Le paradoxe de l’économie collaborative : quand collaboration peut rimer avec viciation et dépréciation.
Les économies collaboratives ont toujours existé. Notre ère d’industrialisation a été précédé par l’économie d’artisanat où, l’un, bon avec la menuiserie, fabriquait les chaises pour ses Co-villageois, l’autre s’occupait de faire plus de pain, et se troquait le tout. Aujourd’hui, l’État et l’économie capitaliste ont remplacé ces types d’activités, mais un retour en arrière est-il possible ?
Il arrive que les citoyens contemporains se pensent disloqués du rouage macroéconomique, ou encore pense que l’État n’en fait pas assez pour eux. Au-delà des raisons qui motivent les citoyens à évoluer en dehors du « main-stream », de plus en plus on assiste à des formes d’économies parallèles qui se déclinent sous plusieurs manifestations, dont les économies collaboratives. Cuisine Voisine en est un exemple parfait. Mais les économies collaboratives n’échappent pas à des réalités du courant économique prédominant, dont le principe de la concurrence. On a qu’à regarder le cas d’Allô-Stop vs AmigoExpress pour constater les limites implacables de tout processus de marchandage de service collaboratif en contrepartie d’une rémunération ou autre service. Mais c’est plus profond que cela. Même dans un monde idéal, les économies collaboratives peuvent avoir de fâcheuses conséquences sur la balance naturelle (nécessaire à une économie capitaliste). À petite échelle, les économies collaboratives ont peu de conséquences sur les structures locales de saine gouvernance. Les états ou gouvernement locaux peuvent continuer à prodiguer les services tant essentiels à la population. Mais qu’arriverait-il si les économies collaboratives gagnaient excessivement en popularité ?Selon moi, Il y a trois possibilités : 1- Quelques économies collaboratives deviennent profondément populaires qu’ils remplacent complètement ces produits et services normalement offerts par les mécanismes d’économie capitalistes mais devenus désuets par leur manque de compétitivité.
2- Le phénomène d’économie collaborative s’étend marginalement à tous les créneaux des produits et services disponibles, de sorte que toute activité économique devient légèrement ou un peu affectée par une petite compétition collaborative peu disruptive qui opère parallèlement à l’économie capitaliste régulière.
3- Le phénomène d’économie collaborative s’étend profondément à tous les créneaux des produits et services disponibles, et y deviennent tellement populaire qu’ils remplacent complètement tous les produits et services normalement offerts par les mécanismes d’économie capitalistes mais devenus désuets par leur manque de compétitivité.
Voyons les conséquences. Dans la première possibilité, quelques fournisseurs de produits ou services perdrait leur niche, la balance entre leurs revenus et charges d’exploitation devenant insupportable, ne pourraient payer ni fournisseurs, ni employés, et ultimement diminueraient ou cesserait leurs activités économiques. C’est le cas d’Allô-Stop (faillite), voir même du transporteur autocar Orléans Express (diminution) qui demande à revoir l’entente de couverture des transports en région moins populaire, ayant perdu l’avantage de l’Axe Montréal-Québec tellement Amigo-Express a pris de l’Ampleur en covoiturage sur cet axe. Cela laisse la forte majorité des fournisseurs de produits et services tranquille et l’économie nationale continue sans difficulté. La forte majorité des emplois ailleurs étant inaffectés, l’État continue de percevoir les taxes et impôts nécessaires au bon déroulement de l’appareillage gouvernemental et continue ses services publics.
Dans la deuxième possibilité, dans la mesure où chaque créneau de produits et services est marginalement affecté, les fournisseurs peu compétitifs devront s’ajuster ou deviendraient désuets et quelque uns fermerait leurs portes. La majorité des fournisseurs continueraient avec peu d’effets sur leur masse de main-d’œuvre, et l’économie nationale continue sans difficulté. La forte majorité des emplois étant inaffectés, l’État continue de percevoir les taxes et impôts nécessaires au bon déroulement de l’appareillage gouvernemental et continue ses services publics. Encore, peu d’impact.
Dans la troisième possibilité, chaque créneau de produits et services est profondément affecté. Les économies collaboratives, fonctionnant dans des modes parallèles aux courant réguliers, ne déclarent pas leurs revenus de produits et services, donc échappent à l’imposition des sociétés, leurs prix sont inférieurs au marché « blanc » ou officiel. Les fournisseurs réguliers deviennent non compétitifs et perdent tout attrait aux consommateurs. Les employés et entrepreneurs qui y travaillent (au « noir ») ne déclarent pas la majorité de leurs salaires ou gains, donc échappent à l’imposition des particuliers également. L’État ne perçoit maintenant pas assez d’impôts et taxes de consommation pour rencontrer les dépenses d’état pour prodiguer les services à sa population, et fait face à une crise économique dans des programmes d’austérité. Cette possibilité cauchemardesque rappel le cas de la Grèce où un article Intitulé « Les origines de la crise Grecque » mentionne :
« … culturellement, la fiscalité n'a jamais été une priorité pour les gouvernements grecs. L'économie souterraine a toujours représenté entre 20 et 30% du PIB selon le FMI. Toutes les professions exerçant dans le public comme dans le privé ont profité de ce système pendant des décennies. À la fin des années 2000, les Grecs aisés ont envoyé à l'étranger leurs liquidités vers les banques suisses et anglaises. Autant de rentrées fiscales en moins pour l'État Grec. Ces ressources auraient permis de rembourser ses créanciers et relancer l'investissement avec des mesures cohérentes et appropriées. »( HUFFINGTON POST. | Actualisé 05/10/2016)
On connait la suite des événements. Les économies collaboratives ont donc leurs limites et, au-delà des conditions d’émergences et les objectifs sociales acceptables, ces efforts doivent prendre garde à ne pas verser dans le paradoxe de l’économie collaborative qui devient l’économie destructive, tel le serpent mythique Uroborus qui veut se nourrir en se mangeant la queue, solution court terme vouée à l’échec.
Simon Remillard.
Commentaires
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