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FF-Hausse des droits de scolarité: La juste part du plan

Les étudiants interpellent l'Administration publique québécoise pour dénoncer et s'opposer à la hausse des droits de scolarité prévue à partir de l'année scolaire 2012-2013: hausse de $325.00 de plus par année scolaire jusqu'en 2016-2017. Le Ministère de l'éducation justifie cette mesure dans le cadre d'un Plan de financement des universités québécoises qui vise "à assurer la qualité de l'enseignement et de la recherche et contribuer ainsi à maintenir la valeur du diplôme universitaire". Parmi les 11 000 étudiants qui sont entrés en grève officielle, certains s'expliquent: "on est assez endetté… on dit non à la hausse... parmi nous, certains n'auront plus les moyens de s'instruire". Au Ministère des finances, la position est ferme: Le contribuable québécois paie une fortune pour les universités. Ça lui coûte beaucoup d'argent. C'est un bon investissement. Mais les étudiants doivent faire leur juste part. Avec cette affirmation, il n'y a clairement plus de complexe du côté de l'État québécois moderne à affirmer que l'État-Providence s'est repositionné. Fort de l'appui quant aux frais imposés dans les autres provinces canadiennes, il réclame "la juste part" de tous : les étudiants universitaires québécois doivent assumer leur part.

Au carrefour du respect des fondements de la démocratie, l'Éducation considérée comme en étant un de ses piliers fondamentaux, de la préservation du patrimoine commun (en passant par le droit à la meilleure éducation possible du Rapport Parent jusqu'à une certaine forme d'identité nationale), des Lois du marché auxquelles se heurtent le cœur même de cette noble institution en quête d'oxygène, la juste part réclamée par l'État aux citoyens qui fréquentent l'enseignement supérieur trouve tout de même une forme de légitimité.  Sans faire de leçon d'économie, on peut affirmer qu'elle la trouve aussi dans la Loi de Wagner qui rappelle que l'accroissement des dépenses publiques est soutenu et aussi dans le simple principe de l’'indexation du coût de la vie.   

L’objectif de l’Administration publique demeure de satisfaire l’intérêt public. On exige encore d’elle que sa production de biens et de services soit de bonne qualité, et ce, à des coûts raisonnables1.

Plusieurs décrivent aujourd’hui l’Éducation comme un service qui tend à devenir un marché. L’enseignement supérieur s’inscrit aujourd’hui dans une concurrence entre les pays et les établissements et elle se fait de plus en plus vive. L’université doit être performante voir, offrir un service de manière efficiente, un produit à la hauteur des attentes de ceux qui la fréquentent. Par exemple, ces institutions doivent s’adapter à de nouvelles réalités, aux nouvelles technologies et échanges multiples qu’elles suscitent. Le marché de l’emploi impose aussi, à certains égards, ses exigences. Tout cela requiert l’apport important de nouvelles ressources et crée des enjeux auxquels doit nécessairement répondre l’Administration publique même si cette dernière rencontre de grandes contraintes. Entre autres, les Lois du marché, guidées par le profit et l’efficience, ne peuvent s’appliquer dans la gestion de l’État. Prenons par exemple le critère d’efficacité de l’Administration publique : il n’est pas le profit et elle doit répondre devant les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires à travers différents modes de contrôle ce qui diminue quelque peu son efficience2 .De plus, son rôle fondamental demeure inébranlable devant tout environnement ou réaménagement financier puisqu’il s’inscrit dans la constitution et la loi: ses missions sociales sont essentielles.

Pourtant, devant les étudiants, l’État livre la conclusion d’un bilan financier qui lui signale qu’il a rencontré les limites de sa capacité de payer, et ce, malgré l’importance de l’Éducation dans toute société et le manque à gagner cruel de $500 millions/an réclamé par le réseau universitaire québécois. L’administration publique est au service du bien public; le bien public étant généralement défini comme l’intérêt général. Mais la gestion des biens que les autorités doit assurer, repose aussi sur un certain consensus social : il faut que les autorités puissent s’appuyer sur des soutiens qui l’emportent sur des oppositions3. Une étude réalisée donne l’état récente de l’opinion publique à cet égard : 41% Investir en santé, 17% Diminuer l’impôt, 21% Rembourser la dette, 12% Investir en éducation4. Vu ainsi, d’autres aspects peuvent soudainement apparaître tout aussi fragiles dans notre société.

Le dégel des droits de scolarité en enseignement supérieur est le moyen choisi, par le pouvoir en autorité présentement au Québec, pour permettre aux universités, selon son Plan annoncé, de continuer à dispenser une haute qualité d’enseignement et offrir aux étudiants des programmes d’aide qui en assurent l’accessibilité à tous.

Certains pays scandinaves ont choisi depuis longtemps de préserver la gratuité de l’Éducation. Il faut souligner dans cette perspective que l’ensemble de la population y contribue fortement aussi depuis longtemps: l’État, malgré ses richesses, pratique un taux de taxation et d’imposition élevé : exemple pour la Finlande: Taxe à la consommation de 22% (17% pour la nourriture) et un impôt qui varie de 24.5 à 53.5% sans déduction personnelle de base5. Et, malgré les généreux subsides étatiques, il est fréquent que les étudiants se retrouvent lourdement endettés à la fin de leurs études, coût de la vie élevé oblige.

La hausse des impôts aurait pu s’imposer comme solution, parmi certaines. La hausse des droits de scolarité est la voie qu’a choisie l’État québécois et elle fait appel au citoyen responsable. C’est d’ailleurs cette démonstration qui constitue son plus grand défi parce qu’elle le renvoie à l’ensemble de ses devoirs et que l’Éducation à rabais n’est pas une option. Cette voie  impose à l’État, par le fait même, d’immenses responsabilités auxquelles les candidats et tous les étudiants de l’enseignement supérieur seront en droit d’en exiger les acquittements. L’enjeu crucial de cette hausse est qu’elle peut constituer un frein financier, une barrière économique à la porte d’entrée de l’université (pour la classe moins nantie et moyenne de la société). L’Administration publique au pouvoir devra se démarquer dans la mise en place d’un système d’aide financière encore plus efficace (l’étudiant et sa famille, doivent pouvoir prévoir à long terme, dès le seuil d’entrée, le coût de l’éducation et les modalités de remboursement dans le plan de vie après études) et se devra de corriger sur le champs les failles présentes dans le soutien apporté aux étudiants et à leurs familles. Pour être conséquent, l’État doit reconnaître que cette solution vient de trancher le débat sur la querelle entre prêt et subvention comme moyen d’apporter une aide financière: avec une hausse des droits de scolarité, elle se doit  d' élargir les avantages à ces deux modes. Pour assurer l'accessibilité à tous, et la rétention des étudiants jusqu'à l'obtention du diplôme, elle doit:

1)    Englober les Prêts aux étudiants et non seulement les Prêts et Bourses pour les avantages fiscaux de même que la période de grâce accordée pour les frais d’intérêt sur les prêts;

2)    Élargir le crédit d’impôt pour frais scolaire au parent et conjoint et y inclure les manuels et outils informatiques;

3)    Le soutien à l’étudiant, sa famille ou au conjoint doit être plus flexible : si le revenu de l’étudiant est peu élevé, transférer les crédits inutilisés à un parent ou un conjoint;

4)    Pour une meilleure répartition des revenus pendant les études, un crédit d’impôt remboursable;

5)    Remettre en vigueur le programme de prêt garanti pour l’achat d’un ordinateur;

La hausse exigée est lourde : elle ne doit pas servir à payer un déficit. L’État québécois devra se tourner vers d’autres acteurs responsables pour remplir cette partie.

Si, dans notre société québécoise, un seul étudiant devait lever la main pour dénoncer qu’il n’a pas eu accès à l’enseignement supérieur, malgré ses aptitudes et sa volonté, nous comprendrions dès cet instant que l’État québécois moderne a échoué dans sa mission fondamentale d’assurer l’égalité dans l’accès des droits, et parmi eux, l’accessibilité aux études. Cet État doit démontrer que dans le respect des droits, et des traditions qui la définissent, elle cherche ainsi à agir de façon responsable, et fournir la juste part liée aux pouvoirs et devoirs qui lui incombent.  Et pour s’en assurer, l’étudiant, à partir de ses associations et ses fédérations devra être bien présent et attentif à l’heure de la reddition des comptes.   

Étudiante FF, ENAP

 

1,2. Mercier, Jean, L’administration publique – De l’École classique au nouveau management publique, Les presses de l’Université Laval, 2011;

3. Tremblay P.P, L’État administrateur, modes et émergences, Sainte-Foy, Presses de l’université du Québec, 1997;

4. Lachapelle, Guy, Le processus budgétaire au Québec, Presses de l’université du Québec, 1999;

5. Malouf, Pierre.K, Pour un Québec scandinave, The Métropolitain, 28 mars 2010.

 

Commentaires

  • Psudo FF. Voilà un blogue de la modernité qui appelle des dimmensions fondamentales et des principes de l'administration publique dans un État de droit. À la lecture plus attentive nous verrrons bien si le rappel de ces principes a traversé le mur de la théorie pour s'incarner dans la réalité. Les efforts
    appellent une analyse attentive.

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