Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

L’influence des lobbies agroalimentaires sur la prise de décision au niveau de la santé publique en Europe

         Il est souvent difficile de déchiffrer les étiquettes des produits alimentaires et de fait de savoir quels sont les produits bons pour la santé ou non. C’est pourquoi, les députés européens ont débattus entre 2008 et 2011 dans le but d’améliorer cet étiquetage.

Parmi les mesures adoptées et qui doivent s’appliquer avant la fin 2014, on peut citer « l’obligation de faire figurer sept nutriments mais pas sur la face avant des emballages » (Bancquart, 2014). De plus, l’affichage des acides gras transgéniques ne sera pas obligatoire, la taille de police est maintenue à 1.2 mm et surtout les informations nutritionnelles sont désormais obligatoirement exprimées pour 100g/100 ml (Bancquart, 2014).

Ces quelques corrections n’apportent pas de grands changements si ce n’est de pouvoir comparer les produits grâce aux informations exprimées en 100 g ou 100 ml. Cependant, cela est loin d’être satisfaisant pour les nombreuses associations de consommateurs. En effet, « il n’est pas facile de se représenter si 9 grammes de sel dans 100 grammes de ratatouille c’est peu ou si c’est beaucoup » (Bancquart, 2014). Par ailleurs, ces informations restent affichées ton sur ton, ce qui ne les rend pas très visibles. C’est pourtant cet affichage qui a été choisi par l’Union Européenne pour informer les consommateurs sur les valeurs nutritionnelles des aliments transformés.

 

Dans le but de rendre les étiquettes plus lisibles, un débat a eu lieu sur un projet d’étiquetage dit de « feux de signalisation ». Ce projet d’étiquetage consiste à apposer à l’avant des emballages des étiquettes détaillant la quantité de sucre, de graisses (dont saturée) et de sel. Ces quantités seraient directement représentées par une pastille colorée rouge, orange ou vert selon des seuils nutritionnels déterminés. Par exemple, 100 g de lasagnes au bœuf surgelées contiendraient 27 g de graisses (feu orange), 13 g de graisses saturées (feu rouge), 9 g de sucre (feu vert) et 1.2 g de sel (feu orange). Ce système existe déjà en Angleterre, où il est promu par l’agence gouvernementale Food Standards Agency (Bancquart, 2014).

 

Cependant, les députés européens ont malheureusement votés contre ce projet de loi. L’argument qui fonde leur décision est que certains produits, de par leur nature, sont riches en sel ou en graisse comme par exemple la charcuterie. Il est vrai qu’un macaron rouge pourrait effrayer le consommateur. Or, le vrai problème, c’est que cet argument est le même que celui de l’industrie agroalimentaire, qui a fait un travail de lobbying historique. En tout cas, « c’est ce qu’indique le rapport de Corporate Europe Observatory, une ONG (Organisation Non Gouvernementale) hollandaise qui rend public les actions des groupes de pressions à Bruxelles » (Rapport intitulé « A Red Light for Consumer Information » ou « Feu rouge pour l’information des consommateurs) (Bancquart, 2014).

 

Un lobby est un synonyme de « groupe de pression » qui définit une « structure dont se dote une communauté aux intérêts ou convictions semblables pour influencer les pouvoirs publics à son avantage, notamment par des campagnes d’opinions » (Mialon, 2013). En soit, un lobby n’est pas vraiment quelque chose de néfaste puisque tout le monde peut faire valoir son point de vue. Cependant, une activité de lobby prend du temps, de l’argent et demande de pouvoir être proche des centres politiques les plus influents. C’est pourquoi, on peut conclure que cette activité n’est pas à la portée de chacun et qu’il est difficile pour un citoyen lambda de faire entendre sa voix (Mialon, 2013).

L’industrie agroalimentaire aurait donc exercé cette activité de lobbying auprès des députés européens, soit un milliard d’euros, pour que ce projet de feux tricolores sur les produits agroalimentaires ne passe pas. Ce montant ne constitue que peu comparé au 985 milliards d’euros que représente le secteur agroalimentaire. Selon les députés, cette campagne de lobbying est l’une des plus importantes en Europe depuis celle de l’industrie automobile contre la limitation des émissions de CO2 (Bancquart, 2014).

Par exemple, l’eurodéputé néerlandaise Kartika Liotard a raconté avoir reçu des messages dans la proportion de 100 mails des lobbies de l’agro-industrie pour un mail des associations de défense des consommateurs. La plupart des messages envoyés aux parlementaires concernent des cas particuliers ou des points de détails permettant de troubler la vision des eurodéputés assaillis par le nombre de données (Bancquart, 2014).

 

De plus, on constate souvent des conflits d’intérêts en ce qui concerne les études scientifiques concernant l’alimentation et la santé. En effet, le lobby de l’industrie agroalimentaire avait commandé au Conseil Européen d’information sur l’alimentation (EUFIC) deux études scientifiques visant notamment à démontrer que les consommateurs perçoivent correctement les étiquettes (AJR) disponibles en magasin aujourd’hui. Cependant, l’EUFIC est un think tank financé notamment par l'Union européenne mais aussi par Coca-Cola, McDonald's, Nestlé, Ferrero, Danone, Unilever et Kraft, et dont la directrice est Joséphine Wills, une ancienne lobbyiste en chef de Mars® (les barres chocolatées) pour la politique européenne (Bancquart, 2014) qui sont de grandes entreprises du secteur agroalimentaire.

 

Par conséquent, ces études ne sont pas faites par des organismes indépendants ce qui les démuni de toute objectivité et neutralité. C’est pourquoi, l’influence des lobbies agroalimentaires est très importante concernant notre santé. En effet, le consommateur n’est, au final, que peu informer sur ce qu’il mange et sur ce qui est bon pour sa santé ou non. De plus, on constate que les lobbies sont aussi puissants que les institutions politiques et qu’ils arrivent même à les influencer au niveau réglementaire dans le but de protéger leurs intérêts. En Europe, il existe par exemple des lobbies dans plusieurs domaines de l’agroalimentaire comme la viande ou encore les produits laitiers (Mialon, 2013).

 

Audrey AURET

 

RÉFÉRENCES :

 

BANCQUART, Rudy (page consultée le 21 novembre 2014). Etiquetage des produits alimentaires : le poids des lobbies, [en ligne], http://www.allodocteurs.fr/actualite-sante-etiquetage-des-produits-alimentaires-le-poids-des-lobbies-12859.asp?1=1

 

MIALON, Jonathan et Mélissa (page consultée le 21 novembre 2014). Lobby agroalimentaire, [en ligne], http://toussurlamemeplanete.overblog.com/lobby-agroalimentaire

Commentaires

  • C'est assez percutant de lire ça.

    Il est plutôt aberrant de voir qu'autant de démarches et de débats ont eu lieu à ce sujet pour obtenir si peu de résultats. Je suis d'accord que le système des feux de circulation désavantage grandement certains aliments par leur nature, mais il y a certainement une manière de laisser savoir aux consommateurs à un certain degré de connaitre ce qui est bon ou mauvais pour leur santé.
    Les lobbies sont souvent des joueurs pertinents et intéressants, mais le cas du lobby agroalimentaire dans ce cas expose un coté désolant des groupes de pressions qui n'agit pas pour le bien de la population.

    Il serait pertinent et primordial que le dossier s'active davantage de manière à disposer d'un organisme indépendant qui conduirait des études qui fassent en sorte que le consommateur ait au moins une idée des valeurs nutritives de ce qui se retrouvera dans son assiette.

  • Audrey... Bien reçu pour nourrir nos connaissances et mieux se former une opinion. Bonnes suites.

Les commentaires sont fermés.