégalement réparties, une gestion de la santé publique défaillante, etc. Au cours des années 70 et 80, d’importantes réformes ont été menées dans chacun de ces pays dans la perspective d’assurer une universalité des services de santé. Aujourd’hui, les populations incriminent les autorités publiques dont elles dénoncent l’inertie, l’impuissance, le manque de transparence et la corruption. Ces États sont, à l’heure actuelle, aux prises avec une série d’enjeux transitionnels d’ordre démographique, organisationnel et, surtout, démocratique.

Ce bref état des lieux  laisse à penser que nous sommes en présence de systèmes «en transition sanitaire» confrontés à la fois à des risques et à des défis qui leur sont communs mais dont une réponse collective et harmonisée, dans le cadre d’une démarche d’intégration régionale, tarde encore s’imposer.

Transition démocratique et reddition de compte

Pour palier à ces problèmes, il est nécessaire, d’abord, d’influer sur les politiques en y plaçant l’enjeu de la santé au cœur des préoccupations de développement. En faire une opportunité de démocratie, avec une plus grande participation des usagers et des professionnels à la gouvernance de la santé publique. Une transition organisationnelle qui implique une réduction des inégalités dans l’accès aux soins, une plus grande régulation entre secteur public et privé et la mise en place d’un système de financement transparent et efficient. Ce dernier point, particulièrement, est crucial, car il s’agit pour les pays maghrébins de considérer une réorganisation structurelle de leur système de financement. Le rendre plus universels, plus équitable, plus solidaire, moins opaque. Une étude menée récemment par un institut de recherche méditerranéen, l’Institut de prospective économique du monde méditerranéen(IPEMED), décrivait le financement de la santé publique dans ces pays par une faible part du PIB consacrée à la santé (autour de 5 % ou 6,4% en Tunisie contre 10 % en Europe), par une part trop importante du financement de la dépense de santé assurée par les ménages (autour de 40 %) et par un recours croissant à la médecine privée, plus chère et peu (ou pas) remboursée. Il convient, au regard de cette situation, de faire le constat malheureux d’un accès aux soins de santé très inégalitaire.

Dans ces conditions, le citoyen-usager a un contrôle bien limité, quasi nul, sur la gestion des deniers publics en matière de santé publique. Une pleine participation de ce dernier dans la gouvernance du système, forcerait les autorités publiques responsables à lui rendre comptes de la gestion qu’ils font des ressources disponible, dont il est le principal bénéficiaire.

Commentaires

  • Bien reçu Hanafi. Un sujet qui passionne et qui n'en fini plus d'être l'objet de nos analyses. Bonnes suites Hanafi. Prof

  • Démocratisation des systèmes de santé dans les pays du Maghreb

    Souvent, trop souvent, les médias se concentrent sur les problèmes de notre système de santé. Cette couverture médiatique doit certainement avoir un effet démobilisant sur tous ces employés qui, somme toute, font un travail fantastique.
    Certes, nous ne pouvons passer sous silence les difficultés de notre système de santé. Plusieurs groupes concernés cherchent des solutions. Le lobbying fait son travail et les enjeux financiers sont très importants. Près de la moitié des deniers publics sont consacrés à la santé.
    La lecture de cet article remet en perspective l’importance de l’accès démocratique au soin de santé. En privatisant des pans de notre système, nous allons favoriser l’apparition de deux classes d’usager : les riches et les autres. Le développement des services se concentrera autour de la clientèle plus riche. La qualité des soins favorise la santé, c’est trivial. La santé est un facteur important de l’enrichissement des sociétés. Nous venons d’amorcer un cercle vicieux augmentant le gouffre entre deux classes d’une société.
    L’accès universel aux soins de santé serait-il un droit fondamental?

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