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Pas de pitié pour les forts

Pas de pitié pour les forts

La Presse du samedi 10 octobre titrait dans son cahier Plus Forum « Collèges privés : Pas de pitié pour les faibles ». Voilà que débutait une série d’articles de propagande pour l’école publique, et ce, parfois malheureusement sans grande analyse. Il est facile d’être pour la vertu, mais a-t-on les moyens de nos ambitions? Voilà donc un débat qui fait rage à nouveau; il nous revient périodiquement. Au nom de l’égalité, on semble parfois vouloir niveler vers le bas. (Est-ce une tendance au Québec?)

En éducation, la prémisse devrait être de « permettre à chacun de développer son plein potentiel, sans jugement de valeur ». Permettre à chacun de développer son plein potentiel n’a rien à voir avec l’élitisme, mais bien avec le respect des différences. On se doit de mettre en place des moyens pour soutenir et aider ceux qui souffrent d’un trouble d’apprentissage, qui décrochent ou présentent une déficience intellectuelle… Ne devrait-on pas faire de même pour ceux et celles qui présentent une certaine douance ou facilité d’apprentissage, pour ceux qui ont un talent aussi bien en mathématique qu’en art…

Au nom d’une idéologie, on demande à ne plus subventionner les écoles privées et que ces dernières soient comme les écoles publiques régulières, elles doivent toutes être pareilles. L’école publique se doit d’accepter tout le monde, c’est un fait. Il faut également rappeler que même dans le secteur public, il existe aussi des écoles d’« élites », à vocation spéciale, où les élèves ne sont admis qu’après des examens d’admissions (voir tableau 1). Cela semble donc répondre aux désirs des parents, mais surtout à des besoins particuliers de certains enfants. D’ailleurs pourquoi tant de parents, qui ne sont pas tous fortunés, souhaitent tant envoyer leurs enfants à l’école privée? Pour plusieurs, ils veulent que leurs enfants réussissent, ils veulent leur donner ce qu’ils perçoivent comme le meilleur. Il va sans dire qu’il y a là aussi une question de perception. D’autres le font pour eux-mêmes, leur propre narcissisme, plus que pour les besoins de leurs enfants; cela n’est pas le problème des écoles privées, mais bien celui de certains parents. Nous assistons alors à des drames, où l’enfant ne réussit pas à atteindre les visées parentales et tous en ressortent blessés. Il y a là un équilibre difficile à atteindre entre le désir du parent, permettre à l’enfant de développer son plein potentiel, quel qu’il soit, et la dure réalité de la compétition.

Écoles à vocation spéciales de la Commission scolaire de Montréal

Écoles primaires enrichies

Écoles secondaires enrichies

École Atelier, alternative

Académie De Roberval

École Arc-en-ciel, alternative

École Édouard-Montpetit

École Élan, alternative

École secondaire FACE

École Étoile filante, alternative

École internationale de Montréal

          École FACE, théâtre, musique et beaux-arts

École secondaire Joseph-François-Perrault

École Fernand-Seguin, douance et enrichissement en sciences

École alternative Le Vitrail

École internationale de Montréal, éducation internationale

École secondaire Louise-Trichet

École Le Plateau, formation musicale

École secondaire Marguerite-De Lajemmerais

          École Rose-des-Vents, alternative

École secondaire Saint-Louis

École Saint-Barthélemy, volet éducation internationale

École secondaire Joseph-François-Perrault

         Maîtrise des petits chanteurs du Mont-Royal, musique et chant

 

Les argumentaires voulant que ces écoles privées soient réservées qu’à un certain type d’élèves est vrai, tout comme il existe des écoles publiques pour des clientèles ayant des difficultés particulières ou encore avec une certaine douance ou facilité dans certains domaines.

On ne songerait pas à remettre en question la pertinence d’écoles particulières pour des enfants souffrant d’un handicap sévère ou encore pour des décrocheurs, et ce, afin de mieux répondre à leurs besoins particuliers. Une recension des écrits sur le sujet des enfants doués à l’école, fait par des étudiants en psychologie de l’Université de Montréal (Journal Forum, 07 septembre 2009[1]) indiquent que de « 30 à 50 % des enfants intellectuellement précoces vivront un échec scolaire à un moment de leur vie… seulement 40 % terminent un baccalauréat ou accèdent aux cycles supérieurs. Les autres échouent ou abandonnent leurs études… Le danger avec l’ennui, c’est qu’il peut mener au décrochage, laissant la porte ouverte à la délinquance… »

Bien sûr, tous les enfants dans les écoles privées ne sont pas des surdoués, mais ils sont sélectionnés de par leur potentiel et leur motivation.

Dans un document sur le site de la Centrale des syndicats du Québec[2], on retrouve cette défense pour mettre fin au financement des écoles privées :

« Mais nous sommes aussi conscients que l’école publique doit faire mieux. Elle doit assurer la réussite scolaire du plus grand nombre d’élèves possibles, jeunes et adultes, mieux soutenir les élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, favoriser une meilleure intégration à la société québécoise et offrir une formation professionnelle accessible au plus grand nombre afin de développer une main-d’œuvre de plus en plus qualifiée. Malheureusement, les moyens consentis ne sont pas à la hauteur de ces exigences. »

 

Alors si nous sommes d’accord que tous devraient pouvoir développer son potentiel, pourquoi ne pas le faire dans les écoles publiques? Tout à fait d’accord, voilà une superbe idée… Mais les écoles publiques sont reconnues pour être surchargées (nombre d’élèves par classe, La Presse, 10 novembre 2008[3]), ne pas avoir de soutien pédagogique suffisant (orthopédagogue, psychologue, orthophoniste…). Il manque même de professeurs avec permis d’enseignement (La presse, 7 octobre 2008[4]). Comment alors pouvoir s’occuper de tous ces besoins avec si peu de moyens? Dans de telles conditions, l’école publique se doit de prendre le parti de la majorité et soutenir les plus démunis. Le Plan stratégique 2009-2013 du Ministère de l’Éducation du Loisir et du Sport [5] fait mention des élèves ayant des besoins « particuliers » ce qui exclut la douance.   

Par ailleurs, l’école privée est subventionnée à 60 % [6] par le Ministère de l’Éducation, le reste étant fourni par l’argent des parents. Si tous ces étudiants devaient quitter le privé pour aller au public, est-ce que le public serait en mesure d’absorber un si grand nombre avec 60 % des ressources? Avec, vous en conviendrez, moins d’argent, car les parents n’auraient plus à suppléer ce manque. Cesser de subventionner le privé n’apporterait pas plus d’argent et de moyens au public.

A-t’-on les moyens de nos ambitions à ce moment-ci? La loi de Wagner se fait douloureusement ressentir. L’idée d’un système unique publique est intéressante, mais difficile à appliquer durant une période de crise économique. Si l’on souhaite un système scolaire qui permet à tous de développer son potentiel, il faudra plus de ressources, plus d’argent et corriger les perceptions. Au-delà de ces moyens, il faudra plus qu’une réforme scolaire, mais bien un changement de paradigme afin de permettre à tous, incluant ceux qui sont plus doués, de pouvoir se développer pleinement. Est-ce qu’il nous viendrait à l’idée d’empêcher un boursier d’étudier dans une célèbre et riche université américaine sous prétexte que tous ni sont pas admis? Une solution temporaire serait de subventionner les étudiants doués et motivés afin que l’argent ne soit pas un frein à l’accès, ou encore que le public compétitionne le privé en augmentant le nombre d’écoles à vocation spéciale ou en ouvrant des classes spécialisées dans les écoles de quartier.  

 Paul C. Veilleux, ENAP 7505, octobre 2009



[2]Centrale des syndicats du Québec: Déclaration du Regroupement pour la défense et la promotion de l’école publique, http://www.csq.qc.net/sites/1673/documents/grands/financement_prive_public.pdf

[5] Plan stratégique 2009-2013 du Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (2009): http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/publications/index.asp?page=fiche&id=24 

[6] Ministère de l’Éducation du loisir et du sport (juin 2009) : Renseignements relatifs à une demande de délivrance de permis.  http://www.mels.gouv.qc.ca/dep/ETAPE/Guide/Rensdeli.pdf

Commentaires

  • vu

  • Durant la plupart de mes études, j'ai fréquenté des écoles publiques à l'exception de mes études secondaires. J'étais alors élève à l'École internationale de l'Outaouais (ÉIO); cinq années qui m'ont grandement marquées. De fait, l'on nous a transmis de belles et valeureuses leçons : la méthodologie du travail et des présentations (m'ayant fortement aidé à l'université), l'obligation d'effectuer du service communautaire annuellement, et ce qui je chérie le plus, l'opportunité d'avoir développé une troisième langue (au programme obligatoire.) J'écoutais récemment M. Jacques Parizeau lors d'une allocution donnée à l'ÉNAP et il mentionnait justement la nécessité pour la société québécoise de s'ouvrir à la langue anglaise et même, d'apprendre une troisième ou quatrième langue. Je me sens choyée d'avoir étudié à l'ÉIO, ne serait-ce que pour le trilinguisme. Bien sûr, j'encouragerai toujours le secteur public, mais il serait agréable et bénéfique que le programme du primaire/secondaire se diversifie davantage chez les jeunes.

  • La question du nivellement vers le bas est intéressante... École publique serait-elle synonyme de «bas» et privée de «haut»? Comme l'on attribut de plus en plus le «bas» au secteur public et le «haut» aux entreprises privées??? Il n'y a qu'à observer ce qui se passe dans les municipalités (parenthèse!).
    Je ne crois pas.
    Comme le relate le commentaire précédent, il existe d'excellente école publique. Tout est une question d'idéologie et de performance de l'administration de l'instution.
    Il y a aussi le facteur primordiale avec lequel il est difficile de jongler: la tendance des organismes publics à vouloir uniformiser le système. Comme les écoles privées trouvent ailleurs qu'au gouvernement 40% de leur budget, ils ont plus de latitude dans la gestion et donne souvent à ces dernières une valeur ajoutée.
    Le système public d'éducation devrait s'assouplir afin que tous y trouvent leur compte afin de penser vouloir évincer le privé...

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