Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Recours au Péage pour la construction du nouveau pont Champlain-Erik Thibeault

Actuellement au Québec nous assistons au vieillissement des nos infrastructures routières.  Qui dans notre société de consommation ne rêve pas de ponts, routes et viaducs neufs et en excellent état.  Pourtant, nous sommes bien loin de cela; plusieurs de nos infrastructures doivent être rénovées et/ou refaites pour en assurer leur fiabilité à long terme.  Les gouvernements investissent actuellement plusieurs millions de dollars pour le rehaussement et le développement de nos routes.   

 

Le gouvernement conservateur a récemment fait une annonce sur l’avenir de l’axe Montréal Rive-Sud que relie actuellement le pont Champlain.  Après plusieurs mois de pression, une annonce a été faite.  Selon l’annonce faite par le ministre Lebel, la construction d’un nouveau pont Champlain inclurait l’ajout de 2 voies, soient 8 voies au lieu des 6 voies actuelles et donc augmenterait le niveau de service du pont en augmentant la capacité et, souhaitons le, la fluidité de la circulation.  Le ministre a par le fait même annoncé que le projet retenu allait ramener le péage sur le pont Champlain.  

 

Une question se pose dans le contexte des finances publiques actuelles: sommes-nous en accord avec le recours au péage sur le nouveau pont Champlain?  

 

Si nous regardons nos impôts et nos taxes qui sont déjà élevé, le montant de la dette ainsi que les nombreux engagements financiers de nos gouvernements; la construction d’un tout nouveau pont financé à 100% par le gouvernement, c’est-à-dire sans avoir recours au péage, semble peu envisageable.

 

En ayant recours au péage, le gouvernement privilégie le financement de l’infrastructure par le concept d’utilisateur payeur.  En privilégiant l'option utilisateur payeur, le gouvernement peut alors cibler d'une certaine manière l'imposition.  Par exemple, un résident de Vancouver qui n'empruntera peut-être jamais le nouveau pont Champlain n'aura pas à le financer via le péage.  À l'inverse, un résident de la région de Montréal qui utilise le pont quotidiennement ou occasionnellement en assumera une partie des coûts via le péage.  Le mode péage permettra de financer l'infrastructure du nouveau pont par ses utilisateurs.  Plus l’utilisateur utilisera le pont, plus sa contribution au financement du pont sera élevée.  Ceci évite que les non-utilisateurs en assument le coût.  

 

Certains citoyens vont croire qu'ils doivent payer une taxe supplémentaire associée au passage sur le pont alors que maintenant ils ne paient pas.  Cette affirmation n’est pas totalement vraie car le financement du pont actuel vient à 100% du gouvernement.  Leur passage est donc payé par l’ensemble des taxes et impôts de tous les contribuables.  Rien n'est vraiment gratuit. 

 

Plusieurs citoyens se rendent à Montréal quotidiennement, pour travailler, pour étudier, pour se divertir, etc.  Tous ces déplacements occasionnent beaucoup de circulation.  Selon l'étude de préfaisabilité[1] portant sur le remplacement de l'actuel pont Champlain, plus de 120,000 déplacements ont lieu matin et soir en voiture.  Nous pouvons penser qu’un péage sur le pont permettrait de désengorger l’utilisation du pont en décourageant certaines personnes d’utiliser leur voiture.  Il pourrait alors en résulter d’une utilisation accrue aux transports collectifs ou des moyens alternatifs pour réduire les coûts de transport tels que le co-voiturage ou même l’usage de la bicyclette.  Le gouvernement et les environnementalistes encouragent et instaurent des mesures pour inciter les gens à utiliser d'avantage les transports en commun en remplacement de leur voiture.  Nous pouvons penser que le péage pourrait être un élément additionnel pour dissuader certains usagers de la route à utiliser le pont Champlain en voiture et donc augmenter  l'utilisation de mode de transport collectif ou alternatif, voire même éviter certains déplacements.

  

Le nouveau pont Champlain va également servir à maintenir un axe essentiel et majeur pour le transport commercial entre l'ensemble du Québec et les États-Unis.  La congestion actuelle occasionne des pertes financières considérables pour les compagnies de transport.  Le commerce avec les États-Unis est essentiel au maintient de notre économie et nous devons donc s’assurer de maintenir une infrastructure fiable et efficace à long terme pour s’assurer d’une fluidité de circulation du transport des biens qui transitent entre nos deux pays.  Le transport lourd engendre une usure importante de nos routes et infrastructures.  En imposant un péage adapté au type de véhicule nous pourrions s'assurer de la contribution supérieure des camions qui causent l'usure prématurée sur le pont et utiliser ces sommes perçues pour le financement et le maintient de l'infrastructure, tout en maximisant l'efficacité et la fiabilité pour l'ensemble des usagers du nouveau pont.  Les compagnies vont certainement refiler la facture de passage aux consommateurs dans leur prix des biens consommés.  Ceci permettra de faire payer les consommateurs un juste prix pour les biens qu’ils consomment.  Ainsi, même si un citoyen de Vancouver n’utilisera jamais le pont Champlain, le bien qu’il consomme y transite peut-être et il en paiera une redevance dans le coût de ce bien.  On peut toutefois se demander si le nouveau pont a péage, avec une meilleure fluidité, sera plus onéreuse que les pertes financières qu’ils accusent actuellement avec la congestion.

 

La ville de Montréal constitue une plaque tournante économique du Canada.  Certains diront alors qu’elle appartient à l’ensemble des citoyens et qu’il faut donc favoriser la gratuité à l’accès de ceux-ci.  En contrepartie, on pourrait leur demander s’ils sont favorables à payer les infrastructures d’une autre ville qu’ils n’utiliseront peut-être jamais.  

 

Le péage a été présent sur le pont Champlain de sa construction jusqu'en 1990 où il a été remplacé par une taxe sur l'essence.  Est-ce que le gouvernement retirera cette taxe pour remettre en place le système de péage?

 

Richard Bergeron a récemment déclaré ce qui suit:  «ce à quoi nous assistons aujourd’hui, c’est la création de péages à la pièce qui serviront à financer de nouvelles infrastructures routières, sans avoir, en contrepartie, l’engagement des gouvernements supérieurs à offrir des alternatives en transport en commun aux citoyens...»[2]

M. Bergeron a raison.  Le gouvernement veut peut-être favoriser le transport en commun, mais est-ce qu’un plan de transport a été développé?  Est-ce que les infrastructures de transport en commun actuelles permettent d’absorber une nouvelle clientèle?

 

Les ménages Québécois sont actuellement les plus taxés en Amérique du Nord.  Comment expliquer que nous allons maintenant leur demander de payer d'avantage pour utiliser une infrastructure?  Pensons aux ménages à faible revenu.  Le péage pourrait représenter une somme considérable de leur budget.  

 

Même si certain diront que le gouvernement fédéral se décharge du financement du nouveau pont, n’oublions pas que l’actuel pont Champlain a été financé par le péage (jusqu’en 1990) puis par une taxe sur l’essence.  La réintroduction du péage ne constitue qu’un moyen de financement du pont.  Il n’y a donc pas de nouveau transfert des coûts aux citoyens.

 

Il ne faut pas oublier qu’un pont est un service ayant une durée de vie.  Les citoyens ne doivent donc pas prendre pour acquis ce service.  Il doit être conscient que sa contribution financière, qu’elle soit sous forme de péage, de taxe ou d’impôt, celle-ci a une limite à l’espérance de vie du service offert.

 

Aux yeux de certains, le péage sur le nouveau pont Champlain pourrait être source d'iniquité face aux utilisateurs des autres ponts sans péage (ex: pont Jacques-Cartier et Mercier).  Il ne faut pas oublier que ces autres ponts ont également été financé par le péage et, puis, par la taxe sur l’essence.  Les citoyens ont donc contribué au financement de ceux-ci. Lorsque la durée de vie de ceux-ci sera atteinte, le gouvernement devra avoir recours à un mode de financement que ce soit au moyen d’une taxe, d’un impôt ou d’un péage.  Je n’y vois donc pas d’injustice en ce sens.  

  

En bref, si on regarde la tendance mondiale actuelle, les gouvernements ont de plus en plus recours au péage.  On le constate même au Québec avec le pont de l’autoroute 25 et l’autoroute 30.  Les gouvernements ont des ressources financières limitées et ils doivent trouver des moyens de financement pour nos infrastructures.  Le trésor public provient des cotisations des contribuables.  Donc, d’une manière ou d’une autre, ce sont les citoyens qui doivent débourser pour le service d’un nouveau pont lorsque l’infrastructure en vient à sa durée de vie utile.  

 

 

Erik Thibeault

ENP 7505

Commentaires

  • Bravo encore Érik pour oser ce blogue public sur une question d'actualité pour faire voir des principes d'administration publique concrets.
    N'oublions pas de s'assurer une copie-papier dans les cahiers réservés à cette fin.
    Ceci s'applique aussi pour les "commentateurs" de Érik.
    Et bientôt ...de la correction, au sens d'examen de la copie !
    Prof - samedi le 30 octobre 2011.
    Bonne FDS

  • Le péage est d’emblée une solution facile et efficace pour payer les ponts. Par contre, je ne suis pas d’accord avec les justifications utilisées pour mousser cette solution. Tout d’abord, je pense, tout comme Karen (voir autre commentaire), qu’un pont à péage ne découragera pas les usagers au point qu’ils utiliseront davantage le transport en commun, l’augmentation de l’affluence dans les autobus sera minime. Pour obtenir un gain substantiel, il faudrait améliorer le service drastiquement, particulièrement quand on sait que les autobus sont déjà bondés à l’heure de pointe. Il faudrait augmenter le nombre d’autobus et s’assurer de desservir un plus large territoire et d’accéder aux endroits hors des artères principales de façon efficace. D’ailleurs, cessons aussi de culpabiliser l’utilisateur, disons que le gouvernement a sa part de responsabilités dans l’usure du pont Champlain. Si l’autoroute 30 aurait été praticable il y a plusieurs années comme prévu, ça aurait désengorgé le trafic vers Montréal. De plus, les projections démographiques qui ont contribué à déterminer les paramètres de la construction du point Champlain n’étaient évidemment pas adéquates.

    J’ai aussi un peu de difficulté à vouloir faire payer les utilisateurs seulement. Les structures de transports ne sont-elles pas un bien public administré par le gouvernement pour répondre aux besoins de la population ? Si tel est le cas, pourquoi seuls les usagers doivent payer ? Dans cet optique, pourquoi je payerais pour l’élargissement de l’autoroute 175 si je ne vais jamais au Lac St-Jean ? Pourquoi mon voisin payerait les taxes scolaires puisqu’il n’a pas d’enfant ? Pourquoi les gens qui ont rarement des problèmes de santé payeraient autant d’impôt que ceux qui visitent souvent les hôpitaux et les urgences. On comprend toutefois que si le pont est un bien public, l’État peut décider si seuls les gens qui paient ont droit de passage ou si ce service est accessible à tous en ayant une source de financement alternative probablement liée à l’impôt. Qu’on fasse un pont payant ça va, mais on doit rassurer la population que les profits seront utilisés à bon escient, à l’avantage de l’ensemble des biens publics.


    Nathalie Audet
    Mercredi matin ENP7505

  • Je suis moins favorable au PPP qui n’a pas toujours fait ses preuves et qui dans ce cas-ci, lèguerait un pont en fin de vie au gouvernement. Après 30 ans, le pont sera vendu pour une somme symbolique de 1$ au gouvernement du Québec. L’actuel pont Champlain a été inauguré dans les années ’60 et des travaux majeurs ont dû être entrepris déjà dans les années ’30… ce qui fait 30 ans.

    Nous sommes en 2011 et les matériaux de construction sont certainement plus performants aujourd’hui. Comment le fédéral et le privé peut-ils nous garantir un pont de qualité? Un pont construit avec les matériaux les plus performants sur le marché? Tout cela si après 30 ans, de toute manière, ils n’ont plus aucune responsabilité à cet égard? La durabilité ne me semble plus être une valeur naturelle selon cette formule…

    Par contre, je suis en faveur d’un péage à l’entrée du pont et même de tous les ponts. Pas pour rembourser un investisseur privé, mais plutôt pour investir dans les routes et infrastructures de la ville de Montréal. J’aimerais avoir pitié des habitants de la banlieue, toutefois ils semblent récolter le meilleur des deux mondes et… ça m’irrite! Ces derniers bénéficient de maisons plus spacieuses pour une habitation du même montant à Montréal. Même s’ils utilisent les infrastructures de Montréal au quotidien puisqu’ils y travaillent, ils ne paient que les taxes de leur municipalité. Ces municipalités bénéficient des taxes des habitants et n’ont pas à ce point besoin de réparer des nids de poules puisque la circulation y est beaucoup moins importante qu’à Montréal. D’immenses parcs ci et là fréquentés par deux enfants par jour sont alors construits.

    Tous les utilisateurs des routes de Montréal doivent contribuer au financement des travaux de rénovation et pas seulement les automobilistes montréalais déjà bien étouffés par les taxes municipales et le prix de leur loyer.
    Christiane Richard

  • Mon opinion est partagé quant au péage ultérieur du Pont Champlain. Je comprends d'abord le concept de l'utilisateur-payeur afin de financer ces infrastructures qui seront, somme toute très dispendieuses pour le gouvernement. Par contre, je trouve le concept un peu injuste du fait que les utilisateurs quotidiens de ce pont n'ont pas nécessairement choisi de l'utiliser, mais se voit dans l'obligation de l'emprunter, à des fins d'emploi par exemple. Ce péage représentera sûrement des sommes onéreuses pour les utilisateurs, ce qui pourrait avoir des effet pervers. En effet, plutôt que de favoriser l'utilisation du transport en commun, il se pourrait que les citoyens décident d'utiliser les autres accès à l'île de Montréal, soit les autres ponts, ce qui pourrait engendrer d'autres problèmes tout aussi répréhensibles, tels une surutilisation qui engendrerait des problèmes structurels prématurés, des embouteillages monstres aux heures de pointe, etc ...

    Dans un autre ordre d'idée, je crois effectivement que nous sommes submergés par différentes taxes et que nos impôts sont relativement élevés, or, il est inconcevable de les augmenter à mon avis. Un PPP serait peut-être un choix judicieux, afin de faire baisser le coût du péage à long terme et ainsi permettre aux citoyens d'emprunter à nouveau , dans un avenir lointain, le Pont Champlain de façon tout à fait gratuitement.

  • La question du péage sur les ponts est une question bien complexe et mon opinion par rapport à celle-ci est partagée. En fait, j'ai l'impression qu'il ne faut pas s'attarder simplement au péage, mais également à ce qui l'entoure. Je m'explique :

    Comme vous l'avez précisé, le nouveau pont Champlain sera financé en partie par le péage de celui qui l'utilise. On a alors affaire au concept de l'utilisateur-payeur. Toutefois, vous faites également mention du citoyen de Vancouver qui bénéficie de la construction de ce nouveau pont puisqu'il représente une voie commerciale de première importance. Celui-ci en retire donc des bénéfices, mais n'aura jamais à l'utiliser. Quant à la répartition de la surcharge faite au secteur commercial pour cette hausse, il est envisageable qu'elle soit équivalente autant pour un citoyen de Montréal, Beloeil ou Vancouver. En somme, la facture revient toujours au contribuable (oui, le trésor public est bel et bien financé par... le public). Sur tout cela, je suis parfaitement d'accord avec vous.

    Mon ambiguïté comme je le précisais précédemment se retrouve plutôt à ce qui entoure le péage lui-même. En effet, dans sa mouture actuelle, il est prévu qu'il y ait une augmentation du nombre de voies au pont. Tout d'abord, cela me semble être un message contradictoire à celui voulant encourager le développement durable. En augmentant le service, on ouvre la porte à augmenter le nombre de voitures. Il faudrait, comme le spécifie Richard Bergeron, utiliser une partie de ces fonds à la création d'une réelle alternative en transport en commun conjointement au simple paiement des infrastructures du pont.

    Tel que présenté actuellement, un paiement aurait pour effet de contraindre celui qui n'a pas les moyens de payer à se tourner vers le transport collectif. Ce faisant, on crée deux classes de citoyens : ceux qui ont les moyens et ceux qui ne les ont pas. À mon avis, l'idéal serait donc de redorer nos infrastructures de transport en commun de façon à inciter le citoyen à migrer de lui-même vers ce moyen de transport. En privilégiant le transport collectif, il deviendrait alors aberrant d'ajouter des voies au pont.

    Finalement, le plan actuel me semble plus ou moins incohérent puisqu'il y a un fort risque que ce paiement ne fasse que déplacer le trafic vers les ponts toujours gratuits. Cet épisode ouvre donc la porte à rendre chacun des ponts payants. Nous pourrions profiter de cette situation non seulement pour assurer l'entretien de nos infrastructures, mais aussi pour nous doter d'un plan crédible en transport collectif. Toutefois, il ne faudrait pas tomber dans la montréalocentrisme aux dépens des banlieusards.

    Un dossier à suivre.

    Philippe Maltais-Guilbault

Les commentaires sont fermés.