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HV-Les études : investissement ou endettement? En toute franchise...

Le mouvement de grève généralisée des étudiants contre la hausse des droits de scolarité prend de plus en plus d’ampleur. La présente session académique pourrait même être compromise. Personnellement, ce ne sera pas la première fois que je subirais les remous de la grève… Il n’y a pas longtemps, je suivais un cours du soir à l’Université de Montréal.  Une grève généralisée prolongée des étudiants avait annulé les cours pour près ou plus de la moitié de la session.  Lorsque les cours avaient repris – quelques mois plus tard ­–  on m’avait donné le choix entre reprendre les heures de cours manqués, ce sur une période s’étirant évidemment au-delà de celle de la session régulière, ou la possibilité tout simplement d’annuler mon inscription au cours.  La prolongation des cours n’était pas du tout compatible avec mes engagements professionnels, j’ai dû annuler.  Bien que les droits de scolarité m’aient été remboursés intégralement, ce fut une session académique de perdue.  En effet, jongler avec un travail à temps plein qui requiert presque sur une base hebdomadaire, des couchers à l’extérieur de la ville, la décision de s’inscrire à un cours du soir ne relevait pas d’un pur caprice.

Rassurez-vous, je ne suis pas restée découragée longtemps puisque me voilà inscrite aux études supérieures, à l’ÉNAP!  Soyons francs, mis à part les quelques illuminés qui se disent inscrits à la prestigieuse (!) dans le but d’enrichir leur culture, nous sommes tous ici, d’abord et avant tout, pour augmenter nos chances d’avancement professionnel, ce qui améliorera du coup notre niveau de vie!  Autrement dit, on est tous ici pour investir dans son avenir.  Et lorsqu’on parle d’investissement, il n’est pas question de lésiner sur la qualité.  On  veut un enseignement de qualité.  On veut des institutions qui rayonnent pour la qualité de leurs recherches.  Bref, on veut des diplômes valablement reconnus. La hausse des droits de scolarité, c’est dans cette optique là. C’est le corollaire. Et si les étudiants sont appelés à contribuer, ça va de soi puisqu’ils sont les premiers à en profiter.  J’entends déjà les commentaires de certains :  « facile à dire pour les professionnels à temps plein qui étudient à temps partiel, votre situation financière n’est pas précaire».  Oui, aujourd’hui, je suis professionnelle et je travaille à temps plein mais quelques années auparavant, j’étais étudiante à temps plein et comme la plupart, obligée de survivre de prêt étudiant en même temps que j’occupais un emploi à temps partiel.  Oui, j’ai bien écris survivre car étudier à temps plein veut dire faire des sacrifices considérables: pas de vêtements de marques, pas le dernier modèle de laptop, pas de cellulaire, pas de café et muffin Tim’s le matin ni aux pauses, pas de restaurant, bref, aucune dépense inutile –  pas de vie en somme!  Et mes parents ne pouvaient pas m’aider non plus.  Était-ce difficile? Je mentirais si je répondais non mais aujourd’hui j’occupe un emploi où je me réalise, lequel m’offre aussi des conditions sociales raisonnables ainsi que des possibilités intéressantes.  Mon investissement s’est avéré fructueux – ou pour utiliser le terme cher des étudiants grévistes - mon endettement s’est avéré justifié. Je ne suis pas l’exception, loin de là.  Mon conjoint ainsi que de nombreuses personnes de mon entourage ont suivi le même cheminement. Tous ont été ou sont toujours endettés mais aucun ne regrette d’avoir investi dans les études. Preuve encore convaincante : plusieurs poursuivent des études en cours du soir.

L’endettement ne touche pas uniquement les étudiants ou les plus démunis.  Pour les futurs entrepreneurs qui voudront démarrer leur entreprise, ils devront emprunter des fonds.  Pour les futurs acquéreurs de propriété, une hypothèque devra être envisagée.  Des sacrifices sont inhérents à tous les projets de vie, qu’ils soient personnels, familials ou professionnels.  Dans le  contexte socioéconomique actuel,  les choix seront difficiles.  D’ailleurs, aujourd’hui, je me prive toujours de la plupart des éléments dont je me privais lorsque j’étais étudiante à temps plein.  Pourquoi? Mon conjoint et moi songeons à fonder une famille alors des économies – des choix, des sacrifices – s’imposent naturellement.  Des étudiants qui suivent le même cours que moi, à l’ÉNAP, ont des enfants, travaillent à temps plein ou partiel, certains habitent même très loin de la métropole.  Cela ne les a pas empêchés pour autant de sacrifier temps et argent pour entreprendre des études supérieures.

Dans un autre ordre d’idée, et pas le moindre, je travaille dans le domaine du droit de la santé - non pas pour un organisme gouvernemental, bien au contraire! – pour un organisme privé à vocation communautaire qui souvent dénonce les décisions gouvernementales.  Force est de constater que la réalité sociodémographique actuelle du Québec, de même que le contexte économique national ­– et mondial – ne permet pas la pleine réalisation de l’État Providence qui ne peut tout seul subvenir à tous les besoins. Lorsque les dépenses sont inévitables,  tout le monde doit y mettre du sien.  Je comprends mal que certains se contentent de blâmer les générations précédentes au lieu de se retrousser les manches; aînés ou jeunes, pauvres ou riches, nous formons tous la société d’aujourd’hui.  S’il fallait que j’adopte cette attitude dans mon travail quotidien, je clamerais le fait que les aînés en centre d’hébergement grugent le gros de notre budget du secteur santé.  La solidarité étudiante, je comprends mais la solidarité sociale, je supporte. La hausse des droits de scolarité mise de l’avant par le MELS qui se veut graduelle (s’échelonnant sur une période de de cinq ans) afin justement de tenir compte des besoins des étudiants, n’est pas démesurée. Au contraire, maintenir le gel des droits de scolarité ne peut que conduire, éventuellement, à des mesures austères. Quant à moi, la décision du gouvernement est responsable et a aussi pour objectif de responsabiliser. Soulignons que des mesures afin d’assurer l’accessibilité aux études ont été envisagées (http://www.droitsdescolarite.com/fr/accessible.php).  Certains pourraient à nouveau parler d’endettement encore plus important.  Pour ma part, je préfère parler d’investissement davantage réfléchi dans son avenir. Aller à l’université, c’est faire un choix personnel; c’est d’abord, celui de contribuer à son propre avenir, pour ensuite être capable de contribuer à celui de la société.  C’est faire le choix d’accepter de faire des sacrifices aujourd’hui pour un avenir plus prometteur, pour tous.  C’est aussi celui de bien choisir son programme de formation en fonction des objectifs visés et d’être responsable face à ses choix.  J’ai complété avec succès un premier baccalauréat avant de prendre la décision de changer de parcours et d’en compléter un autre.  Alors être endettée, je sais très bien ce que cela implique.

Mon opinion ne se veut pas un manifeste contre le mouvement gréviste étudiant. Je ne suis   pas non plus membre du Mouvement des étudiants socialement responsables du Québec. Ma formation de juriste apprécie et encourage au contraire la liberté d’expression.  Je désirais simplement vous exposer un portrait d’étudiant différent de celui généralement véhiculé dans les médias ces temps-ci. Toujours en toute franchise, entre rédiger deux dissertations et écrire un blogue, disons que le professeur a réussi à me convaincre de m’exprimer haut et fort!  Au plaisir de lire vos répliques.

H.V.

Commentaires

  • Petite parenthèse pour amorcer mon commentaire :
    «Le Québec est la province qui finance le plus ses universités. Il faut que les étudiants fassent plus leur juste part », a dit M. Bachand pour justifier la hausse des droits de scolarité.
    Une citation en deux phrases complètes (du point de vue grammatical) dont l’une ne devrait pas forcément être en opposition à l’autre. Je m’explique :
    Si « le Québec est l’une des provinces qui finance le plus ses universités », cela devrait être une source de fierté pour le Québec et peut-être aussi pour Monsieur le Ministre. Quant aux étudiants, ils font déjà leur juste part. Les étudiants « étudient » (C’est leur job !) pour rendre le Québec encore meilleur, augmenter l’effectif de diplômés universitaires et donc, un Québec plus instruit et plus à même de relever les défis d’un monde résolument tourné vers les sciences et la recherche.

    Croyez-moi, en optant pour la Prestigieuse, je n’ai pas contracté de bourse, ni de prêt et donc, à la limite, je pourrais ne pas me sentir concerné par le débat. Mais, que voulez-vous ? « Chassez le naturel et il revient aux galops » !
    Je ne réagissais presque pas avant que cette tendance d’étudiants « socialement responsables », ne voit le jour !

    Je suis entrepreneur et je dois souvent, dans l’exercice mon entreprise, me procurer à crédit du matériel ou de la matière auprès de mes fournisseurs lesquels je ne peux payer tous et en même temps. Alors, comment je fais, en attendant de recouvrer mes clients ?
    Je fais ce que mes clients font : Faire attendre celui qui « chiale » le moins !

    Par extrapolation, le gouvernement Charest, n’a fait, au fait, que ce que je fais avec mes fournisseurs et ce que mes clients font avec moi : Se rabattre sur les plus faibles et ceux qui ne représentent pas de poids politique à prendre en compte ou qui ne sont pas capables de se constituer en lobbies suffisamment influents. Bref, ceux qui n’ont que leurs cris pour faire changer les choses.
    De tous les postes budgétaires susceptibles de combler les déficits, le gouvernement a choisi d’augmenter les droits de scolarité de la classe dont la situation financière figure parmi les plus précaires.

    Par ailleurs, tout le monde n’a pas l’intelligence de cibler sa formation pour que tous les sacrifices consentis puissent effectivement être considérés comme un investissement « rentable ». Pa plus que tout le monde n’est assuré de trouver un emploi si bien payé qu’il lui permettrait, non seulement de vivre décemment, mais également de rembourser sa dette.

    Par ailleurs, c’est par petits « morceaux » que les acquis se perdent et il n’est pas exclut que si tout le monde avale la pilule de l’augmentation des droits de scolarité en prosternant devant le prétexte de « l’étudiant socialement responsable », qu’il n’y ait pas d’autres mesures budgétaires qui nous attenderaient au tournant et qui viendraient alourdir les épaules (déjà alourdis) de « l’étudiant socialement irresponsable ».
    Sommes-nous si irresponsables et manquons-nous si gravement de jugement lucide pour comprendre tous les enjeux économiques et sociaux et vouloir que l’université demeure accessible à tous ?
    C’est en prévoyant l’avenir et en s’y attelant que l’on peut conjurer le sort réservé aux étudiants d’aujourd’hui (nous) et ceux de demain (nos enfants) : C’est cela la « solidarité entre étudiants » !
    Celle-ci n’est pas juste une solidarité qui lie les étudiants d’aujourd’hui entre eux. C’est celle qui nous lie, nous les étudiants d’aujourd’hui, aux étudiants d’hier qui ont luté pour que la qualité et de l’enseignement dont nous jouissons là là, soit ce qu’elle est.
    Rappelez-vous de toutes les grèves qui ont sévit depuis que l’université est université au Québec et qui ont entravé toutes les politiques qui jugeaient que l’enseignement supérieur était plus un privilège qu’un droit.
    Sans ces actions où les étudiants « militants » ou « fouteurs de troubles » (appelons-les comme bon il nous semblera maintenant) ont enduré des piquets dans le froid infernal de l’hiver, peut-on savoir qu’est ce qu’il serait advenu de nos universités ?
    La solidarité entre étudiants c’est aussi notre responsabilité envers nos enfants qui n’abandonneront pas les études dans les années à venir parce que les droits de scolarité seront si élevés qu’ils deviendront prohibitifs.

    Maintenant, si le gouvernement Charest (et je ne suis pas nécessairement contre ni Charest, ni son gouvernement) cherche à rendre plus socialement responsables certaines classes de la société québécoises, il n’à qu’à se tourner vers les entreprises qui profitent des énormes retours d’impôts et autres privilèges économiques et sociaux pour renflouer les caisses de l’État.

    Je suis père de deux enfants et plus est contribuable, donc faisant partie de la société québécoise dont on qualifie le fardeau de « lourd », mais je soutien qu’en tant que contribuable, je supporte ce fardeau quand il s’agit de garder l’enseignement supérieur accessible. C’est notre fierté… C’est notre devenir !

    R. hamrarras

  • HV.... Voilà un blogue qui nous appelle des dimmensions fondamentales et des principes de l'administration publique dans un État de droit. À la lecture plus attentive nous verrrons bien si le rappel de ces principes a traversé le mur de la théorie pour s'incarner dans la réalité. Les efforts
    appellent une analyse attentive.

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