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  • Une administration publique hors contrôle?

    Une administration publique hors contrôle?

    Au cours des dernières semaines d’octobre et de novembre, le Québec vit surgir sur la place publique plusieurs scandales visant le domaine de la construction, l’attribution de contrats publics, le financement de nos partis politiques provinciaux et municipaux. Ces affirmations allaient jusqu’à impliquer la mafia, les Hell Angels et fit sortir des oubliettes le squelette des sociétés en commandites! Quoi de plus!

    Ma première réaction, à tout cela, fut de me demander si des contrôles adéquats auraient pu être appliqués afin d’éviter les situations gênantes dans lesquelles les autorités gouvernementales et municipales furent entraînées. Y aurait-il eu fraude et collusion? Qui n’avait pas été assez vigilant? Manquait-il de contrôle ou les contrôles actuels étaient-ils inadéquats? Et enfin, comment remédier à cette situation afin de protéger les deniers publics de malversations et la population, de l’abus de pouvoir?

    Il est essentiel dans le cas présent de faire un bref rappel des différents contrôles de l’État afin de mieux comprendre la situation.

    En premier lieu, définissons qu’est-ce que l’on entend par contrôle? Tout contrôle comporte une comparaison entre ce qui est fait et une norme imposant ce qui doit être fait. Il faut identifier quatre formes de contrôles soit : le contrôle de l’opportunité, le contrôle de la légalité, le contrôle de la rentabilité et enfin, le contrôle de l’efficacité.

    Quand on évalue une décision selon un critère d’opportunité, on examine la pertinence du but, son fondement même et sa qualité intrinsèque, eu égard au contexte. Le contrôle de la légalité pose la question de savoir si les autorités publiques ont respecté les règles de droit dans leurs décisions et leurs actes. Le contrôle de la rentabilité pose la question du rendement, de l’efficience, en tentant de mesurer « les coûts par rapport au rendement obtenu ». Enfin, le contrôle de l’efficacité « compare les résultats obtenus aux objectifs fixés ».

    Prenons simplement pour commencer, l’attribution des contrats de compteurs d’eau fait par l’administration Tremblay. Le contrôle de la légalité engendre ici la réflexion à l’effet de savoir si à Montréal l’administration municipale a outrepassé ses propres contrôles en ne procédant pas aux règles de soumissions des contrats. Le contrôle de la rentabilité fut aussi galvaudé puisque des contrats aux coûts élevés furent accordés à des compagnies ne correspondant pas aux critères d’opportunité.

    De plus, si nous prenons par la suite, la situation du financement de nos partis politiques et nos notions de contrôle. N’y existe-t-il pas aussi des problèmes de contrôle d’opportunité et de légalité lorsque l’on se rend compte qu’il est généralisé au Québec tant au municipal qu’au provincial, qu’une corporation ou autre organisme puisse donner une somme d’argent à un prête-nom afin de légitimer la somme pour le financement d’un partie politique?

    Vu l’ampleur des manques de contrôle, à qui revient la charge de rétablir le contrôle? Le gouvernement Charest s’attend à être étroitement associé aux modifications que devra obligatoirement proposer l’administration Tremblay pour faire cesser les soupçons quant à l’intégralité du processus d’appel d’offre. Mais qui devrait surveiller le gouvernement Charest pour les modifications importantes à effectuer pour cesser les soupçons quant à l’intégralité du processus du financement public? L’opposition? Et si l’opposition pratiquait les mêmes procédures?

    Le rôle du vérificateur dans le secteur privé est définit comme celui qui a la responsabilité d’émettre une opinion neutre sur l’ensemble de l’entreprise afin de divulguer à l’investisseur les informations financières et autres, afin de lui permettre de prendre une décision éclairée sur la société concernée. Ce vérificateur a donc, entre autre, le rôle de divulguer tout écart entre ce qui est fait et ce qui aurait dû être fait.

    Quand est-il du rôle du vérificateur tant au niveau fédéral et provincial? Le rôle du Vérificateur général au Québec et au Canada se résume à vérifier si l’argent engagé par l’administration publique a été dépensé pour les fins auxquelles les représentants du peuple l’a affecté, si les dépenses ont été faites de la façon autorisée et parfois, à se prononcer sur l’efficience des dépenses et sur l’efficacité des programmes. Pour atteindre ces objectifs, le Vérificateur général jouit habituellement de pouvoirs d’enquête et d’immunités, mais il n’exerce qu’une autorité morale et non décisionnelle.

    Comme nous pouvons le constater, dans le cas du financement public des partis politiques, où nous sommes dans la situation où « tout le monde le fait », ne faudrait-il  l’intervention d’une tierce partie neutre pouvant divulguer les irrégularités et ayant le pouvoir de référer aux organismes de contrôles de la légalité afin de redresser rapidement et adéquatement la situation?

    Le Vérificateur général au Québec et au Canada jouit dans notre droit public du type de vérification intégrée instaurée en 1985 au Québec, qui amène le Vérificateur à porter un jugement sur l’économie et l’efficience dans les dépenses gouvernementales. Pourquoi ne pas élargir ce mandat à l’évaluation de la provenance des fonds de financement de nos gouvernements? Comme corolaire, je peux invoquer que lorsque le financement d’un organisme n’est pas adéquat, il est du rôle du vérificateur dans le domaine privée de le noter aux états financiers. Pourquoi ne serait-il pas noté au rapport annuel du Vérificateur que des malversations majeures sont survenues dans le fonctionnement du financement public? Tout cela porte à réflexion.

    Pour terminer, à défaut d’une évaluation par une tierce partie, la population a le droit de connaître les vrais auteurs des irrégularités de l’administration publique. À cet effet, mentionnons que les organismes de consultation et de participation des citoyens sont des mécanismes assez formels de contrôle du gouvernement et de l’administration publique. Une commission d’enquête par exemple mettrait en lumière tout le processus et les responsables du mode de financement actuel. Il est dommage que le gouvernement Charest n’ait pas acquiescé à la demande de plusieurs groupes de pressions voulant celle-ci. Notons aussi, que dans le cas de la construction, même l’Ordre des ingénieurs du Québec réclamait la commission d’enquête pour faire la lumière dans la corruption dans ce secteur.

    En fait, la responsabilité de la vérification du contrôle ne doit-elle pas relever d’une tierce partie?