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Blogue #2-Yves T. Le rôle des Premières Nations et des Inuits du Québec dans le développement du Nord québécois

Par Yves Tanguay


Le Plan Nord vise un territoire de 1 200 000 km2 (72 % de la superficie totale de la province), au nord du 49e degré de latitude Nord, où vivent 122 000 personnes, dont 33 000 autochtones. Le Plan Nord est présenté comme un modèle de développement durable qui permettra de mettre en valeur les ressources naturelles dans le respect de l'environnement et des écosystèmes au profit des populations nordiques et de l'ensemble des Québécois. Les ressources naturelles dont il est question sont principalement les ressources minérales et énergétiques, auxquelles il faut ajouter les ressources forestières et fauniques, de même que les potentiels  touristique et bioalimentaire.  Le Plan Nord est l'un des plus grands chantiers de développement économique, social et environnemental de notre histoire qui se déploiera sur 25 ans.

Dans les notes préliminaires du Plan Nord, l’ancien ministre responsable des Affaires autochtones du gouvernement libéral, Geoffrey Kelley, affirmait qu'il entendait s’assurer que toutes les nations autochtones présentes sur le territoire du Plan Nord puissent contribuer à ce projet porteur.  Pourtant, seules quatre des six nations qui sont présentes sur le territoire ont été interpellées (les Cris, les Inuits, les Naskapis et les Innus) et deux manquent à l'appel (les Attikameks et les Algonquins). En effet, pour être incluse dans le Plan Nord, une communauté autochtone devait être localisée (réserve, établissement, village, terres réservées) au nord du 49e degré de latitude Nord. Or, ce critère fait fi de la délimitation des territoires ancestraux. Ceux d'au moins une communauté algonquine (les Abitibiwinnis de Pikogan) et d'au moins une communauté attikamek (Obedjiwan) chevauchent le 49e parallèle.  Ainsi, l’ancien gouvernement ne démontrait aucune volonté de respecter les droits des aborigènes du Québec.  De plus, selon Carole Lévesque, professeur-chercheure spécialiste des peuples autochtones, la vision du développement mise de l'avant par le gouvernement Charest dans le cadre du Plan Nord dénote un recul dans les relations entre le gouvernement provincial et les autochtones. 

Or, un des principes de l’administration publique est de reconnaître les droits des aborigènes car l’occupation de notre territoire par ces populations pré-existe à l’arrivée des européens en Amérique, au Canada et au Québec.  C’est la Cour et la Constitution qui reconnaissent les droits des aborigènes au Canada et l’administration publique a le devoir d’appliquer ces droits.  Dès 1763 les droits des aborigènes sont reconnus dans la Proclamation royale.  Nous devrions donc respecter les droits ancestraux, les droits de traités et l’obligation de les consulter et de les accomoder lorsque nous planifions le développement de leur territoire.

Le 4 décembre 2012 lors de l’ouverture du Sommet sur les territoires et les ressources, la nouvelle première ministre du Québec, Pauline Marois affirma sa volonté de corriger la situation et promit d’impliquer davantage les Premières Nations dans le développement du Nord québécois.  Dans ses propres mots Pauline Marois déclara, «Nous entendons nous inspirer des principes de la Paix des Braves pour établir nos relations de nation à nation. [...] Dans cette démarche, toutes les Premières Nations et les Inuits concernés auront leur mot à dire».  Enfin, voilà une politicienne qui respecte les principes de l’administration publique !

Selon moi, au-delà du principe de l’administration publique de reconnaître les droits des aborigènes, une nouvelle approche devrait s’ajouter dans les relations avec ces communautés, celle de la cogestion.  Jusqu’à maintenant, certains droits étaient reconnus et mêmes bafoués par notre gouvernement mais en laissant chacun jouer son rôle une fois les ententes convenues.  La participation des autochtones est essentielle à la réussite du Plan Nord.  Thierry Rodon, professeur associé à l’École de politiques publiques et d’administration de l’Université Carleton à Ottawa a publié un ouvrage intitulé En partenariat avec l’État : Les expériences de cogestion des autochtones du Canada.  Dans cet ouvrage il reprend l’essentiel de sa thèse de doctorat déposée en 1998 au département de sciences politiques de l’Université Laval. Cet ouvrage constitue une contribution fort appréciée à la réflexion sur la gestion partagée des ressources naturelles renouvelables ainsi que plus généralement sur les relations de pouvoir entre les peuples autochtones et l’État canadien. Après un peu plus de 25 ans d’expérience de cogestion au Canada, l’auteur pose un regard lucide et opportun sur la réalité et les enjeux du partenariat entre l’État et les peuples autochtones.

Nous devrions donc nous inspirer de ces expériences de cogestion afin d’innover dans nos relations avec les autochtone et trouver des solutions à leurs nombreux problèmes sociaux.   De manière plus concrète, cette approche devrait être abordée dans le cadre d’accords visant à implanter des systèmes de cogestion des ressources naturelles.  Cet aspect est particulièrement crucial à un moment où les décisions relatives aux ressources naturelles mettent désormais en débat les intérêts souvent divergents de la communauté citoyenne, du gouvernement et des compagnies. Il est donc devenu primordial d’implanter un modèle de décentralisation des instances décisionnelles où les gouvernements accordent un degré de participation citoyenne plus important, par exemple, en localisant le pouvoir décisionnel au sein des communautés locales. Cette initiative, dans le contexte de la gestion des ressources naturelles mène à la création de nouvelles instances de gestions des ressources, et corolairement, à la formation de partenariats entre les divers groupes d’intérêts.  Il faudrait porter notre attention a un partenariat liant le gouvernement, la société civile, les communautés autochtones, et les corporations. Il ne faut surtout pas négliger l’apport autochtone dans ces nouveaux partenariats que nous qualifions d’accords de cogestion. Cette participation permettra d’inscrire des nouveaux critères d’équité dans les procédures et apportera plus d’efficacité dans la gestion du territoire.

Espérons que le gouvernement actuel qui semble très honnête dans ses échanges avec les Premières Nations aboutira à des actions concrètes qui corroboreront leurs belles promesses.

Commentaires

  • Nous voilà avec un bon blog d'yves à lire et triturer.
    Déjà l'effort mérite d'être soulkigné. En administration publque trop peu de personne prennent la parole publique sur
    des sujets qui touche toute la collectivité.
    Un même commentaire ...non moins méritoire Yves.
    Prof

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